Salon de l’agriculture : Pitoyable poker menteur, misérable débat ! (Par Jean-Paul Pelras)

Osons la formule : « Quel bordel » ! Car comment qualifier ce qui est en train de se passer en apostille du Salon International de l’Agriculture et à seulement quelques heures de son ouverture ?

Jeudi, la liste des invités au débat voulu par Emmanuel Macron est dévoilée. Y figurent les syndicats agricoles, Leclerc, Bigard, Lidl …, Générations futures, Réseau action climat, Riposte alimentaire (ceux qui jettent la soupe sur les tableaux) et, entre autres activistes écolos, Les Soulèvements de la terre, mouvement, rappelons-le, qui saccage régulièrement les installations agricoles.

Dans la soirée le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, twitte ce message : « L’invitation par le PR au SIA d’un groupuscule dont la dissolution a été demandée par son propre GVT est une provocation inacceptable pour les agriculteurs. J’avais accepté de participer à un débat. Dans ces conditions, je refuse de prendre part à ce qui ne sera qu’une mascarade. »
Un peu plus tard dans la soirée, l’Elysée annonce que Les Soulèvements de la terre ne sont plus invités. La FNSEA envisage alors de revenir autour de la table. Mais la pression est forte et le monde agricole, dont une partie réclamait déjà le boycott du Salon, souhaite que les responsables de la profession déclinent purement et simplement l’invitation. C’est ce que nous a confirmé Jérôme Despey, vice-président de ce syndicat, par téléphone vendredi en début de matinée : « La FNSEA, c’est décidé, ne prendra pas part au débat voulu par le président de la République ».
Voilà, nous y sommes ! Ou comment le « maître des horloges » n’est pas celui des consciences, à l’heure où il vient de commettre une bourde historique et alors que son Premier ministre avait essayé de déminer le terrain en tirant au cordeau son petit train de mesures.

Qui a conseillé Macron ? Qui a dressé la liste des invités dans un contexte où il fallait, de toute évidence, inviter les écologistes afin d’atténuer leur courroux concernant la « mise sous tutelle » de l’OFB, l’abandon du NODU et autre relecture d’Ecophyto ? De toute évidence, selon Geraldine Woessner,  rédactrice en chef au Point : « Le conseiller agriculture du président, Matthias Ginet, et son supérieur direct, chef du « Pôle écologie, agriculture, énergie, transports, logement » Benoit Faraco.” Le premier est proche de Pascal Canfin, député européen, président de la commission Environnement. Le second fut porte-parole de la Fondation Nicolas Hulot, conseiller de Canfin dans le gouvernement Hollande, puis de Hulot, dans celui de Macron. »  Un couac historique, des fusibles résolument verdoyants et des « fréquentations » environnementalistes comparables à celles que l’on retrouve à France Télévision avec, notamment, Stéphane Sitbon Gomez, directeur des programmes, proche d’EELV, conseiller spécial de Cécile Duflot, directeur de campagne d’Éva Joly. C’est peu dire, en visitant cet entre soi écolo-lutécien, que les agriculteurs ont beaucoup de soucis à se faire.
Rajoutons à cela le communiqué de Michel Edouard Leclerc qui dénonce « un ram dam ressemblant à un coup de com » et dit ne jamais avoir été invité à ce grand débat par le président de la République.

Et l’Elysée qui twitte un communiqué intitulé « Clarification » où il renvoie la responsabilité sur la presse : « Des contacts ont été pris avec des collectifs ayant par le passé perturbé le salon pour leur proposer, pour cette édition, une expression constructive dans le cadre de cet échange. Dans ce cadre, les « Soulèvements de la Terre » n’ont été ni conviés, ni contactés. Il s’agit d’une erreur faite lors de l’entretien avec la presse en amont de l’événement. » Ben voyons !

Reste à savoir si le débat aura lieu et qui y participera. Car le mal est fait et, à moins d’un énième revirement dans les prochaines heures, l’épisode laissera des traces dans les relations entre le syndicalisme à vocation générale et le chef de l’État. Car en refusant de participer à ce simulacre, la « maison mère » s’est délibérément rangée du côté  de ceux qui l’accusaient bien souvent ces derniers temps de collusion et de de cogestion avec le gouvernement.
Qui sera donc sur le ring samedi ? La Coordination Rurale, sur tous les fronts depuis le début des manifestations, sera-t-elle présente ?
Si oui, elle prend le risque de tomber dans son propre piège, avec la FNSEA en embuscade qui ne manquera pas de la designer pour avoir cédé, à son tour, au magnétisme présidentiel. Et ce, même si elle entend, le cas échéant, saisir « l’occasion de l’expression » face à des environnementalistes à qui il ne faut surtout pas laisser l’exclusivité des échanges. Une occurrence qui pourrait virer au pugilat.  C’est peut-être d’ailleurs ce recherche le pouvoir en laissant s’étriper les protagonistes pour mieux asphyxier (et dominer) le débat. Ou bien la CR prendra t-elle le risque, en déclinant l’invitation, de voir revenir au dernier moment quelques caciques de la FNSEA. Et là, pouvoir dire : « Vous voyez finalement ils y sont allés, nous on n’y était pas ! »

A l’heure où j’écris ces lignes les dés sont certainement jetés. Et la seule question qu’il faille se poser depuis ces campagnes où l’agriculteur découvre ce mélodrame politico-syndical c’est : « Et le paysan dans tout ça ? »

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