Trufficulteurs des P.-O. : vers un label “Truffe noire du Canigó” ? [par Thierry Masdéu]

Tuber aestivum, uncinatum, melanosporum, ou encore mesentericum… Je ne vous convie pas à un cours de latin, mais plutôt à un avant goût de ces mets qui, au fil des années et des sècheresses répétitives, se raréfient dans les truffières Nord catalanes.

Aux portes d’une entame de saison que les amateurs et professionnels craignent catastrophique, nous avons rencontré Jean-Pierre Quintana, le tout nouveau président du syndicat des Trufficulteurs Catalans. Élu le 16 septembre dernier, ce représentant d’une quarantaine d’adhérents, qui succède à Jean Puiségur, souhaite redynamiser la filière. La rendre plus attractive à la fois pour les anciens, mais également pour les futurs adeptes des cavées ou cultures de ces précieux champignons : les truffes. Récoltées en Vallespir, Conflent, Fenouillèdes, en partie sur les Aspres et en limite des Corbières, les productions de cette fin d’année ne s’annoncent guère prolifiques, à moins que les pluies et le froid ne s’invitent sur les prochains jours. Même si, depuis deux ans, la moyenne de production annuelle des 20 kg est loin d’égaler celle d’il y a une vingtaine d’années, où la récolte avoisinait les 300 kg, la qualité des truffes vendues sur les sept marchés qu’organise le syndicat reste exceptionnelle (voir calendrier ci-dessous).

Calendrier des 7 marchés de saison de la truffe

• Céret : le dimanche 17 décembre 2023.
• Collioure : le dimanche 24 décembre 2023. 
• Argelès (village) : le dimanche 31 décembre 2023
• Calce : le dimanche 14 janvier 2024.
• Céret : le samedi 20 janvier 2024.
• Saint-Jean-Pla-de-Corts (Fête de la truffe) : le dimanche 4 février 2024.
• Castelnou : le dimanche 11 février 2024.

 

Speed, le chien de Jean-Pierre Quintana dressé pour débusquer les truffes, en pleine action
sur son exploitation truffière à Céret.

“La demande est toujours bien présente, la sécheresse de l’année dernière n’a permis qu’une récolte de 8 kg et le prix de 1 300 € le kg sera certainement le même pour cette année !” témoigne le président, trufficulteur sur la zone de Céret, qui invite les agriculteurs à se lancer dans l’aventure de cette culture. “Je pense qu’elle peut devenir un revenu complémentaire pour ceux qui disposent de terrains en lisière de forêts ou en jachère. Et qui pourraient être mis en condition afin qu’ils soient de très bons porteurs de truffes ! D’ailleurs, avec l’aide de l’animatrice de la Chambre d’agriculture des P.-O., Christelle Alengry, nous sommes à même de conseiller sur la qualité des terrains et leur protection contre les animaux sauvages et ceux à deux pattes (grimaces…) que nous dénommons les pirates de truffes !”

“Une truffe labellisée se vend mieux”

Une production dont le graal reste incontestablement la “tuber melanosporum”, une truffe noire pour laquelle le syndicat compte bien obtenir sa labélisation sous l’appellation “Truffe noire du Canigó”. “C’est un travail de longue haleine qui avait déjà été engagé par mon prédécesseur et dont nous allons continuer la tâche pour faire reconnaître les critères qualitatifs de cette truffe !” Une certification pour ce “diamant noir” que le syndicat espère obtenir d’ici deux ans pour faire face notamment à la concurrence des producteurs de Teruel, Huesca et Saragosse, provinces de la communauté autonome d’Aragon. “Cela représentera un gage supplémentaire de qualité pour sécuriser à la fois le consommateur mais aussi le prix sur le marché. Pour un producteur, une truffe labélisée se vend mieux !”

Truffe de surface

La saison qui va démarrer d’ici fin novembre et s’étaler jusqu’au 15 mars permettra-t-elle d’honorer l’ensemble des marchés programmés ? Qu’elle soit noire ou blanche, la truffe sera-t-elle belle et bien au rendez-vous ? Ces interrogations hantent, chaque année, ces trufficulteurs qui ont dû, la saison dernière, annuler trois dates par manque de produits. Si l’incertitude est encore de mise, une lueur d’espoir émane tout de même du Haut-Vallespir. En effet, un trufficulteur qui, vous le comprendrez, souhaite garder l’anonymat, a déjà repéré sur sa truffière une très belle truffe de surface (voir photo). Perle qu’il a soigneusement recouverte de feuillages afin qu’elle murisse pleinement. Il semblerait donc probable que la saison qui s’annonce ne soit pas, selon les secteurs, si catastrophique que ça…

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