Bon, et bien voilà, bonne année ! [par Jacqueline Amiel Donat]

Calendrier oblige, depuis le 31 décembre et jusqu’à la fin du mois de janvier pour les retardataires, c’est la saison des vœux. Cette année, et depuis l’année dernière, la carte de vœux confiée au facteur connaît un regain de popularité. Confinement, éloignement, du temps devant soi ou simplement la prise de conscience de la nécessité d’un lien plus “charnel” que l’écriture confère, on quantifie à 20 % l’augmentation des cartes de vœux vendues depuis deux ans. Pour les plus prévoyants, la carte peut même être personnalisée, ce qui est proposé par certains sites en ligne avec des équipes de graphistes mis à disposition, outre, bien évidemment, les cartes de vœux ciblées par professions. Là encore, on trouve “la” carte française avec son label “fabriqué en France”, gage de patriotisme économique et de tradition. Une tradition pas si ancienne que ça d’ailleurs, qui trouve son origine en Grande Bretagne au milieu du 19e siècle, peu après l’avènement du timbre-poste. Les “Christmas cards” qui devaient se répandre en Europe et que les Français adoptaient en lieu et place des visites et des étrennes du Nouvel an. “Bonne année, bonne santé, met la main sur le porte-monnaie !” s’écriaient nos grands-parents lorsqu’ils étaient enfants, lors de ces visites à la famille et aux amis.

La “modernité” s’imposant, certains sont passés aux vœux téléphoniques, voire par télégramme, et les étrennes sont passées dans l’oubli. Mais c’est surtout avec la téléphonie mobile que ces vœux connaissaient leur plus grande métamorphose : depuis le premier sms envoyé par un ingénieur anglais à un collègue le 3 décembre 1992, la pratique du texto/sms se démocratisait pour la Saint Sylvestre. Le record était atteint en 2012 avec plus d’un milliard de texto/sms du 31 décembre au 1er janvier. Agrémentés depuis lors par des MMS (photos ou vidéos), des GIFs animés ou pas, des Emoticônes, Emojis ou Smileys, concurrencés un temps par les PPS (diaporamas envoyés par mail), les sms restent le support le plus fréquent encore de ces vœux de fin d’année.
Bien qu’au niveau national, les personnalités lui préfèrent dorénavant les réseaux sociaux, le texto/sms reste l’outil de communication privilégié des politiques de tous bords, notamment en raison de la faculté d’envois groupés à partir de fichiers. C’est ainsi d’ailleurs que j’ai pu recevoir, ce 1er janvier, un sms “groupé” d’un politique local -ancien camarade-, nous souhaitant “Une merveilleuse année 2020 !”, son assistant.e étant resté.e en apnée depuis deux ans ou ayant oublié d’actualiser…

Que souhaiter pour 2022 ?

Alors reste la question du contenu. Quels vœux émettre pour cette nouvelle année où rien ne semble devoir changer si ce n’est en pire ? D’ores et déjà, il apparaitrait que c’est la santé qui figurerait au premier plan des souhaits présentés. Angoissés, agacés ou accablés par ce virus malin et entêté, ayant perdu le compte du nombre de vagues mais assommés de chiffres quotidiens, protagonistes ou simples témoins de ces ruées sur les centres de test dès 8 h du matin ce lundi, après avoir vu ces longues files d’attente devant les pharmacies les veilles de fêtes, nos esprits se sont racornis sur ce souhait essentiel : qu’on en finisse avec ça ! De la médiatique communication de Lionel Messi et des joueurs du PSG sur “la fin de ce virus de merde”, aux souhaits les plus discrets de nos proches, c’est cette pandémie qui est au cœur de ces vœux 2022. Certains tentent d’y résister et, au risque de s’auto-plagier, reprennent leurs vœux pour 2020 car comment faire preuve d’imagination dans un tel contexte ? Et comment prendre le risque d’adresser des vœux portant sur autre chose que la santé quand le destinataire vient peut-être d’être testé positif (et ils sont nombreux en ce moment) voire d’être hospitalisé ? Ou alors, il faut rester dans les généralités et on peut observer à cet égard, le développement des sites internet proposant des formules type de vœux, traditionnels ou originaux, adaptés à la situation de l’interlocuteur : famille avec enfants scolarisés ou pas, étudiant en fin de cursus, proche qu’on avait oublié… Les formules payantes peuvent être un peu plus élaborées afin de dissimuler l’aridité de nos esprits et donner l’illusion que nos têtes ne sont pas complètement vidées par ce quotidien…

Bon, voilà, que souhaiter aux lecteurs de L’Agri, et aux autres – qui ne sont ni des cons ni des monstres (* tweet de R. Enthoven), bien qu’ils aient tort de toute évidence ? De s’accrocher, malgré les turbulences de cette année électorale. De rester debout et de continuer à exister par eux-mêmes. De rêver encore et toujours à un monde meilleur, et d’y croire. D’aller mieux, tout simplement. Alors, certains diront que les vœux, c’est éculé, voire ringard. Je reprendrais alors à mon compte ce message adressé par un ami à l’une de mes filles : “C’est vrai, c’est éculé. Mais c’est comme un vieux jean, c’est en sale état, c’est déchiré de partout, aucune originalité car tout le monde en a, mais on se sent tellement bien avec. Très belle année !”

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