AgriCampus 66 : un virage à prendre, des défis à relever [par Thierry Masdéu]

Sensibiliser les plus jeunes aux métiers de l’agriculture, tout un programme de séduction déployé depuis un an par la nouvelle direction des centres d’enseignements et de formations des lycées agricoles de Rivesaltes et Théza.

D’une appellation acronymique “EPLEFPA”, peu attractive à celle de “AgriCampus 66”, une marque ombrelle plus évocatrice souligne désormais la volonté de la nouvelle équipe de s’adresser aux nouvelles générations d’apprenants. Nouveau logo, nouvelle charte graphique, autant d’outils de communication dans l’air du temps qui témoignent de l’urgence : remplir les filières de l’enseignement agricole pour garantir la souveraineté alimentaire de demain. Une tendance qui semble être générale sur l’ensemble des territoires et qui a poussé le ministère de l’Agriculture à créer aussi sa marque “L’aventure du vivant”. Une opération qui, au travers de contenus très attractifs, permet de faire rayonner l’enseignement agricole public sur les réseaux sociaux. Un branle bas de combat qui mobilise toutes les institutions afin de revaloriser l’image de cette profession, trop souvent stigmatisée ou délaissée comme l’évoquait le mois dernier le vice-président de la Région, Vincent Labarthe (voir encadré).

Vincent Labarthe
Vincent Labarthe, vice-président Région Occitanie, délégation Agriculture et Enseignement agricole.

Vincent Labarthe, vice-président Région Occitanie : l’agriculture dès le collège

“Je le dis souvent : on a fabriqué beaucoup trop « d’aigriculteurs », et ce sont les agriculteurs les premiers qui disent à leurs enfants : surtout, ne vous installez pas ! Il faut d’abord que, véritablement, ceux qui sont dans le métier donnent et aient l’envie de porter une parole positive sur l’exercice de leurs professions !
Ensuite, sur l’enseignement, la Région a maintenant la compétence en orientation scolaire et nous déployons beaucoup d’efforts sur le sujet. D’ailleurs, sur cette question de l‘orientation des formations professionnelles, j’en appelle à la responsabilité de l’Éducation nationale qui priorise l’envoi vers ses filières d’enseignement et a trop tendance à oublier celles de l’enseignement agricole qui dépend en fait du ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire. C’est une aberration et je crois que les portes des collèges doivent aussi être ouvertes, et vice versa, aux jeunes pour leur montrer l’intérêt qu’ils auraient à embrasser les métiers de l’agriculture, qui offrent aussi un large panel de formations, comme celles de la transformation, de la gestion des milieux, de l’eau, etc.”

Anne Guillaume, chargée de communication à l’AgriCampus 66 de Théza.
Anne Guillaume, chargée de communication à l’AgriCampus 66 de Théza.

Un enjeu capital pour inverser, ou du moins équilibrer, la tendance actuelle où l’âge des apprenants est assez élevé. “Cette sensibilisation aux métiers de l’agriculture mériterait aussi une approche au niveau du collège !” témoigne avec regret Anne Guillaume, chargée de communication à l’AgriCampus 66. “Par manque d’information la profession est boudée par la jeunesse, on constate un recul chez les plus jeunes qui, du coup, ont peur de s’essayer à ce métier par crainte de la pénibilité et des conditions environnementales !” Mise à part l’accroche visuelle du jeu de la communication, l’attractivité des plus jeunes passe aussi par l’orientation des enseignements desservis.

Environnement et développement durable

Sébastien Meunier, directeur de l’AgriCampus 66 Théza.
Sébastien Meunier, directeur de l’AgriCampus 66 Théza.

Un fait beaucoup plus prononcé depuis la crise sanitaire que constate, Sébastien Meunier, directeur de l’AgriCampus 66. “Aujourd’hui nous avons des jeunes publics qui ne vont pas s’orienter dans un premier temps vers l’enseignement de l’agriculture, mais plutôt vers celui de l’environnement et du développement durable. C’est un mouvement de fond important qui est en train de se mettre en place et tous nos élèves sortis de 4e, 3e, filières générales, ont en eux cette sensibilité à l’environnement” expose avec discernement le directeur du campus. “Il faut que l’enseignement s’adapte, nous avions déjà pris des virages mais il va falloir encore aller plus vite et questionner les sujets et thèmes de formation en agriculture pour relever ces défis. Trouver un nouveau modèle agraire c’est un peu la difficulté d’aujourd’hui ! Après, je veux être très clair, je n’oppose pas conventionnel et bio, il faut des deux pour nourrir la planète !”

Au même titre que l’agriculture, l’AgriCampus 66 se questionne sur les orientations stratégiques qu’il doit prendre en terme d’évolution des formations et d’attractivités pour ses étudiants avec une pédagogie de projets. Des pistes sont en cours comme celle du projet “Vinipôle” à Rivesaltes avec, à proximité du lycée, un terrain de quatre hectares pour expérimenter la résistance de la vigne à la sècheresse et aux maladies. Projet de partenariat avec le campus signé le mois dernier entre la Chambre d’agriculture, la SAFER et le CIVR.

Denis Basserie, président du lycée AgriCampus 66
Denis Basserie, président du lycée AgriCampus 66, signe la convention de partenariat avec la Chambre d’agriculture des P.-O. lors de la session plénière Chambre agriculture.

Ou bien, plus avancé, celui de la reconquête des 10 hectares de terres agricoles en friches, de l’ancienne exploitation du lycée agricole de Théza. “Fermée depuis une vingtaine d’années, nous avons déjà procédé à la remise en culture de blé dur sur quatre hectares. C’est un projet avec une approche d’exploitation agricole qui doit répondre aux enjeux actuels de l’environnement et de l’agroforesterie.” détaille avec enthousiasme Sébastien Meunier. “Le tout avec une volonté de régénération des sols et d’approche biologique pour que, sur les deux prochaines années, nous puissions mettre à disposition des terres pour replanter et suivre cette dynamique territoriale !” Une expérimentation de tiers-nourricier qui recevra, sur trois ans, le concours d’un chef de projet, dépêché par l’État, pour accompagner et diagnostiquer la viabilité de ce nouveau modèle d’exploitation. 

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