Au régime déjà sec !

Le préfet fera avancer le dossier de la retenue collinaire des Aspres. Mais en attendant, toutes les économies seront importantes a-t-il rappelé lors du comité de gestion eau tenu mardi 30 janvier.

Il n’y a plus guère d’illusion à se faire sur les difficultés que le département va rencontrer cette année à cause de la sécheresse. Il n’y a pas de neige. Les sols sont aussi secs qu’un coup de trique derrière la tête. Il n’y a pas de réserves dans les barrages. La préfecture a convoqué, pour la première fois en présence de la presse, l’ensemble des acteurs du dossier pour un comité de gestion de l’eau des Pyrénées-Orientales. Chaque partie prenante fut invitée à expliquer les actions mises en place depuis l’an dernier pour faire des économies et faire état des projets 2024. Les actions de l’an passé ont porté leurs fruits. Elles ont abouti à des économies très sensibles, 30 % de consommation d’eau en moins au cours de la période estivale, les arboriculteurs et les maraîchers ont pu travailler, même si les conditions étaient dégradées, le secteur du tourisme aussi.

Et pour 2024 ? Chacun était ensuite prié de faire état de ses projets en matière d’économies d’eau. Le syndicat des hôteliers avançait ainsi la réalisation d’un achat groupé de seaux à glace isothermes qui permettront l’économie d’un million de litres d’eau par semaine, eau jusqu’ici transformée en glaçons, mais aussi le développement de plusieurs types de douches pour inciter les convives à la modération. Brice Sannac, président du syndicat, regrettait toutefois que la réglementation n’évolue pas plus vite, en particulier pour permettre la réutilisation des eaux grises. L’industrie de l’hôtellerie de plein air précisait que 540 000 m3 d’eau avaient été économisés sur les forages des campings l’an passé grâce aux initiatives prises et que la consommation totale d’eau avait reculé de 17 % pour ce secteur en particulier. Arboriculteur, David Massot rappelait qu’il fallait impérativement laisser couler l’eau dans les canaux pour ne pas aggraver le problème en asséchant les campagnes.

Pour 2024, le préfet a ensuite proposé une série d’actions destinées à compléter celles déjà déployées en 2023. Yohan Marcon, secrétaire général de la préfecture, en a donné le détail : créer un « observatoire de l’eau » pour centraliser les données et mieux comprendre les consommations, définir un protocole de recharge des nappes, adapter le règlement des barrages, déployer plus de réutilisation, faire avancer, avant la fin de l’année, le projet de retenue collinaire des Aspres, dans les tuyaux depuis quinze ans et dont la préfecture s’est engagée à autoriser la construction, faciliter les projets de petites retenues de moins de 60 000 m3 uniquement soumises à déclaration, déployer la protection des piscines individuelles pour limiter l’évaporation, poursuivre le chantier d’amélioration de l’efficacité des réseaux, la fin de la démarche de régulation des forages agricoles, le développement du maillage des canaux, en particulier dans le secteur de l’Agly.

Il fut aussi question, de nouveau, d’amener l’eau du Rhône dans les Pyrénées-Orientales, de construire un aqueduc depuis le barrage de Vinça pour remplir la retenue de Villeneuve-la-Raho (vieux projet de Nicolas Garcia), de la réutilisation des eaux de station d’épuration, en particulier celui de remonter l’eau de la station de Perpignan vers Ille-sur-Têt (idée de Robert Vila)… De quoi conclure, avec Thierry Bonnier, que si l’on n’a pas d’eau, les idées, elles, ne manquent pas.

Yann Kerveno

Des données chaque fois plus affolantes

À Perpignan, il est tombé 245 mm en 2023 contre une moyenne de 578 mm. Ces derniers mois, le déficit est encore plus prononcé par rapport à la moyenne 1991-2020, – 57 % en décembre dernier, – 64 % en novembre, – 66 % en octobre, – 39 % en septembre. Et en janvier… Sur les trois premières semaines, le déficit est de 73 % en moyenne sur le département, atteint 80 % à Ille-sur-Têt ou à Céret, 70 % à Canet, 60 à Eus, 40 % à Railleu. Et les sols sont vides d’humidité. Le déficit de l’indice d’humidité des sols superficiel atteint 90 % sur l’axe Prades – Céret et la situation est encore plus dégradée à l’est de cette ligne.

Les inspecteurs dévoilent quelques pistes

Arrivés dans les Pyrénées-Orientales depuis cet automne, les trois inspecteurs généraux de la mission interministérielle déclenchée l’an dernier sont à pied d’œuvre. S’ils n’ont pas encore fait le tour de tous les acteurs du dossier eau, ils ont délivré quelques éléments de leur réflexion lors de la réunion du 30 janvier. C’est Philippe Ledenvic, président de la mission, qui a procédé à la synthèse.
Première idée avancée, déterminer les marges de manœuvre pour retenir l’eau qui coule dans les rivières pour la stocker dans les nappes, là où cela fonctionne. Deuxième idée, réclamée par le monde agricole, faire évoluer le mode de gestion des barrages. Troisième idée, renforcer le rôle des zones humides et la quatrième, adapter les canaux au changement climatique. « Mais pour 2024, la seule option, c’est bien la réduction de la consommation » prévenait-il toutefois. La mission rendra ses conclusions dans quelques semaines.

Y.K.

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