Chasse – Willy Schraen : “la propriété privée et les libertés individuelles sont quelque chose de sacré !” [par Thierry Masdéu]

Le samedi 8 avril, la ville de Saint-Estève accueillait, au Théâtre de l’Étang, l’assemblée générale statutaire fédérale des chasseurs des Pyrénées-Orientales. Une fois n’est pas coutume, l’ensemble des adhérents et partenaires cynégétiques ont eu le privilège de pouvoir échanger avec un invité d’honneur, le président de la Fédération nationale des chasseurs, Willy Schraen. Rencontre avec ce Pas-de-Calaisien, charismatique défenseur des chasses traditionnelles et du monde rural, venu prendre le pouls des chasseurs catalans…

Quel message venez-vous communiquer aux chasseurs des contrées catalanes ? 
Déjà, je viens surtout leur apporter mon soutien, leur dire que les temps sont difficiles pour la chasse, il n’y a qu’à voir comme médiatiquement c’est compliqué ! Mais que nous détenons et transmettons des valeurs et traditions qui, aujourd’hui, sont essentielles dans cette société qui parfois perd un petit peu ses repères. Que la chasse est un socle fort du monde rural, c’est un mode de vie et ce pouvoir et ces valeurs que nous véhiculons sont à mes yeux un modèle. Alors je veux leur dire que les temps, oui, sont peut-être un peu plus durs, mais pas que dans la chasse et que l’avenir sera meilleur, j’en suis persuadé, car on voit des signaux importants. Donc, avant tout, c’est ce que je souhaite leur transmettre, un message de soutien et de force de motivation à rester ce que nous sommes et, surtout, d’être fiers d’être des chasseurs et d’être fiers d’être des ruraux !

Vous évoquiez que les temps sont difficiles pour la chasse et que médiatiquement c’était compliqué. Vous pouvez développer ?
Disons que le traitement de choc qui nous est réservé depuis quelques temps par, je dirais, une écologie politique, est très, très dur ! Comme également sur l’évocation des accidents de chasse qui sont d’ailleurs un sujet totalement surmédiatisé, je dirais même mensonger, alors qu’en vingt ans, on les a divisés par quatre. Et les accidents mortels, même si un mort est toujours un mort de trop, on les a divisés par cinq, alors que pendant ce même laps de temps, on a multiplié par cinq nos coups de carabine ! Il faut remettre les choses dans leur contexte : dans la nature, nous représentons 4 % des accidents mortels et moins de 2 % des accidents. Alors entendre dire qu’il va falloir interdire la chasse parce qu’il y a des problèmes de sécurité, il va falloir, à ce compte là, interdire beaucoup de choses.

Et puis, ce que l’on ne supporte plus, c’est effectivement ce procès injuste et mensonger qui est fait à la chasse française alors qu’elle fait des efforts et se bat tous les jours pour améliorer une situation. Alors utiliser la chasse, je dirais, comme une excuse politique par certains partis pour essayer d’en faire un fait d’arme politisé sur les réseaux sociaux, ça, c’est inadmissible et vraiment choquant ! 

Que répondez-vous au député écologiste Charles Fournier qui a présenté à l’Assemblée nationale une proposition de loi pour interdire la pratique de la chasse le dimanche ?
Je voudrais que l’on arrête d’écouter cette écologie politique, punitive et radicale qui veut tout interdire dans nos vies, qui veut remettre en cause nos libertés individuelles dans le pays, qui en a créé le concept et le principe quand même ! Alors, comment peut-on imaginer interdire la chasse le dimanche ou le dimanche après-midi ? Il y a deux territoires de chasse en France, les publics et les privés. Quand vous êtes sur les territoires publics, les choses sont déjà extrêmement bien gérées. Et il y a beaucoup de forêts domaniales qui ne sont pas chassées le dimanche, pas le samedi, des fois pas les vacances et pas le mercredi, donc je veux dire, il n’y a pas de problème, on règle ces sujets au niveau local. Mais en ce qui concerne les territoires privés, depuis quand dans ce pays la propriété privée deviendrait-elle, entre guillemets, violable ? Comment expliquer à quelqu’un qu’il ne pourra pas chasser chez lui le dimanche parce qu’il faudrait qu’il laisse son territoire à disposition de gens qui viendraient s’y promener et qui ne supportent pas que cette personne puisse être à la chasse, chez lui, le dimanche !

On crée une situation de haine qui n’existait pas et on monte les gens les uns contre les autres. On n’avait jamais eu d’histoire jusqu’à ce qu’on mette dans la tête des gens que la nature est à tout le monde. Je suis désolé, la nature n’est pas à tout le monde. Il y a quand même la propriété privée ! Ma grand-mère disait toujours : “gamin, quand t’es pas chez toi, c’est que t’es chez quelqu’un d’autre”. Et bien tout le monde devrait reprendre cette maxime comme essentielle au bien vivre ensemble.

Au sujet des grands prédateurs et notamment du loup, notre département ne relève pas pour l’heure de présence en meute, mais ce risque, qui inquiète de plus en plus nos éleveurs, n’est pas à écarter ? 
C’est un danger potentiel et je vais le dire clairement, c’est un vieux rêve un peu fou de l’écologie radicale de penser que le loup va se réinstaller partout en France et qu’il gérera les écosystèmes à la place des chasseurs ! Ce rêve écolo, il est là et il est très dangereux, la France ce n’est pas le parc de Yellowstone ! Faut-il attendre qu’il y ait un gamin qui se fasse manger au coin d’un bois pour comprendre ? Il faut des loups, oui il en faut, mais de façon raisonnable et surtout extrêmement encadrée. Mais rendez vous compte que nous avons aussi des passages de loups dans le Pas-de-Calais, un des départements les moins boisés de France ! Vous avez beaucoup de départements qui ont actuellement entre dix et vingt meutes, c’est énorme pour un département ! Quand est-ce que l’on va pouvoir enfin définir ensemble un nombre de loups, autour de la table, avec les associations pour la protection de la nature et, bien évidemment, en premier lieu avec les éleveurs, pour intelligemment réécrire l’histoire du loup en France ? Parce que ce qui risque de se passer, et c’est d’ailleurs ce qui se passe dans tous les domaines que je critiquais tout à l’heure, la sur-médiatisation des attaques feront que ce jour là, et bien le loup aura des problèmes beaucoup plus importants. Donc, avant que l’on arrive à une catastrophe, mettons nous autour de la table, arrêtons de nous mentir sur le nombre de loups car on sait qu’il est probablement 4 à 5 fois supérieur à ce que l’on nous annonce et trouvons ensemble une solution.

Que pensez-vous du projet de création d’une application mobile qui géolocaliserait les zones de chasse pour informer les autres usagers de la nature ? 
Jamais je ne me promènerai avec une balise Argos dans le dos, jamais ! Ce sera d’ailleurs un bras de fer terrible, je n’accepterai pas et j’invite tous les chasseurs de France à refuser. Je suis un homme libre, ma passion, elle est légale, c’est inadmissible et c’est même honteux de le dire et de l’imaginer ! Géolocaliser la chasse et les chasseurs, c’est contre les libertés individuelles, c’est contre la démocratie, nous n’accepterons pas ce genre de choses ! Et si jamais il y a quelqu’un qui n’a pas vu la déclaration ? Et s’il y a une erreur ? Et si le signal ne passe pas lorsque l’on est dans le fin fond de la cambrousse et qu’il n’y a pas de connexion Internet ? Vous imaginez le risque que cela pourrait représenter pour les personnes qui iraient se promener en disant “tiens, il n’y a forcément personne” et des chasseurs qui diraient “j’ai forcément déclaré” et ils seraient dans leur bonne foi. On n’est pas à l’abri d’accidents et cela va générer des tensions. C’est hors de question ! Et puis, la chasse n’est pas une science exacte. Si vous avez déclaré une partie de forêt et vous vous rendez compte le matin que les sangliers ne sont pas dans cette partie là, vous faite comment ? Nous on s’adapte au jour le jour, et là, si on ne peut plus bouger, on va perdre de l’efficacité au niveau de leur prélèvement.

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