P.-O. : quel habitat demain pour le second département le plus pauvre de France ? [par Thierry Masdéu]

(Première partie)

Avec une barre qui devrait, d’ici à 2025, atteindre les 500 000 habitants, le département des P.-O. doit faire face, outre cet essor démographique qui se concentre majoritairement sur la plaine, aux défis du logement, de la ressource en eau, des services publics, de l’accès à l’emploi. Mais aussi à la paupérisation de sa population.

Selon l’Insee, qui publiait en septembre dernier une étude sur ses analyses en Occitanie, le département des Pyrénées-Orientales est classé le plus pauvre de France métropolitaine, juste derrière la Seine-Saint-Denis. Toujours selon cette étude, en 2020, 21 % des habitants étaient en situation de pauvreté, disposant d’une ressource de 1 120 € par mois pour une personne, et de 2 352 € mensuel pour un couple avec deux jeunes enfants. Ce qui représente 6 points de plus qu’au niveau national, mais aussi bien plus que dans les autres départements du littoral languedocien. L’étude révèle également que 14 % de la population de moins de 65 ans est couverte par le revenu de solidarité active (RSA), soit deux fois plus que la moyenne en France métropolitaine. Autres données, 10 % des habitants les plus pauvres disposent d’un niveau de vie mensuel inférieur à 880 € alors qu’il dépasse les 2 870 € pour les 10 % des résidents les plus aisés.

Concernant l’accès à l’emploi, les tranches d’âges de 25 à 54 ans figurent parmi la population la moins souvent en activité : 14,2 % n’est ni en emploi, ni inscrite à Pôle emploi, contre 9,3 % en France métropolitaine. On peut lire également qu’en 2022, le chômage affichait en moyenne 11,7 %, taux le plus élevé de l’Hexagone qui était alors de 7,3 %. Malgré ce déséquilibre économique, le département des P.-O. conserve son pouvoir d’attraction pour ses aménités, avec une migration plus importante de séniors que de jeunes. En effet, si en 1975 les P.-O. comptaient 67 personnes âgées de 65 ans et plus pour 100 personnes jeunes de moins de 20 ans, en 2023 ce ratio atteint les 128 seniors pour 100 jeunes.

Jean-Paul Billès, président du syndicat mixte SCOT Plaine du Roussillon, maire de Pézilla-la-Rivière.

Un constat, parmi d’autres, sur lequel Jean-Paul Billès, président du syndicat mixte SCOT Plaine du Roussillon, chargé d’établir le schéma de cohérence territoriale et notamment sur celui du logement, reste très attentif. “Effectivement, le vieillissement global de la population, plus accentué ici, est un fait et c’est là où je dis attention ! Parce que la rareté du foncier à laquelle nous sommes et allons être confrontés avec l’application des règlementations sur la limitation des extensions urbaines va engendrer, pour les personnes qui vont vouloir venir vivre ici, une augmentation des prix. On risque d’avoir une certaine catégorie de population avec comme effet secondaire, pour les jeunes d’ici ou d’ailleurs, l’inaccessibilité au logement !”

34 500 nouveaux logements d’ici à 15 ans

Une gentrification sur laquelle il met en garde, évoquant pour les P.-O. d’autres conséquences comme l’accentuation du départ des jeunes et un accroissement du déséquilibre entre les tranches d’âges. Mais également le risque d’une prolifération de la cabanisation qu’il considère comme un squat de terres agricoles avec la panoplie des difficultés sociales, foncières et sécuritaires que cela entraine. “Il faudrait de nouveaux outils, disons répressifs, mais il serait aussi juste de se poser la question : pourquoi ces gens enfreignent-ils la loi ? Et bien souvent, c’est parce qu’il y a un besoin de logement social” tempère avec compassion Jean-Paul Billès qui occupe aussi la fonction de maire depuis 1989 sur la commune de Pézilla-la-Rivière. “La plupart des communes qui ont encore de l’espace pour construire, comme chez nous à Pézilla, font de temps en temps des lotissements communaux où les prix sont largement inférieurs au prix du marché et ces habitations sont réservées aux primo-accédants”.

Construction de 24 logements locatifs sociaux à Ponteilla.

Anticiper le flux migratoire pour faire face aux futurs besoins de logements, avec une projection, d’ici à 15 ans, de la réalisation de 34 500 nouveaux logements. Fixer les orientations d’aménagements urbains en tenant compte de la loi Climat et Résilience d’août 2021, et de la loi ZAN (zéro artificialisation nette) de juillet 2023. Préserver les zones agricoles, protéger la biodiversité, ou encore sauvegarder le patrimoine, autant de tâches auxquelles la révision du nouveau SCOT Plaine du Roussillon s’attèle et que nous évoquerons avec Jean-Paul Billès dans notre prochaine édition.

Fiche d’identité du syndicat mixte SCOT Plaine du Roussillon

Création : Arrêté préfectoral du 12 décembre 2003.
Membres :
– Communauté de Communes des Aspres ;
– Communauté de Communes Roussillon Conflent ;
– Communauté de Communes Sud Roussillon ;
– Communauté Urbaine Perpignan Méditerranée Métropole.
Communes : 77 au total.
Superficie : 1 156,95 km2.
Population : 364 000 habitants – soit 74 % du département.

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