Chasse : ouverture générale le 11 septembre, l’interview de Jean-Pierre Sanson

FDC66 : On serait tenté d’écrire “comme chaque année, c’est l’ouverture”… Mais la chasse, elle aussi, est percutée par les bouleversements climatiques et sociétaux. Pour vous aussi, fini le temps de l’abondance et de l’insouciance ?
J.-P. SANSON. S’il y a bien un secteur d’activité dans notre pays qui, depuis longtemps, est en première ligne pour alerter sur la modification de notre environnement et des efforts à faire pour le préserver, ce sont bien les chasseurs ! L’abondance, quand on parle de petit gibier par exemple, il y a belle lurette que ce n’est plus le sujet. Quant aux évolutions de la société, les attaques régulières que nous subissons sur nos modes de vie nous ont vaccinés contre toute insouciance. C’est une rentrée combative sur tous les fronts qui nous attend.

Quelles sont vos priorités ?
Les problèmes sont si complexes et imbriqués que je serais tenté de dire que tout devient prioritaire. Mais il y a deux axes essentiels qui vont guider nos actions : la sécurité et la biodiversité.

La sécurité… Que peut-on faire de plus après toutes les campagnes que vous avez menées dans le département ?
C’est un sujet sans fin car il est remis en jeu à chaque saison, je dirais même à chaque battue, à chaque partie de chasse. Elle demande une concentration et une attention extrême de tous les instants et à tous les niveaux.
Le premier niveau, essentiel, est le comportement individuel et collectif sur le terrain. Je le répète sans cesse : il n’y a pas de fatalité. Très peu d’incidents sont dus au hasard ou à “pas de chance”.
Je reste intransigeant devant le respect des règles et une fois de plus, je le redis aux présidents d’ACCA, ceux qui ne les respectent pas n’ont rien à faire parmi nous. La Fédération soutiendra toujours les présidents d’ACCA ou de sociétés de chasse lorsqu’il s’agira de prendre la décision d’évincer d’une battue tous ceux qui n’ont pas un comportement irréprochable en la matière.
Ensuite, il y a l’aspect formation que nous menons au niveau de la FDC66. Bien avant la nouvelle loi sur la chasse, nous organisions déjà des sessions sur la sécurité, en plus de celles dispensées lors de l’examen du permis. Aujourd’hui, la loi les rend obligatoires pour tous les chasseurs tous les 10 ans.
C’est une bonne chose. Nous allons de notre côté proposer des formations complémentaires “Sécurité” à destination des présidents d’ACCA et des chefs de battue.

Vous pouvez mesurer les résultats obtenus ?
Le dernier rapport de l’OFB confirme la tendance à la baisse des incidents observés depuis 20 ans. De plus de 200 incidents en 2001, nous sommes passés à 90 la dernière saison sur toute la France, dont 8 mortels. Statistiquement, c’est très peu quand on les rapproche des accidents dans d’autres activités de nature, mais c’est 8 de trop (dont 2 non chasseurs) et on ne peut pas s’en contenter.

Le 2e axe que vous pointez : la biodiversité.
C’est là encore un sujet prioritaire qui engage notre avenir. Je sais que ce mot est mis à toutes les sauces et qu’il peut même finir par en agacer certains quand il sort de la bouche de nos opposants. Mais c’est un sujet qui nous incombe prioritairement, nous, chasseurs, car la biodiversité, nous en sommes les sentinelles, les protecteurs depuis que la chasse existe !
Personne mieux que nous n’est confronté directement à l’évolution des milieux, à la nécessité de l’équilibre des espèces, à la protection de leur habitat pour conserver la richesse de notre faune et de notre flore. Et je parle là des espèces chassables et non chassables, car la nature ne se découpe pas en morceaux, tout est lié.

Quels actions allez-vous développer ?
Il y a déjà une situation d’urgence dans laquelle nous devons nous investir particulièrement : le soutien à tous les territoires qui ont été touchés par les incendies. Nous allons prendre contact dans les prochains jours avec les présidents d’ACCA et les élus des territoires concernés pour proposer l’aide des chasseurs pour réhabiliter et réaménager les habitats, notamment pour la petite faune et le petit gibier.

Votre antériorité dans l’analyse des enjeux de biodiversité vous permet-elle d’être innovant sur ces sujets ?
Bien sûr ! Et ici, dans les Pyrénées-Orientales, nous avons la chance d’avoir à la Fédération une équipe de techniciens cynégétiques tout à fait remarquables. C’est une des raisons de la reconnaissance toujours croissante de notre expertise et des sollicitations toujours plus nombreuses en provenance de l’État, des collectivités ou des institutions environnementales.
Nous allons d’ailleurs lancer cette année des sessions de formations “Biodiversité” à destination des élus locaux, des acteurs cynégétiques et agricoles. C’est important que chacun ait une vision partagée de l’existant et des actions à mener de préservation et de développement.
La biodiversité est une affaire collective et elle ne doit pas être confisquée par des officines idéologiques qui sont toujours très éloignées des réalités du terrain.Notre prochaine newsletter sera consacrée entièrement à ce dossier pour mieux préparer les esprits avant ces réunions.

Sur ce sujet, une polémique a émergé en cette rentrée sur les “cadeaux” du président de la République aux chasseurs et notamment sur des sommes “faramineuses” allouées à des actions “biodiversité”, non contrôlées, menées par les chasseurs.
Ce sont des attaques politiciennes honteuses qui ont pour origine les lobbys anti-chasse et je sais que la FNC va y répondre point par point. Une fois encore, ils propagent de la confusion pour jeter l’opprobre sur les chasseurs. Je rappelle ici quelques points de clarification : la nouvelle loi chasse de juillet 2019 a permis à plus de chasseurs de valider un permis national (500 000 contre 100 000 auparavant). Cela rapporte donc plus d’argent à la FNC qui encaisse environ 50 € par permis national. Il faut savoir que sur chaque permis, l’État prélève une taxe de 9 € par validation et une redevance cynégétique de 46 €.
Je tiens à rappeler que nous sommes, avec les pêcheurs, les seuls utilisateurs de la nature à être taxés pour notre activité !

La polémique pointe aussi les aides financières de l’État et le peu de contrôle sur la destination des sommes engagées sur des actions “biodiversité” menées par les chasseurs…
La encore, ces attaques sont minables quand on sait l’engagement et l’abnégation des chasseurs à remplir de plus en plus de missions d’intérêt public. Ces aides de l’État sont le juste retour des choses, liées aussi aux transferts de missions de l’État vers les FDC, comme par exemple la lourde gestion et le suivi des ACCA qui étaient avant dévolus aux services préfectoraux.

Concernant la gestion de l’éco-contribution, ce nouvel outil de gestion et de répartition des sommes engagées pour la biodiversité, je suis là particulièrement en colère ! Ces gens veulent remettre en cause et salir nos actions. C’est de la désinformation pure, à la limite de la diffamation. Nous ne sommes pas responsables des outils de contrôle et de leur manière de fonctionner. Mais rassurez-vous, il y en a pléthore et suffisamment pour qu’ils puissent vérifier tout ce qui touche à l’utilisation de l’argent public. Nous en sommes soucieux et irréprochables.

En fait, c’est le nouveau dispositif de l’éco-contribution qui est visé ?
Bien sûr, c’est une spécialité en France de vouloir détruire toutes les bonnes initiatives, sous prétexte qu’on n’en est pas à l’origine.
C’est à l’initiative de la FNC que la loi chasse du 24 juillet 2019 a créé un fonds biodiversité dans le cadre du nouvel Office français de la biodiversité (OFB). C’est un fonds qui est abondé par une éco-contribution afin de financer des projets portés par les fédérations des chasseurs pour la protection de la biodiversité.
Le dispositif prévoit que, lors de la validation du permis de chasser, chaque chasseur contribue à hauteur de 5 € avec un complément de l’État de 10 € afin de financer des actions concrètes. C’est près de 15 millions d’euros par an qui pourront ainsi être consacrés à la biodiversité par l’intermédiaire de projets déposés par les fédérations auprès de l’OFB.
Tout est transparent et vous pouvez suivre, par exemple sur le site de la FNC, tous les projets en cours, sur quel territoire, avec quel objectif visé. À ce jour, 40 % des projets concernent la préservation des habitats et 31 % des fonds sont consacrés à la connaissance des populations et des espèces.

Dans les Pyrénées-Orientales, sur quels projets les chasseurs s’investissent-ils ?
Tout ce qui recouvre donc la biodiversité : la réhabilitation et l’entretien des milieux naturels, le suivi, la connaissance et la préservation des espèces, l’éducation à l’environnement. Mais aussi la sécurisation de la circulation routière avec des dispositifs anti-collision avec la faune sauvage ou encore le développement de la filière venaison qui a un intérêt économique général (nous allons d’ailleurs développer encore notre partenariat avec les Ets Guasch pour rechercher de nouveaux débouchés). Ces projets ne relèvent pas de l’action de chasse elle-même et sont pour l’essentiel d’intérêt public. On est bien loin de ces misérables polémiques sur ces pseudos cadeaux ! Au niveau de notre département, l’argent public que nous percevons provient notamment de l’OFB, l’Agence de l’eau, le Conseil départemental 66, le Conseil régional Occitanie, PMM…
La chasse a un impact économique et social capital au niveau national, régional et départemental. Nous apportons bien plus à la collectivité que ce que l’on veut faire croire aux Français !

C’est donc une rentrée particulièrement riche qui vous attend ?
Et je n’ai pas parlé de notre action continue et renouvelée pour la maîtrise des dégâts. Là encore, je souligne l’exceptionnel engagement de nos chasseurs avec l’aide précieuse des louvetiers. Un dossier sur lequel nous obtenons des résultats grâce aussi et surtout au relationnel privilégié avec les instances agricoles et tout particulièrement sa présidente, Fabienne Bonet.
Vous le voyez, le travail ne manque pas ! Nous travaillons à flux tendu et, ici encore, je veux rendre hommage à toutes les équipes de la FDC66, administratifs, techniciens et son directeur, pour l’abnégation et le professionnalisme avec lesquels ils sont en première ligne tous les jours. Par respect pour leur travail et pour l’impérieuse nécessité que nous avons de nous consacrer à tous ces sujets, j’en appelle à toute la famille des chasseurs catalans pour qu’elle reste soudée, unie et solidaire et évite ainsi de nous rajouter une charge de travail supplémentaire pour régler des bisbilles d’un autre temps.

Avec votre élection à la présidence de la Fédération régionale des chasseurs d’Occitanie, est-ce difficile de mener de front toutes ces responsabilités ?
C’est une question d’organisation et surtout d’équipe. Je sais que je peux m’appuyer sur un conseil d’administration compétent et dévoué à notre cause. Il connaît parfaitement les dossiers du département. Et je suis heureux, avec lui, de pouvoir finaliser, en novembre prochain, notre futur SDGC qui déterminera, pour les six prochaines années, les enjeux et les moyens à mettre en œuvre sur les Pyrénées-Orientales pour assurer une chasse éthique et durable, en préservant le respect mutuel entre les différents utilisateurs de la nature.
J’assure tous nos chasseurs et nos chasseresses qu’ils peuvent être fiers de vivre leur passion.
Soyons solidaires et attentifs à être irréprochables pour que notre chasse reste populaire, éthique et durable.
Bonne ouverture à toutes et à tous !

FDC 66

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