Pépiniéristes : toute une filière suspendue aux autorisations d’arrosage ! [par T. Masdéu]

Suite au dernier bilan du “Comité ressource en eau”, l’échéance préfectorale du 10 mai, qui élève au niveau “Crise” les bassins de l’Agly et de la Têt, déstabilise sérieusement les prévisionnels économiques et productifs des pépiniéristes. Déjà affectés en février dernier lors du passage des P.-O. en “Alerte renforcée”, l’annonce de ce nouvel arrêté préfectoral a déclenché toutes les alarmes.

Même si le contenu détaillé de l’arrêté n’était toujours pas divulgué à l’heure où nous bouclons cette édition de l’Agri, les pépiniéristes, inquiets, espèrent des aménagements afin de poursuivre les arrosages. Dérogations indispensables et vitales pour sauver l’activité économique de la filière et préserver le capital végétal. D’autant que ces professionnels doivent aussi faire face au comportement d’une clientèle très dubitative qui, de plus en plus, s’autocensure dans les achats de végétaux. “C’est la première année où l’on nous pose autant de questions. Les gens sont très inquiets par rapport aux arrosages de cet été. Par crainte de ne pas pouvoir le faire ou de s’exposer à des sanctions financières en le faisant, nos clients ont freiné des deux pieds leurs achats !” témoigne avec perplexité Isabelle Bonmarchand, pépiniériste à Saint Hippolyte, qui estime déjà pour le mois d’avril une perte de – 30 % sur ses ventes.

Les pépiniéristes sont bien souvent confrontés à un manque d’espace.

“Pour les potagers, c’est mort”

“Du coup, nous avons bon espoir que ces clients reportent plutôt leurs achats à l’automne et se dire, peut-être, que cette situation de sécheresse récurrente changera les pratiques en permutant les plantations habituelles d’avril vers les mois de septembre et octobre. Par contre, pour tout ce qui est potager, là, c’est sûr, pour la saison, c’est mort, on peut faire une croix dessus !” 
Particuliers, professionnels et collectivités, tous exposés aux mêmes sanctions sur les arrosages, ont abandonné ou, dans le meilleur des cas, reporté leurs commandes. Une démarche aux conséquences qualifiées de double peine par l’ensemble des pépiniéristes qui, en plus de perdre du chiffre d’affaires pour ce trimestre, sont bien souvent confrontés à un manque d’espace. “Habituellement, aux alentours du 15 avril, nos serres commencent déjà à être bien dégarnies, prêtes à accueillir les nouveaux plants pour la campagne d’automne. Nous sommes presque à la fin du mois et d’ici trois semaines je vais réceptionner presque autant de nouvelles productions que j’en dispose ! Sans savoir comment faire pour les caser !” s’interroge avec inquiétude la gérante en parcourant ses tunnels bondés. Même le plan B qui consisterait à rempoter dans des pots plus gros pour les vendre par la suite en pièces plus importantes n’est plus envisagé, tant sur la partie rentabilité que sur l’attractivité du produit.

Négocier un accès à l’eau

Bien que la situation pluviométrique pour l’automne soit aussi imprévisible, ces annulations ou décalages en cascades des commandes risquent de provoquer un préjudice économique pour l’ensemble des entreprises de la filière, avec à la clé licenciements et activités partielles. Négocier un accès à l’eau pour préserver, cet été, la survie des plantations de moins de deux ans, tout comme autoriser les collectivités à arroser leurs espaces végétalisés pour maintenir des îlots de fraicheur.
Des revendications de l’ensemble des professionnels de la filière, comme les paysagistes, qui insistent aussi sur l’obtention de ces dérogations préfectorales afin d’atténuer l’effet dévastateur de la sécheresse. Une crise sans précédent qui remet à nouveau sous les projecteurs le sempiternel sujet de la gestion de l’eau, son stockage et l’utilisation ou pas pour l’arrosage des eaux grises et usées après filtration. 

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