Intrants : attention aux pénuries [par Yann Kerveno]
Aliments, irrigation, engrais, serres, tout flambe et les intrants n’échappent pas à la règle. Avec des risques avérés de pénurie.
L’agriculture, comme de nombreux secteurs industriels, se trouve aujourd’hui en situation délicate à cause de l’augmentation du prix des intrants. C’est mécanique, l’aliment pour le bétail est indexé sur le coût des matières premières. Donc quand celles-ci sont chères, comme en ce moment (blé, maïs conso, en particulier soja à plus de 500 $ la tonne après un pic à plus de 640 $ en mai et contre 370 dollars en août 2020 !), forcément ça renchérit le kilo de viande. Et les spécialistes n’attendent pas de possible détente avant décembre, quand la récolte de l’hémisphère Nord sera complète et qu’il sera possible d’y voir clair sur celle de l’hémisphère Sud. Mais les productions animales ne sont pas les seules concernées, loin de là. “C’est tendu dans un peu tous les secteurs” confirme Philipe Perez, responsable de la région Pyrénées-Orientales d’Arterris. “Ce qui impacte le plus les prix, c’est probablement le manque de containers et la flambée du prix du fret, en particulier entre l’Asie et l’Europe. Le prix a été multiplié par près de 5 en quelques mois.” De quoi faire réfléchir quant à certains approvisionnements.
Pénuries à venir
“Pour la vigne, nous faisons venir les bambous de Chine et le transport vaut plus que les matériaux transportés” témoigne-t-il. Mais ce qui l’inquiète le plus, ce sont les pénuries sur certains produits. “Ça se produit sur les plastiques dont sont consommateurs les maraîchers, parce qu’il y a des tensions sur les matières premières. On le voit aussi sur les piquets, par exemple pour la vigne. Les fournisseurs de bois préfèrent aujourd’hui vendre leur production au secteur du bâtiment, qui paye mieux, plutôt qu’à l’agriculture.” Il impute ces désordres du marché en grande partie à la crise de la Covid et à la désorganisation qui en découle, dont certains secteurs ne sont pas encore remis. Pour les producteurs, les augmentations peuvent atteindre 30 % et jusqu’à 50 %, sur le matériel d’irrigation par exemple. “L’impact est trop fort pour les exploitations alors, à la coopérative, nous jouons sur les stocks pour diluer l’augmentation” explique-t-il.
Attention aux engrais minéraux
“En temps normal, nous incitons souvent nos adhérents à commander tôt, c’est encore plus valable cette année parce que là ce n’est pas une question de tarifs mais bien de disponibilité des produits. Il est impératif de se couvrir dès que possible pour ne pas se retrouver le bec dans l’eau.” Et il pense plus précisément à deux types de produits, le palissage métallique et les engrais minéraux dont les prix sont déjà en forte hausse. Tout en prévenant qu’il est illusoire d’attendre, à priori, un retour à la normale des flux et un retournement des marchés dans les semaines qui viennent. “Il n’y a absolument aucun signe qui laisse penser qu’un retournement est imminent.”