Parce que rien n’est jamais simple – sem. 15-2023 [par Yann Kerveno]

C’est de saison !

Puisque nous sortons tout juste de Pâques, sachez que certains coins de l’Aragon, en Espagne, sont presque jaloux des dégâts que les sangliers infligent ailleurs aux cultures. En effet, ce ne sont pas les suidés qui sont là-bas le principal problème mais bien les… lapins. Et leur pullulation qui met en danger les activités agricoles que n’arrivent plus à protéger ni les clôtures ni la chasse… Au point que le monde agricole réclame l’autorisation d’avoir recours au poison pour contrôler l’infestation de ces lapins insensibles à la myxomatose.

Fantasmes allemands

Le ministre de l’Agriculture allemand, issu des rangs verts, ne perd pas de temps. La PAC 2023 est à peine entrée en vigueur qu’il pose déjà des jalons pour la prochaine qui entrera en vigueur en 2028. Avec une idée forte : mettre fin aux paiements à la surface pour basculer vers un système d’aides sanctionnant les bénéfices pour la société, bref, les services rendus à l’environnement, au climat… Le tout regroupé sous un vocable unique, les “biens publics” dont la définition reste à élaborer…

À suivre

Alors que l’Europe n’en a toujours pas fini avec les OGM ou les techniques d’édition génétique de CRISPR-Cas9, voici que se développe une nouvelle technologie prometteuse, le “gene silencing”. Elle consiste à inhiber la synthèse de protéines essentielles au fonctionnement des êtres vivants ou de certaines de leurs fonctions. Les applications sont multiples selon les promoteurs de la chose, on peut imaginer des insecticides très ciblés (ce qui met Pollinis en rage) ou des traitements contre le cholestérol génétique ou les accidents cardio-vasculaires…

Ubu

Et puis il y a cette histoire. L’ANSES qui interdit l’utilisation de phosphine en France, faisant ainsi de notre pays le seul à ne plus avoir recours à ce produit qui permet de garantir le bon état sanitaire des céréales que nous exportons par bateau… Soit grosso modo 11,5 millions de tonnes qui ne pourront plus être exportées hors du territoire de l’Union européenne, alors que les pays clients des céréales françaises imposent la fumigation des cales de bateaux au phosphine pour le transport. Et que croyez-vous qu’il va se passer le 25 avril prochain, date d’entrée en vigueur de l’interdiction ? Il y a fort à parier que les céréales prendront les chemins de traverse pour rejoindre les ports de nos voisins, belges, hollandais, espagnols… Pour y être chargées sur des bateaux traités avec un surcoût qui rendra les céréales russes encore plus compétitives ?

Enfer pavé de bons sentiments

De quoi énerver un peu plus les producteurs de céréales polonais ou roumains qui bataillent avec l’Union européenne pour que les céréales ukrainiennes, grandement empêchées de sortir par la Mer Noire, soit correctement tracées lors de leur parcours au sein de l’espace économique européen. On se souvient en effet qu’un des dispositifs d’aides apporté à l’Ukraine par l’Union a été la mise en place de corridors de transit, la suppression des taxes et des certificats sanitaires pour faciliter l’entrée des produits ukrainiens dans l’UE. Les deux gouvernements estiment que ces céréales bon marché viennent en effet perturber le commerce de leurs propres productions. C’est le cas de la Roumanie qui a acquis pour 1,24 milliard d’euros de céréales en provenance d’Ukraine, un record historique. Des achats qui engorgent les silos des producteurs roumains, aussi entravés pour faire circuler leurs céréales puisqu’une grande partie de capacités logistiques est phagocytée par ces mêmes céréales ukrainiennes. La Pologne a suspendu toute entrée de céréales ukrainiennes sur son sol “au moins jusqu’à début juillet.”

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