Quelle vendange pour 2020 ? [par Yann Kerveno]

Le mildiou aura largement amputé le potentiel d’une récolte prometteuse au moment des sorties. Le point à quelques semaines du début des vendanges.

À Banyuls, Maury, Talairan… Le maître mot de l’année c’est hétérogénéité. “C’est difficile de faire des estimations. Certaines vignes ont beaucoup souffert du mildiou, d’autres moins, chaque situation, presque chaque parcelle est différente” confirme Christophe Czekaj, directeur du syndicat des vignobles de la Côte Vermeille. Prudemment, il estime, à partir de ce qu’il entend dans le vignoble, que la vendange pourrait être 10 à 15 % inférieure à une année normale ou moyenne. Donc meilleure que l’an dernier. Julien Thiery abonde : “Nous devrions avoir une petite année mais pas au niveau de 2019 qui était presque une année record par la modestie de la vendange avec 622 000 hl sur 19 600 hectares.”
Dans les Aspres, un des terroirs les plus exposés au mildiou cette année, Hervé Lasserre, directeur général de Terrassous confirme à son tour l’hétérogénéité des dégâts. “Nous sommes en présence de zones où tout a déjà été vendangé par le mildiou et d’autres, celles dont les vignerons sont parvenus à gérer la pression, qui offriront une récolte correcte, au moins supérieure à l’an passé” détaille-t-il.

8 à 10 passages
Dans l’Aude, Ludovic Roux va finir par se demander ce que le département a fait pour mériter ça. Cette année, les vignes de Corbières ont subi un gel, puis la grêle au printemps qui a affecté 200 hectares, puis le mildiou. Sans compter les conséquences de la sévère sécheresse de 2019 : “Les vignes à taille courte, comme le carignan, ont eu des sorties très faibles cette année.” Pour la cave de Talairan qu’il préside, la facture est déjà salée. “L’an dernier nous avons fait 55 000 hl. Cette année, on ne sait même pas si on va arriver à 45 000 hl.”
Nouveau directeur de la cave de Maury, Xavier Hardy ne se risque pas au jeu du pronostic mais dresse les mêmes constats. “C’est difficile, certains producteurs ont fait entre 8 et 10 passages pour maîtriser la pression. Cela s’est arrangé avec la tramontane depuis début juillet mais ce sera très hétérogène. Ici les anciens disent qu’il faut remonter à 1977 pour connaître une telle situation. En tout cas on ne vendangera pas avant la mi-août”. 2020 restera, pour le monde viticole, une année particulièrement complexe.

Attention tordeuses !
Cette pression du mildiou coûte cher aux vignerons. “Cela rajoute une difficulté particulière. Les exploitations qui étaient déjà dans des situations de trésoreries difficiles n’ont pas forcément pu faire face au mildiou au bon moment et avec les bons produits, et ce sont majoritairement celles-là qui vont vendanger le moins cette année” analyse Hervé Lasserre. Et la saison est loin d’être finie. “Il y aura encore du mildiou sur feuille jusqu’après les vendanges, sur les raisins, on est maintenant plutôt au stade Rot brun, les contaminations ne se font plus que de grain à grain et non plus par morceau ou grappe entière.”
Mais d’autres calamités pourraient encore s’inviter. “Avec les conditions météo de cette année, les baies sont grosses et les peaux fragiles. Il faut donc que la grêle nous évite. La météo de ces prochaines semaines décidera aussi si la pression de botrytis sera accentuée ou non. Mais il y a aussi les tordeuses, Eudémis et Cryptoblabes, qui sont bien présentes cette année…” 

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