Sortir de sa coquille
S’il est difficile d’y voir clair dans le chaos politique du moment et de savoir ce que deviendront les dossiers en cours en juillet, il n’est toutefois pas interdit de jouer de la calculette et de se projeter après les vendanges de cet été, même si les perspectives sont pour le moins sombres. Il y a d’abord le court terme. Les retiraisons qui ne progressent pas, les ventes qui s’effondrent – l’Agri s’en est fait l’écho la semaine passée – les problèmes de trésorerie dans les entreprises et les cuves pleines qu’il faudra bien vider, un jour ou l’autre, pour accueillir le millésime 2024. Il y a déjà de quoi très très mal dormir. Et puis il y a le long terme. La perspective de l’arrachage qui pourrait faire disparaître la moitié du vignoble des Pyrénées-Orientales, (un peu moins dans l’Aude ?) en deux ans. C’est là qu’il faut sortir la calculette et s’accrocher au pinceau.
Le chiffre d’affaires de la viticulture dans les Pyrénées-Orientales, c’est un peu plus de 200 millions d’euros. Donc, dans l’absolu, ce sont autour de 100 M€ qui vont disparaître de l’économie du département. 100 millions si l’on ne prend que le chiffre d’affaires direct des entreprises viticoles. À quoi, pour avoir une estimation globale, il faut ajouter les consommations intermédiaires, indirectes (machines, engrais, matières sèches) et induites. À savoir l’utilisation de la richesse créée par ce chiffre d’affaires (salaires, etc.) qui vient abonder l’économie du département.
Il serait donc dommage que l’arrachage, promis avant le capharnaüm de ces derniers jours, se fasse aussi dans l’absolu. Qu’il n’y ait pas une réflexion locale sur la manière d’aborder cette triste séquence, en profiter pour restructurer le vignoble, sauver les belles vignes, les entreprises. Et pour cela, sortir de sa coquille, passer par-dessus les inimitiés d’antan et engager un vrai travail collectif pour limiter la saignée. La Nupes a réussi à le faire, pourquoi pas les vignerons ?
Yann Kerveno