Dieu ! [par Jean-Paul Pelras]
La guerre, les présidentielles… La guerre, la guerre, les présidentielles… La guerre, la guerre, la guerre, les présidentielles… La guerre, la guerre, la guerre, la guerre, les présidentielles… Plus nous nous rapprochons du 10 avril, plus nous nous en éloignons. La faute à Poutine et à ses bombardements de plus en plus meurtriers. La faute à l’inquiétude que suscite cette situation et les lendemains qu’elle pourrait nous réserver. La faute au calendrier qui ne pouvait prévoir un tel télescopage dans l’actualité. La faute à Macron qui, malgré l’importance de ce suffrage pour notre pays, a décidé de maintenir sa présidence européenne et, de facto, de devenir celui qui allait “discuter”. Et ce, même s’il semble s’être un peu fait larguer dans le concert des Nations à la (très longue) table des négociations.
Donc, plus de campagne ou presque, aspirée par les obligations du premier d’entre nous qu’il faut accepter, comprendre et surtout ne pas critiquer. Nous sommes ainsi passés du président qui voulait emmerder une partie des Français à celui qui fait ce qu’il peut pour les sauver. Guest star inabordable, il se permet même d’organiser des meetings sans y participer, comme Mélenchon avec son hologramme, mais sans hologramme et deux ministres pour le représenter. Comme quoi, la politique politicienne ne s’embarrasse d’aucun scrupule quand elle veut tout bousculer. Des meetings où les participants ont de toute évidence su composer avec cette absence, comme le relate un reportage de France Info qui tendit son micro à quelques bigotes et autres dévots : “On vient seulement apporter des bonnes ondes pour qu’il puisse s’en sortir”. “Ce côté d’avoir besoin de voir les gens de visu, de les toucher, c’est quand même un petit peu dépassé”. “Les gens qui vont à l’église, ils ne voient pas Jésus, hein ! Mais ils y vont !”.
Déo gracias, la communion est à ce point prégnante et émouvante que l’on peut envisager une évolution vers le télévangélisme ou une déclinaison à la Don Camillo, le talent en moins bien entendu. Car, pour celui qui tutoie le Pape comme nous tutoyons le cafetier ou le boulanger, accéder à l’étape suivante, celle de la déification, relève de la simple formalité.
Et pendant ce temps, il envoie Jean, son plus fidèle apôtre…
Signes avant-coureurs de cette divine prophétie, celui qui n’est encore que Jupiter décline toute invitation télévisée en présence de ses compétiteurs. Le pur et les impurs en quelque sorte avec, de surcroît lorsque le débat (sans débat) à distance peut avoir lieu, seulement huit candidats sur douze sélectionnés. Lassalle, Arthaud, Dupont Aignan et Poutou, probablement considérés comme persona non grata par le CSA (et la démocratie) étant tout simplement ostracisés.
Dans la foulée et entre deux coups de fil à Vladimir, “Il” organise à Versailles le sommet des chefs d’États européens. Rencontre qui pouvait se tenir à Bruxelles mais, à l’heure où l’on demande aux Français de moins se chauffer, la capitale belge était peut-être considérée comme beaucoup moins “éclairée”. Éclairée comme la Cène autour de laquelle les convives se sont pressés sous les lustres à facettes d’une monarchie soi-disant dépassée. Ce qui fit dire à Dominique de Villepin, invité dimanche soir chez Delahousse : “Dans ces circonstances là, on fait sobre…” (Voir “Lettre à” ci-dessous).
Pendant ce temps et alors que le peuple murmure “À la lanterne”, “Il” envoie Jean, son plus fidèle apôtre distribuer ses poissons d’avril avec 15 centimes de rabais sur le prix d’un combustible qui rapporte désormais (et pourrait lui rapporter beaucoup plus dans les semaines à venir) à minima un euro par litre à l’État.
Une manne inédite dans l’histoire des religions, plus fructueuse encore que la multiplication du pain et du vin lors des Noces de Cana. Reste à savoir ce que nous réserve ce Chemin de croix du dimanche des Rameaux 10 avril, jour du premier tour, jonché de lauriers à cette ascension vers le plébiscite ou vers le Golgotha.