La distillation pour 10 millions d’hectos ?
Le député européen Éric Andrieu appelle à la distillation pour éviter un crack dans le monde du vin. La profession appuie.
Il y a 10 ans que le monde viticole n’avait plus eu recours à la distillation, mais aujourd’hui c’est une des voies envisagées pour atténuer l’impact de la crise en cours. “Oui, c’est un dispositif que nous demandons, avec plusieurs pays européens d’ailleurs” détaille Miren de Lorgeril, présidente du Conseil interprofessionnel des vins du Languedoc. “Nous sommes au mois d’avril, nous savons que les deux ou trois mois de consommation qui manquent ne seront pas rattrapés d’ici les prochaines vendanges, d’autant plus que la crise est mondiale. Et ce, même si les consommateurs continuent de boire du vin, il manque tout le canal de la restauration, il n’y a plus de fêtes, plus de rencontres dans les familles, ce sont autant d’occasions qui se sont évaporées.” Dans la demande exprimée par Éric Andrieu, il est fait mention d’un prix de distillation de 80 euros l’hecto, pris en charge par l’Union européenne à hauteur de 35 €. “Avec ce tarif-là, il est clair que cela va surtout concerner les IGP du Languedoc ou les AOP non valorisées qui atteignait récemment péniblement 130 euros, dans tous les bassins de la vallée du Rhône ou Bordeaux » ajoute la présidente du CIVL.
Aide au stockage
“Pour les AOP à 200 euros et plus l’hecto, nous demandons plutôt une aide au stockage, pour laisser le temps aux entreprises de laisser passer l’orage. Après, souvent dans la région, les entreprises produisent à la fois de l’IGP et de l’AOC, donc elles pourront prendre des arbitrages adaptés à leur cas particulier.” Autre demande émise par les professionnels, l’augmentation temporaire de la possibilité d’incorporer les vins du millésime suivant dans les rosés. Tolérée à hauteur de 15 %, les professionnels voudraient qu’elle soit élargie jusqu’à 30 %, de façon à rafraîchir les stocks de rosés 2019 qui ne seront pas commercialisés. Mais ce qu’attend la filière aujourd’hui, en plus des mesures, c’est qu’elles soient prises rapidement. “Nous sommes à seulement quatre mois de la vendange, des décisions rapides nous aideraient à préparer la sortie de crise et à ne pas avoir à nous concentrer sur le sauvetage des entreprises lorsque le marché redémarrera.” La mesure de distillation est demandée pour 10 millions d’hectos (1 milliard de litres) quand la production européenne a été estimée à 156 millions d’hectos l’an dernier. C’est dire l’ampleur du problème.
Yann Kerveno