Lettre à Aymeric Caron, député qui veut interdire la chasse, la pêche et l’élevage [par J.-P. Pelras]

Monsieur,
n’ayant pas l’occasion de fréquenter “l’îlot à bobos” au sein duquel vous venez d’être élu député dans le 18e arrondissement lutécien, je me permets de vous adresser cette petite correspondance depuis les Pyrénées-Orientales et le journal L’Agri dont je suis rédacteur en chef, mais également depuis l’Aubrac et Le Bulletin d’Espalion auquel j’apporte ma modeste contribution. Recevez à ce titre, cher confrère journaliste, mes salutations plus protocolaires qu’amicales car nous avons, je crois, quelques divergences de goût et d’opinion.
Grand habitué des radios et autres plateaux télévisés où vous avez officié pour le groupe Canal+, chez Europe 1 et, entre autres cacophoniques joyeusetés, chez Ruquier, vous êtes également fondateur du mouvement antispéciste baptisé REV (Révolution écologique pour le vivant). Vous vous déclariez anarchiste, vous voilà parlementaire, promoteur du véganisme, favorable à l’interdiction de la chasse, de la pêche et de toute forme d’élevage. Le mouvement que vous représentez, et qui vient de rejoindre la NUPES, préconise même une dissolution du Sénat au profit d’une “Assemblée naturelle” dont le but serait de “représenter des animaux non humains, des végétaux, des fleuves et des mers…” Sur ce point, votre programme pourrait, effectivement, ne pas satisfaire Gérard Larcher. Tout comme il semble très peu convenir aux agriculteurs et à bon nombre de ruraux habitués à accommoder, depuis des temps immémoriaux, leur soupe avec un peu de lard, mais aussi à célébrer comme il se doit entrecôtes et gigots.

De grâce, monsieur Caron, fichez-nous la paix. Car si, j’en conviens, tout est bon dans le cochon sauf le cri, nous n’avons pas envie de finir nourris aux graines de chia, au tofu pané, au burger de riz et au jus de kiwi. Avez-vous, à ce titre, cher confrère, jamais goûté un bœuf bourguignon, un coq au vin, une tête de veau, une truite aux amandes, une blanquette, une daube, un fricandeau ?
J’ai en mémoire cet “hecto” de pâté fin que ma mère m’envoyait chercher chez l’épicier dans notre petit village roussillonnais et ce foie de génisse ou cette langue de bœuf achetée par ma tante Céline, du côté d’Aumont Aubrac, après la messe, sur le coup de midi. Repas dominical accompagné de flageolets servis dans un plat arcopal posé à côté de la saucière, du litre de rouge tiré au tonneau, du plateau de fromage que les anciens découpaient sur l’aire d’un pouce avant de manger le dessert sur l’assiette retournée, de s’essuyer les moustaches et de replier le couteau.

Parce que, vous n’avez peut-être jamais connu le quotidien d’une ferme, la convivialité des jardins, l’ombre rassurante des vergers, le sentier séculaire des frênes émondés, l’alcali des étables, l’odeur des foins coupés, cette giboulée de traditions et de saveurs qui riment avec bonheur et authenticité, probablement frustré vous vous êtes senti obligé d’inventer un “REV parti”, un machin sans appétit, imaginé pour satisfaire un certain entre-soi du côté de Paris. Un truc médiatique susceptible d’évoluer vers une curiosité politique qui coûte tout de même, à la louche, 13 000 euros par mois au contribuable français.

Si d’aventure, revenu de vos idéaux verdoyants, vous souhaitez croiser quelques mousquetaires de la casserole, je dispose d’une bordée d’adresses où l’on vous servira cuisses de grenouilles et escargots grillés, accompagnés d’une solide tartine d’aïoli et d’une bonne tranche de ventrèche, sans qui le gastéropode finirait par s’ennuyer dans les volutes de l’été.
Je vous ferais visiter un de ces “lieux” où l’on déplume, où l’on dépiaute, où l’on émince, où l’on farcit, où l’on déglace, où l’on assaisonne, où l’on dégorge, où l’on réduit et où on laisse mijoter pour le plus grand plaisir des gourmets.
Parce que, voyez-vous cher confrère député, journaliste, écrivain… il faut aussi, dans la vie, se soucier du bonheur des humains.
Allez, détendez-vous Monsieur Caron. Détendez-vous. Vous verrez, tout se passera bien !

3 réflexions sur “Lettre à Aymeric Caron, député qui veut interdire la chasse, la pêche et l’élevage [par J.-P. Pelras]

  • 14 juillet 2022 à 8 h 31 min
    Permalien

    Bonjour! je suis entièrement en accord avec vous. J’ai tout de même un doute…Mais comprendra t il votre argumentation? Pourquoi cette question? Parce que, chez ces gens là, l’humanité démarre avec eux! Avant? rien! Le nombrilisme est de rigueur

    Répondre
  • 18 juillet 2022 à 16 h 32 min
    Permalien

    Bonjour Mr PELRAS .
    J’ai aimé votre lettre envoyé ce Mr Caron député. Vous m’avez fait rêver le temps de la lecture
    Et vous remercie.Mes Amitiés

    Répondre
  • 29 juillet 2022 à 22 h 12 min
    Permalien

    Déjà contestataire, désagréable au possible chez Ruquier , il est le prototype du bobo parisien qui est dans son monde et ne connaît rien de la vie des campagnes . Il fait pitié.

    Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *