Le verre est bien à moitié vide [par yann Kerveno]

Chaque semaine qui passe sans pluie enfonce un peu plus notre département dans la crise. Et la neige ne sera pas suffisante…

Avant le prochain comité sécheresse dans quelques jours, c’est peu dire que l’inquiétude grandit, se fait omniprésente et que l’on est réduit à croire aux miracles pour que tombe la pluie. Si les processions ne changent pas le cours de l’histoire, ça se saurait, la saison agricole qui s’ouvre aura rarement été aussi incertaine. Un peu comme si l’on était à l’aube d’une catastrophe vue venir de loin. Difficile en tout cas d’estimer à quelle hauteur le printemps et l’été devraient être pluvieux pour sauver les meubles et compenser le déficit estimé qui approche les 300 mm, soit la moitié de la pluviométrie annuelle de Perpignan.

“Je pense que c’est beaucoup plus car les nappes sont en situation de crise et ne se remplissent pas comme un tonneau, c’est vrai pour les nappes phréatiques du Quaternaire et encore plus pour les nappes du pliocène” explique l’hydrogéologue Henri Got. Du côté des réserves, c’est aussi la grande déprime. Le lac des Bouillouses est vide, celui de Vinça pas encore à moitié plein, tout comme celui de Caramany. Et la neige ne complètera pas suffisamment. “Il nous reste un million de mètres cubes sur le barrage des Bouillouses que nous sommes obligés de conserver pour la sécurité de nos installations, éviter qu’elles gèlent, l’approvisionnement en eau potable de Font-Romeu et le maintien des débits réservés dans la Têt” détaille Bertran Loock, responsable du service gestion de l’énergie de l’entreprise SHEM.

Rupture de production

“Le manteau neigeux est très insatisfaisant jusqu’à aujourd’hui. Il doit pouvoir nous apporter entre deux et quatre millions de mètres cubes sur les seize que stocke le barrage. Et quand on regarde les prévisions météo telles qu’elles sont envisagées début mars, il y a seulement 50 % de probabilité que nous arrivions à remplir le barrage à moitié cette année.” Fait exceptionnel, les barrages de la Têt ont donc suspendu leur production d’électricité, c’est la première fois qu’une rupture de production se produit au mois de mars. “Même si la demande n’est pas très importante en mars, nous avons habituellement des stocks pour répondre ponctuellement” ajoute-t-il.

En aval, et en l’état actuel des choses, il y a aussi une proportion limitée de chances que le barrage de Vinça soit rempli en l’absence de pluies importantes et régulières à venir alors que la floraison des arbres est maintenant bien engagée. Pour les connaisseurs du dossier, c’est la possibilité d’une absurdité qui se profile. En effet, même s’il pleut, les plantes qui ont démarré leur cycle végétatif vont pomper une bonne partie de l’eau immédiatement disponible. Cela ne rechargera donc pas les nappes qui sont l’étalon des mesures de restrictions puisqu’elles assurent l’approvisionnement en eau potable. Avec le risque que les canaux soient empêchés de prélever alors qu’ils participent activement à la recharge des nappes…

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