Vendre ou donner ? [par La chronique de Lilane Doger-Ledieu]
“Vous ne le portez plus, vendez-le !” Chacun a entendu au moins une fois cette publicité de Vinted, la plateforme où l’on peut acheter et vendre des vêtements de seconde main.
Mais c’est pas bête ça ! Je passe rapidement en revue le contenu de mon armoire. Tiens, cette veste, je n’aurai plus l’occasion de la porter, beaucoup trop habillée. Et ces chaussures à talons… Allez hop, je me lance. J’envoie photos et descriptions détaillées, assorties d’un prix plus que raisonnable. Bien qu’il s’agisse d’articles quasi neufs, je me dis qu’en ces temps compliqués, si ça peut dépanner quelqu’un… Presqu’aussitôt je reçoie trois messages : “Untel a marqué ton article comme favori.” (Oui, on vous tutoie, c’est une grande famille, on est tous frères). Et là, tu te dis chouette, c’est drôlement rapide ! Puis plus rien. Le lendemain, nouveau message : “Bidule t’a fait une proposition”. En fait, il s’agit d’une demande de rabais. Bon, de toutes façons, je n’en ferai rien de cette veste. J’accepte. Message suivant : “Tu as accepté, merci de patienter pour le paiement.” Puis, de nouveau, plus rien.
Ma foi, en attendant et tant que j’y suis, je vais me chercher une doudoune (c’était en novembre). Bien chaude et avec une capuche, mes exigences s’arrêtent là. Sacré choix ! Je ne suis pas déçue ! Je jette mon dévolu sur une parka gris perle décrite comme “Neuve, jamais portée. Vendue 25 €, achetée 85 €”. Sur la photo, la capuche est posée à côté de la doudoune. Youpi ! Je vérifie la taille, je saisis mon numéro de carte et basta. “Achat réussi, maintenant attends que le vendeur envoie le colis”. Ok. Le colis arrive dans les temps impartis comme prévu au relais. C’est marrant, à l’ouverture du carton tu es impatiente, comme si tu recevais un cadeau. Déconfiture. Je comprends mieux la photo. La fermeture éclair qui doit fixer la capuche est cassée. Et là, rien à faire. J’ai beau cocher la case “j’ai un problème”, rien ne se passe. Personne ne répond, impossible de préciser quel problème. J’envoie un mail. “Votre demande est bien enregistrée. Nous faisons le maximum pour vous répondre dans les plus brefs délais.” Sauf que le règlement (que j’ai forcément accepté) stipule que sans problème signalé dans les 48 heures, la vente est validée et le vendeur en reçoit le montant. Je contacte la vendeuse qui me jure ses grands dieux qu’elle n’avait pas vu. Fin de l’achat.
“Si tu ne le portes pas, donne-le”
Pendant ce temps, plus de nouvelles des potentiels acheteurs de “l’article favori”. Fin de la vente. Ça m’apprendra. Je vais faire ce que j’ai toujours fait jusqu’ici : porter ce qui ne me convient plus chez Emmaüs ou le donner sur Leboncoin. Ça fait tellement plaisir ce jeune couple qui vient chercher le clic-clac ! Et cette éducatrice d’un refuge canin qui emporte la cage de transport de Anis, ma tounette partie l’été dernier, contre six œufs de ses poules ! Quel bonheur !
Ce qui m’a insufflé cette chronique (du vécu, comme toujours), c’est l’appel de Valérie Fayard, directrice générale déléguée d’Emmaüs France, inspiré de la publicité de Vinted : “Si tu ne le portes pas, donne-le”. Parce que depuis l’existence de ces fameuses plateformes de vente, les dons ont considérablement diminué et sont de moins bonne qualité. Après avoir fait le tri, 40 % seulement des objets collectés peuvent être mis à la vente contre 60 % il y a quelques années. Le reste va à la déchetterie.