PAC : menaces sur le budget “coupe feu” [par Yann Kerveno]

La nouvelle PAC viendra-t-elle mettre à mal les dispositifs de protection contre les incendies ? C’est la crainte du milieu agricole alors que le plan national stratégique doit être finalisé dans les semaines qui viennent.

Avec le changement climatique, difficile de ne pas prendre encore plus aux sérieux les risques liés aux incendies de forêts et de maquis en zone méditerranéenne. Depuis une quarantaine d’années et les incendies dramatiques de 1976, de nombreux aménagements ont été réalisés pour, d’une part, limiter le risque, mais aussi faciliter le travail des pompiers ou encore ralentir la progression des flammes. Avec l’installation de réservoirs d’eau, le développement de moyens de pénétration dans le massif par des pistes carrossables, l’obligation de débroussailler et la création de “coupures de combustibles” plus communément appelées “coupe-feu”.
C’est en particulier là que l’agriculture joue un rôle majeur en participant à l’entretien de ces espaces. “Depuis les années quatre-vingt-dix, des aides étaient accessibles pour ces services, que ce soit l’utilisation des coupures comme aires de pacage et/ou par les girobroyages effectués par les éleveurs” explique Anne Rouquette de la Chambre d’agriculture 66. C’est à partir de 2015 que les problèmes ont commencé.

1 000 hectares

“Avec la nouvelle PAC, il est devenu assez difficile de faire reconnaître l’enjeu de défense contre les incendies dans les dispositifs d’aides alors prévus. Ce qui est problématique également pour certaines exploitations qui ont pu voir le jour justement avec ces dispositifs.” Au plus fort de cette prise en charge, une soixantaine de contrats étaient en vigueur, 1 000 hectares de coupures étaient entretenus par le pastoralisme, mais depuis 2015 la chute est sévère, à peine une vingtaine de contrats subsistent. Pourtant, cette histoire est plutôt vertueuse. La pression des incendies a un peu diminué, au moins dans leur ampleur et ces aides ont aussi permis de réimplanter des élevages dans des zones difficiles, les Aspres et les Albères en particulier, fortement soumises à la déprise agricole jusque dans les années quatre-vingt. Depuis la PAC 2015, les techniciens de la Chambre d’agriculture ont été contraints de faire preuve d’imagination pour maintenir les aides aux exploitations. Et ce sans pour autant que les montants accordés couvrent parfaitement les frais engagés.

Reconnaissance attendue

“Nous plaidons aujourd’hui pour que l’enjeu de défense contre les incendies soit reconnu à sa juste valeur et qu’il soit inscrit dans le plan national stratégique que la France doit rendre ces prochaines semaines à l’Europe” explique Carole Duperron de la Chambre d’agriculture. “Mais aussi que soient élaborées des mesures agroenvironnementales (MAE) spécifiques à cette thématique méditerranéenne.” La problématique n’est pas que locale, des travaux ont été menés avec la Catalogne du Sud, dont les massifs sont confrontés aux mêmes dangers, et toutes les régions riveraines de la Méditerranée y sont confrontées. “Nous avons travaillé justement avec nos voisins catalans, mais aussi la région Provence Alpes Côte d’Azur pour émettre des propositions cohérentes” précise Anne Rouquette. Histoire que quarante ans de travail ne soit pas réduits à néant en quelques années.

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