Lettre à propos de ces ministres qui parlent d’anus et de beurre salé (Par Jean-Paul Pelras)

Commençons par un petit avertissement. Les phrases et les mots qui vont suivre, une fois n’est pas coutume, empruntant moins aux cochonnailles qu’aux cochoncetés, les lecteurs sont invités à ne pas laisser traîner cette chronique sur la table du salon, sur la toile cirée de la cuisine et partout où les enfants auraient envie d’affûter leur instruction.

« Elle me tournait le dos, elle se jetait sur le lit. Elle me montrait le renflement brun de son anus. Tu viens Oskar ? Je suis dilatée comme jamais. » Cet extrait est tiré du dernier livre de Bruno Le Maire qui, rappelons-le, est aussi, accessoirement, notre ministre de l’Economie. Lequel, romancier à ses heures, évoque dans « Fugue américaine » publié chez Gallimard, le voyage vers la Havane de deux frères, Franz et Oskar Wertheimer, qui croiseront la route de Vladimir Horowitz (1903-1989), célèbre pianiste d’origine russe naturalisé américain. Continuons avec cet autre passage qui nous est offert par le locataire de Bercy, également agrégé de Lettres modernes « Après mes règles, pendant deux ou trois jours, je suis excitée comme jamais ; je mouille ». La dame soulevant le haut pour «exhiber ses seins » lâche « tu as vu comme ils sont gros aujourd’hui ? Tu as vu, Oskar ?» « Je viens Julia, je viens »  Alors Oskar finit par « prendre » Julia « en hurlant des mots que la décence la plus élémentaire (…) interdit de consigner dans cette chronique d’un désastre annoncé ».

Un désastre annoncé : expression qui pourrait servir de titre à la situation de l’économie française avec, s’il faut emprunter à la prose du ministre en charge des Finances publiques, une « dilatation » inédite de la dette avoisinant tout de même 3000 milliards d’euros. Un détail, que dis-je « un trou » qui n’a pas échappé à l’agence de notation financière Fitch Ratings, puisque la France a été rétrogradée de AA à AA-. Une « appréciation pessimiste » selon le ministre épistolaire, qui risque pourtant d’avoir une incidence sur les marchés financiers et sur les taux d’intérêts concernant les crédits attribués aux entreprises comme aux particuliers. L’agence Fitch a-t-elle parcouru le livre du ministre avant de se prononcer ? Ou bien est-elle tombée sur cet autre passage publié par Bruno Le Maire dans « Le ministre » (éditions Grasset) en 2004 : « Je me laissais envahir par la chaleur du bain, la lumière de la lagune qui venait flotter sur les glaces de la porte, le savon de thé vert, et la main de Pauline qui me caressait doucement le sexe. » Ou bien encore s’est-elle passionnée par l’œuvre d’une autre égérie de la macronie récemment mise à l’honneur dans Playboy ?  Marlène Schiappa, qui écrivait en 2014 dans « Sexe mensonge et banlieues chaudes » (Ed La musardine) : « Tiens, je n’ai jamais fait l’amour avec un homme circoncis… Ophé m’a toujours dit que c’était « les meilleurs à sucer ». Je me le représente dur, foncé, de la couleur caramel beurre salé du macaron Pierre Hermé, avec le même goût et je m’imagine en train de le déguster, tant et si bien que je ne sais plus vraiment si je suis excitée ou affamée ».

Précisons que l’actuelle secrétaire d’Etat chargée de l’Economie sociale et solidaire a tout de même publié une bonne trentaine d’ouvrages parmi lesquels, sous le pseudonyme Marie Minelli, « Les filles bien n’avalent pas », « Osez-les sex-friends » ou « Osez 20 histoires de faits divers sexuels »

Voilà, ce sera tout pour aujourd’hui. En attendant la retraite et pour soutenir ceux qui viennent de la rallonger, vous pouvez toujours effectuer un petit détour par votre librairie préférée. Vous y croiserez peut-être Ophé, Oskar et leurs pensées « bordélisées », quelque part dans les rayons dédiés à la prose des ministres employés par l’Etat Français.

Jean-Paul Pelras 

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