Un robot pour désherber et plus si affinités [par Yann Kerveno]
Trouver de la main-d’œuvre pour désherber la vigne, à la pioche, dans les pentes du vignoble de Banyuls relève aujourd’hui de la gageure. Pour surmonter ce problème, le clos de Paulilles a investi dans un robot radioguidé…
“Franchement, je l’ai fait une fois, à la pioche, huit heures de rang, c’est un travail de romain” témoigne Lionel Lavail, directeur de la maison Cazes, qui a acquis le Clos de Paulilles en 2012. C’est pour ces raisons que l’entreprise, qui appartient au groupe languedocien Advini, a décidé d’investir dans un robot de travail du sol pour arracher l’herbe. Le domaine ayant basculé en bio, seul le travail mécanique y est autorisé puisque les herbicides sont bannis. “Nous sommes très contents des résultats que nous avons obtenus ce printemps” ajoute-t-il avant de reconnaître que l’année n’est pas non plus vraiment normale. La sécheresse a sensiblement limité la pousse de l’herbe, donc les travaux de désherbage. “Il faudra voir dans des conditions habituelles.” Savoir si le léger travail du sol, les griffes pénètrent peu dans le sol, la vitesse de travail, le temps passé, sont suffisants pour maintenir l’herbe hors des rangs.
Cher à l’achat
“Alors c’est vrai, c’est cher à l’achat ce type d’engin, on n’est pas loin du prix d’un tracteur, autour de 30 000 euros, mais il faut mettre en face le retour sur investissement. Si on ajoute la main-d’œuvre, cinq à six personnes pour un poste très coûteux qu’il fallait consacrer à cette tâche, et qu’on ne parvient plus à recruter, l’efficacité… La vitesse de travail est étonnante, c’est dix fois plus rapide que la main humaine… Pour nous, avec les surfaces que nous avons à désherber, c’est amorti sur un ou deux ans, au maximum” analyse-t-il.
De quoi donner des idées à d’autres vignerons du cru ? “Le prix d’achat peut-être rédhibitoire pour un petit domaine, alors nous discutons avec La Rectorie, Philippe Gars et d’autres pour plancher sur la création d’une coopérative d’utilisation de matériel agricole qui permettrait l’achat d’un second robot à utiliser collectivement…” Au-delà de l’agronomie et des bons résultats enregistrés pour cette première saison, ce que Lionel Lavail retient aussi, c’est l’amélioration des conditions de travail. “Dans une logique de responsabilité sociale des entreprises, c’est un facteur qui pèse aussi lourdement. Nos salariés sont formés à conduire un engin radioguidé, pas à manier une pioche. Ils veulent tous le faire. Nous vivons la même chose sur nos vignobles de Rivesaltes avec le tracteur électrique.”
Pulvé, GPS…
Si l’engin a fait ses preuves, les équipes techniques de la Maison Cazes planchent maintenant sur des adaptations pour aller au-delà du simple désherbage. Pour pouvoir l’utiliser, en adaptant un pulvérisateur, pour les traitements de la vigne par exemple. “Avant ce robot, nous avons regardé du côté des drones, mais ce n’est pas aussi facile à mettre en œuvre, c’est complexe à manœuvrer, il y a souvent du vent ici, la charge utile n’est pas très importante, ce n’est pas satisfaisant. C’est pourquoi nous réfléchissons pour adapter un de nos pulvérisateurs à cet engin, nos mécanos sont créatifs ! Alors, bien sûr, on n’embarquera pas 1 500 litres d’un coup, plutôt 150 ou 200 litres, mais ce sera toujours mieux que de porter un pulvé de 30 kg sur le dos dans des pentes de schistes à 50 %.”
Lionel Lavail estime qu’on peut aussi utiliser ce type de matériels pour d’autres usages, le doter d’un GPS, établir des relevés de vitesse, de rendements… S’appuyer sur la technique la plus moderne pour conforter le système de production bio dans le terroir de Banyuls.