Tribune : Faire un exemple ou comment l’État traite les éleveurs (par Claire Juillet)
Claire Juillet est agricultrice en Saône et Loire, à l’Earl du Paquier (élevage bovins allaitants, porcs plein air, maraîchage, agriculture biologique). Elle adresse ici un message aux administrations et aux pouvoirs publics qui s’acharnent sur ceux qui travaillent pour nourrir les populations. Un constat de plus en plus dénoncé par celles et ceux qui sont confrontés à des situations tout autant ubuesques que dramatiques.
Nous sommes début mars, en Corrèze. Daniel*, éleveur de bovins et de chevaux, inquiet des sécheresses à répétition, souhaite aménager un captage dans une de ses parcelles pour que ses animaux puissent s’abreuver correctement pendant l’été. Soucieux de faire les choses dans le respect de la loi, il sollicite les conseils de l’administration concernée.
Acte 1 :
Rendez-vous est pris sur place le lundi 22 mars à 9 h 30 avec les fonctionnaires. Précisons qu’il s’agit, pour certains, d’officiers de police judiciaire et qu’ils sont armés dans le cadre de leurs missions. Alors que deux des intervenants considèrent que l’opération est tout à fait envisageable,
l’un des inspecteurs– appelons le “Agent X” – s’y oppose sans entendre les arguments contraires de son collègue. Ni, évidemment, ceux de Daniel. L’agent X, tout auréolé de son statut de justicier de l’environnement, ne veut rien savoir. Daniel perd patience, hausse le ton et lui demande de quitter les lieux. L’échange continue sans problème avec les deux autres agents, puis chacun rentre chez soi.
Violences psychologiques
Acte 2 :
Le mardi en fin de journée, Daniel reçoit un appel de la gendarmerie lui demandant de se présenter à la brigade la plus proche le lendemain matin, dès la première heure. L’adjudant lui précise que s’il ne se rend pas à cette convocation, ils viendront le chercher. Daniel obtempère.
Le mercredi 25 mars à 9 h 25, l’adjudant de gendarmerie qui le reçoit lui signifie sa mise en garde en vue car l’agent X a déposé plainte contre lui ; d’abord pour outrage, mais aussi pour violences psychologiques (?) ayant entraîné une ITT de 2 jours (puis de 15 jours). Il y restera 15 heures durant et ne sera remis en liberté qu’aux alentours d’une heure du matin, le jeudi, pour être renvoyé devant le tribunal correctionnel de Tulle le 8 juin suivant.
En des temps où l’opinion se plaint souvent (et parfois à bon droit) d’un laxisme généralisé des services de police et de justice, on serait tenté de saluer l’extraordinaire fermeté et la célérité de l’institution judiciaire en Corrèze. Mais que reproche-t-elle au juste à Daniel ?
A-t-il insulté gravement l’agent X ? L’a-t-il menacé ? L’a-t-il frappé ou même bousculé ?
Rien de tout cela. Selon les enquêteurs et les instructions du substitut du Procureur de Tulle, Daniel a porté atteinte à la dignité ou au respect dû à la fonction de l’agent X en ce qu’il a employé à son encontre les termes suivants : pion, cow-boy, expert de rien, fonctionnaire en mal de reconnaissance. Les violences psychologiques, si traumatisantes qu’elles ont entraîné un arrêt de travail immédiat de l’agent X, se sont manifestées par une pression verbale et un rapprochement physique soudain.
Il est vrai que Daniel est un grand gars solide, qu’il a une grosse voix et que d’aucuns peuvent se sentir blessés lorsqu’on remet en cause leurs compétences, en des termes imagés, devant leurs collègues. On sait que les blessures d’amour propre sont difficiles à guérir, sans toutefois être mortelles. Il n’empêche que les deux agents étaient armés et pas lui. Cela semble limiter un peu l’impact du fameux rapprochement physique soudain.
Élite autoproclamée
On en rirait, si les sanctions encourues n’étaient pas si lourdes : pour la première infraction 15 000 € d’amende et pour la deuxième 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende.
Est-ce que tout le monde a perdu la tête ?
Le substitut du Procureur qui ordonne la mise en garde à vue de Daniel sur des fondements aussi minces et d’ailleurs contredits par les autres témoins.
Rappelons ici que la garde à vue doit être l’unique moyen de parvenir à au moins l’un des objectifs suivants :
– poursuivre une enquête impliquant la présence de la personne concernée ;
– garantir la présentation de la personne devant la justice ;
– empêcher la destruction d’indices ;
– empêcher une concertation avec des complices ;
– empêcher toute pression sur les témoins ou les victimes ;
– faire cesser l’infraction en cours.
On voit difficilement comment Daniel, initiateur de ce funeste rendez-vous, aurait soudain organisé sa disparition en pleine période de vêlage, quels indices il aurait détruits ou quelle pression il aurait opérée sur sa prétendue “victime”.
Acte 3 :
Tribunal correctionnel de Tulle : au terme de l’audience, Daniel est relaxé.
À ce stade, on est tenté de penser : Beaucoup de bruit pour rien ! Daniel a été malmené. Sa famille et ses jeunes enfants ont été bouleversés. Personne n’a beaucoup dormi. Mais la vie va pouvoir reprendre son cours.
Et bien pas du tout. Le Parquet fait appel de la décision.
Parce qu’il faut FAIRE UN EXEMPLE.
Parce que les agriculteurs du département voisin ont tout de même réalisé le lac de Caussade pour sécuriser l’approvisionnement en eau de leurs cultures et que les oiseaux sont revenus nicher sur les berges, au grand dam des environnementalistes de salon.
Parce que le ministère de l’Écologie ne supporte les paysans que lorsqu’ils sont porteurs de la même idéologie punitive et rétrograde que la sienne.
Parce que ces derniers des mohicans qui s’obstinent à nourrir les gens sont si peu nombreux maintenant, si peu défendus, si peu considérés qu’on peut sans risque les humilier encore plus pour donner à réfléchir aux réfractaires.
À l’heure où les électeurs désertent massivement les urnes, est-il bien nécessaire que l’État dépense tant d’énergie et de moyens à écraser des moucherons avec une masse ?
Les moyens supplémentaires obtenus par Monsieur Dupont Moretti pour le budget de la justice doivent-ils servir à accabler ceux qui ne représentent un danger pour personne ?
Mesdames et Messieurs les membres de l’élite autoproclamée dont nous peinons, paraît-il, à saisir la pensée complexe, et vous, les exécutants de ces politiques ubuesques, qu’il me soit permis de vous rappeler que toutes les révolutions, en tout temps et en tous lieux, ont eu pour origine des émeutes de la faim.
Quand vous aurez exterminé les derniers paysans et que vous ne devrez la possibilité de vous alimenter qu’à des industriels de l’agrotechnologie qui décideront quand et à quel prix chacun aura le droit de se nourrir (même si vous serez les derniers à en souffrir), quand vous ne pourrez plus aller aux sports d’hiver parce que vous aurez préféré le loup aux bergers, quand vos sentiers de randonnées auront été transformés en maquis, quand vous aurez éradiqué nos élevages extensifs et ruiné les apports organiques dont les sols ont besoin au profit des industriels de la chimie, quand toutes nos campagnes ne seront peuplées que d’esclaves en télétravail, quand vos enfants ne sauront plus à quoi pouvaient bien ressembler une vache, un cochon, un cheval ou une poule, devant votre steak de synthèse et vos galettes de tofu fabriquées en laboratoire, vous regretterez amèrement le jour où vous avez voulu condamner Daniel parce que ses vaches avaient soif. Mais il sera trop tard.
Tout ça parce que vous aurez voulu FAIRE UN EXEMPLE.
* Le prénom a été modifié.
Attaques de loup deux cents bêtes le 19/08/2020 et dix le20/08/2020
26 cadavres retrouver dont un examiner par l’ofb document de la préfecture annonce mon indemnisation puis il se retrac
Des bêtes sont revenu 58 sur 200 les attaques on repri et les ovins ne sortent plus. 157 animaux pour le Loup
Indemnisation total 300_€
Bien triste réalité que subit notre ruralité à des degrés divers ! il faut reconnaître qu’ici tout a été mis en oeuvre pour pousser la situation à son paroxysme !!!
PAUVRE FRANCE !!!!!!!!!!!!
De tout coeur avec vous, tout mon soutien. Ras le bol des règles et lois pour laver encore plus blanc que blanc ! Les agriculteurs respectent la nature, l’environnement, leurs animaux,… laissez les vivre!