Reconquesta : “Vendre du paysage en bouteille” [par Yann Kerveno]

Lancé en 2020 avec une médiatique campagne de crowdfunding, le projet Reconquesta cherche à se réinventer.

“On a pris un coup de poignard en perdant le cru, mais ce genre d’histoire, la violence, la traîtrise, les batailles d’ego c’est dans l’ADN de la Côte Vermeille” lance tout de go Alain Pottier qui ne fait pas mystère d’une rancœur certaine. L’histoire était en effet bien écrite autour de Reconquesta, un storytelling efficace pour tenter de sortir le cru Banyuls des difficultés qui sont les siennes et freiner l’érosion des surfaces. “Le nouveau président a réussi une martingale magnifique en montant les deux caves coopératives contre les Templiers, c’est de l’ordre de la transgression et de l’imposture pour nous faire disparaître alors que nous représentons 70 % du cru” ajoute-t-il. Alain Pottier le reconnaît, ne pas avoir les clés de l’ODG a fait trébucher le projet en le privant de son rouage opérationnel.

Que s’est-il passé depuis le lancement de Reconquesta et la campagne de crowdfunding qui avait permis de récolter 35 000 euros l’an dernier auprès de 250 donateurs (la campagne sur la plateforme Dartagnan a permis de collecter 25 000 euros, le reste est constitué de subventions directes) ? Auxquels s’ajoutent 5 000 euros de la deuxième saison de crowdfunding lancée en 2021 ? Rien de vraiment concret reconnaissent en le regrettant Alain Pottier et Christophe Czekaj, ancien directeur de l’ODG qui a quitté le cru il y a quelques mois par le biais d’une rupture conventionnelle “parce que le projet porté par la nouvelle équipe ne correspondait pas à mes valeurs.” Le projet le plus avancé, la mise en place de panneaux indicateurs n’a pas encore vu le jour.

SCIC

L’idée est donc aujourd’hui de reprendre la main, différemment avec une étude de faisabilité en cours, elle doit durer jusqu’en avril 2022. “Nous voulons créer une société coopérative d’intérêt collectif pour procéder à l’acquisition de vignes, 20 hectares d’abord, puis une trentaine, que nous vinifierons nous-même au Mas Ventoux puisqu’il y a de la place pour créer une gamme Reconquesta en quelque sorte. La coopérative pourrait aussi servir d’agence pour l’emploi, mais nous ne lancerons pas ce projet sans avoir un distributeur pour cela.” Au-delà de ces activités de production primaire, la SCIC porterait aussi une partie des projets envisagés par Reconquesta, la création de quatre vignes d’accueil, une bourse du foncier, de l’expérimentation foncière, le projet d’installer des viti-sculptures monumentales pour marquer l’entrée et la sortie du vignoble de Banyuls – Collioure, l’organisation d’événements…

Exporter Reconquesta

Dans leurs cartons, Alain Pottier et Christophe Czekaj ont aussi l’ambition d’exporter la méthode Be Reconquesta dans d’autres vignobles de la région, deux AOP du Languedoc seraient intéressées selon eux, et jusqu’à l’ensemble des vignobles de la région. “Avec ce travail, nous avons défini une méthode de reconquête qui peut être mise en œuvre par les ODG” explique Alain Pottier. “Nous voulons redonner confiance aux vignerons d’ici avec tous ces projets. Le participatif ouvre une autre dimension, avec 40 000 euros vous pouvez lever 300 000 euros de financement… Et ces financements mixtes peuvent nous permettre de ne pas avoir besoin de mettre les bouteilles à 60 euros.” Et dans une dernière pique à la nouvelle équipe à la tête de l’ODG, Alain Pottier ajoute : “nous, nous ne dépensons pas d’argent public pour faire des études qui ne servent à rien, comme l’ODG en a fait ces dernières années, avec aucun résultat derrière. Nous sommes un peu des fourmis face aux cigales…”

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