Sécheresse : L’État, le politicien, le touriste et le paysan.(Par Jean-Paul Pelras)

Et si, croupissant dans les eaux de la discorde, l’équation était insoluble ? Ou comment ceux qui sont censés gérer le partage du fluide seraient définitivement devenus irréconciliables. Prenons, pour appréhender la question, le pourtour méditerranéen et transportons-nous dans les Pyrénées-Orientales où les services de l’Etat, solidement épaulés par l’Office français de la biodiversité et par quelques élus zélés, veulent tout simplement faire passer en « Zone de crise » une vallée où l’irrigation agricole deviendrait, de facto, interdite. Plus d’eau donc, pour arroser vignes, jardins et vergers en pleine période de récolte.

Mobilisés, les syndicats locaux (FDSEA, Jeunes Agriculteurs, Syndicat des Vignerons et Chambre d’Agriculture) dénoncent une entrave à l’exercice de leurs professions, une menace pour les cultures en cours, une saignée dans l’économie locale, un péril pour le devenir de l’agriculture départementale et le mépris de l’administration à l’égard de ceux qui, jour après jour, nourrissent les populations.

En tant que rédacteur en chef d’un journal agricole et rural, je soutiens sans aucune réserve leur position et condamne les décisions qui pourraient nuire au maintien et au devenir de la profession agricole. Pourquoi ? Parce que je viens de là ! Parce que je sais ce qu’il en coûte de faire venir une récolte. Parce que, depuis des décennies, je vois disparaître les terres agricoles. Ces terres transformées en friches aux quatre coins du département car quelques politiciens ont préféré leurs pitoyables investitures au salut de notre agriculture. Ces politiciens qui cèdent aux sirènes environnementalistes et à celles d’une urbanisation tout autant galopante que lucrative. Ces politiciens qui regrettent « officiellement » la terre abandonnée le lundi, tout en se frottant les mains le mardi quand une parcelle disparaît sous les ronces et les genets. Ces politiciens qui ont favorisé l’artificialisation des terres avec une population départementale qui est passée en un demi-siècle de 250 000 à presque 500 000 habitants. Ces politiciens qui préfèrent stigmatiser une activité agricole, pourtant réduite à sa portion congrue puisque dans la même période son revenu et ses surfaces exploitées ont été divisés par 4, plutôt que de désigner courageusement les utilisations de l’activité touristique située en aval des cours d’eau. Car il est plus facile de contraindre 2000 paysans rescapés d’une déprise historique que de réclamer quelques efforts à 4.2 millions de touristes (et 25 millions de nuitées), soit dix fois la population autochtone. La tendance qui consiste à imputer aux producteurs tous les problèmes qui concernent l’environnement est inacceptable. Les champs, les près, les vignes, les vergers, dans un contexte où, de surcroît, l’agriculture au prix d’énormes efforts a su limiter ses prélèvements et préserver la ressource en eau, ne doivent pas être considérés comme une variable d’ajustement destinée à donner bonne conscience à ceux qui veulent fermer le robinet du monde paysan pour lui préférer le confort des estivants.

2 réflexions sur “Sécheresse : L’État, le politicien, le touriste et le paysan.(Par Jean-Paul Pelras)

  • 31 juillet 2022 à 20 h 25 min
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    bravo jp mais quant on vois qui nous defends il faut pas s etonner

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  • 2 août 2022 à 11 h 14 min
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    Et si on interdisait de remplir les piscines 🤔

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