Concombre : un printemps tendu ? [par Yann Kerveno]
Les productions sous serre, quand elles sont chauffées, sont celles qui sont aujourd’hui confrontées au printemps de tous les dangers. Mais les producteurs français restent confiants. Dans les Pyrénées-Orientales, les premiers concombres en abri froid sont en place…
Le coût de l’énergie a sensiblement modifié le paysage de la production de tomates et de concombres à l’échelle européenne. Les producteurs anglais et néerlandais, entre autres, ont décalé les mises en culture pour ne pas prendre le risque de “manger la grenouille” pendant plusieurs semaines, c’est-à-dire laisser toute leur marge dans la facture de gaz. Si les producteurs français de concombres ont pris ce risque, en particulier dans les Pyrénées-Orientales, devenu le troisième bassin de production du pays avec la région nantaise et celle d’Orléans, ils ont bénéficié d’un coup de pouce du destin : le froid qui a touché l’Espagne en janvier et mis à l’arrêt les productions. Libérant le marché pour les produits français “à des prix jamais vus” explique Bruno Sangerma, directeur commercial en charge des concombres pour le groupe Saveur des Clos.
Deuxième metteur en marché français
Avec 14 000 tonnes de potentiel, le groupe illois est devenu d’ailleurs le deuxième metteur en marché français. Et pour la saison qui s’ouvre ? Les incertitudes, outres celles, habituelles, du marché et de la consommation, sont au nombre de deux. La première et la plus immédiate alors que les plantes sont mises en place dans les tunnels : l’eau. “Même si la plupart de nos productions sont en lutte intégrée et en irrigation de précision, il faut quand même un peu d’eau pour les faire pousser. Le concombre, c’est 99 % d’eau” précise Manu Ruperez, historique producteur de concombres du département. Les producteurs sont donc suspendus aux décisions de la préfecture. L’an passé, il y avait de l’eau, mais ce sont les fortes chaleurs qui étaient venues entamer significativement le potentiel de production en raccourcissant la récolte d’une dizaine de pour cents en moyenne. Deuxième écueil qui peut venir se dresser sur la route d’une saison compliquée, la collision des calendriers. Les producteurs espagnols ont pris du retard, les Néerlandais ont attendu que les températures remontent pour mettre leurs cultures en place, toutes les productions européennes ne risquent-elles pas de débouler en même temps sur le marché ?
Période compliquée
“Si”, reconnaît Bruno Sangerma. “Mais le marché français est abondé à 80 % par des concombres français et nous ne rencontrons de problèmes que lorsque le différentiel de prix s’accroît avec les concombres des autres pays producteurs” explique-t-il. “Nous bénéficions d’une bonne image auprès des distributeurs qui ont encore en tête l’épisode e-coli de 2011, quand le concombre espagnol avait été suspecté de provoquer l’épidémie. L’origine française est un gage de réassurance pour les distributeurs” ajoute Manu Ruperez. “Mais nous savons que la période qui va de mi-avril jusqu’à fin juin risque d’être compliquée” reconnaît quand même Bruno Sangerma. À condition, d’abord, qu’il y ait de l’eau.
Tomates-concombres : le potentiel européen
Dans l’espace européen continental, c’est bien la Turquie qui joue le rôle de poids lourd, que ce soit en concombre ou en tomate. Les producteurs turcs occupent de loin la première place, produisant, en tomate et en concombre, plus du double de tonnages que les seconds du classement, les producteurs italiens pour la tomate et les producteurs espagnols pour le concombre. Pour autant, l’origine turque pèse assez peu sur le marché européen du frais, une grande partie des deux productions étant dirigée vers la transformation. Depuis 2013, la production de concombres progresse légèrement en France qui occupe la 4e place du classement dans l’Union à 27, elle est passée de 128 000 à 142 000 tonnes, elle est globalement stable dans tous les autres pays. Premier producteur de l’UE à 27, l’Espagne est suivie des Pays-Bas et de la Pologne. En tomate, le classement n’a pas véritablement bougé depuis 2013, l’Italie est le premier producteur de tomates de l’UE devant l’Espagne, deux pays qui destinent, à l’instar de la Turquie, une partie de leurs volumes à la transformation. Suivent le Portugal, la Grèce, les Pays-Bas, la Pologne et enfin la France au 7e rang.
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