Guy Jaubert : la réforme de la HVE signe un coup d’arrêt [par Yann Kerveno]
Les Vignerons indépendants des Pyrénées-Orientales tenaient leur assemblée générale le 25 janvier. Tour d’horizon de l’actualité avec Guy Jaubert, président.
Quel bilan tirez-vous de l’année 2022 ?
Il y a eu deux faits majeurs au cours des douze derniers mois. Le premier, c’est l’autonomie que nous avons gagnée en “quittant” la Maison des vignerons. Pas physiquement, mais statutairement, nous sommes aujourd’hui complètement autonomes d’Union Roussillon, qui a plutôt vocation à rassembler les organismes de gestion de nos appellations, et avons notre propre directeur, Julien Puyuelo. C’est une décision qui était dans les tuyaux depuis longtemps, et le départ de Serge Guillet a été l’occasion de franchir le pas. Comme l’avait fait la coopération d’ailleurs il y a une dizaine d’années.
Et le second ?
C’est bien sûr le premier de nos salons des vignerons indépendants qui s’est tenu à l’automne et a été un franc succès. Tant du côté des vignerons, ils étaient soixante à présenter leurs vins, que du côté du public, 2 000 personnes sur le week-end, et pas des gens venus faire un tour et “boire l’apéro”, non, un public amateur et désireux de déguster, d’en savoir plus… Ce projet avait été ajourné à cause de la Covid, mais nous travaillons maintenant à la prochaine édition, à l’automne cette année, aux mêmes dates et au même endroit qu’en 2022.
L’année a, par ailleurs, été complexe dans les vignes…
Oui, nous subissons de petites récoltes depuis dix ans maintenant, sous les trente hectolitres hectare, et il y a certainement plus de 15 ans que nous n’avons plus dépassé les 40 hectolitres, sans savoir si on le reverra un jour. À cela il faut ajouter ce dont nous parlons depuis des mois, l’inflation et les pénuries de matières sèches que nous subissons sans pouvoir les répercuter totalement sur nos prix de vente. Ce sont des dossiers qui sont portés par les Vignerons Indépendants de France, emmenés par Jean-Marie Fabre, qui est aujourd’hui un collectif puissant et entendu. Et nous partageons, naturellement, toutes ces propositions au niveau local.
Et le marché ?
La situation est très tendue sur le vrac et pour les ventes directes, dans le contexte que nous connaissons, ce n’est pas mal. Structurellement, on se rend compte que les ventes directes et l’export sont notre seul salut puisque la consommation recule en France et en Europe alors qu’elle se développe ailleurs, l’équation est simple. Il faut que nous soyons accompagnés pour cela. Plus de deux tiers des entreprises de ce département font aujourd’hui de la vente directe, vignerons indépendants ou coopératives, et plus des deux tiers également sont présents à l’export. Dans ce contexte et face aux enjeux économiques, le CIVR ne répond pas correctement à l’attente de nos entreprises aujourd’hui…
Pourquoi ?
Parce que le manque de représentativité de cette instance ne reflète pas la réalité de la mise en marché de la production de notre département et qu’elle ne met pas en œuvre la politique ambitieuse dont nos entreprises ont besoin, à savoir le développement de la notoriété, le soutien à la vente directe et le développement de l’export, qui ne sont pas des actions considérées comme prioritaires aujourd’hui.
La réforme de la HVE dont les vignerons indépendants sont d’ardents défenseurs ?
Le durcissement du cahier des charges et du référentiel va exclure un nombre important d’agriculteurs et de viticulteurs de la démarche. On se demande si les attentes des vignerons ont été défendues devant le Conseil national des certifications environnementales, puisque Coop de France a voté pour, la FNSEA et l’APCA se sont abstenues. Il aurait fallu voter contre. L’an dernier, ce nombre d’exploitations certifiées avait progressé de 24 %. Cela va casser cette dynamique alors que HVE est un élément permettant de nous différencier de nos concurrents espagnols et italiens, et que la grande distribution s’en est emparée…