Lettre à Daniel Cohn Bendit qui ne devrait plus passer à la télé ! [par Jean-Paul Pelras]

Monsieur,
j’ai décidé de vous écrire comme l’on adresse une supplique à ceux qui, malgré le discrédit, s’entêtent encore à pérorer car ils se croient obligés de prodiguer leurs leçons, de dispenser leur moralité. Un peu comme vous l’avez fait au printemps dernier en demandant au professeur Raoult de “fermer sa gueule”. C’était sur LCI, chaine de télévision qui vous invite régulièrement pour recueillir votre indispensable avis sur l’actualité du moment. Nonobstant cette injonction et vos prises de position en faveur de la vaccination lorsque vous invitiez les rétifs à l’injection à “aller se faire foutre”, voilà plus d’un demi-siècle que nous sommes des millions à vouloir, d’une certaine façon et avec la même délicatesse, vous retourner la politesse sans la moindre affliction.
Un demi-siècle que vous circulez donc, de publications en émissions de radio et autres plateaux de télévision, pour nous parler de politique ou d’écologie en tant qu’ancien révolutionnaire, en tant qu’ancien député européen, en tant que libéral libertaire, la belle affaire !
Lorsqu’ils étaient encore ouverts, je visitais quelques bistrots où votre seule apparition suscitait sarcasmes et avanies. Évidemment, nous ne fréquentons pas les mêmes lieux de perdition, sachant de surcroît que, depuis mai 68, la sève insurrectionnelle a changé de comptoir pour préférer à l’entre-soi intellectualisé, le quotidien des réalités. Voilà donc cinquante ans que vous vous imposez, sans que personne ne comprenne pourquoi les médias vous accordent autant d’intérêt. Si ce n’est peut-être pour susciter cette part consubstantielle de mépris qui doit, elle aussi, faire vendre un peu de publicité.
Vous dénonciez en 2018 le mouvement des Gilets jaunes et défendiez, entre autres mesures coercitives, le principe de la taxe carbone. Peut-être parce que ce mouvement s’apprêtait à réussir là où vous avez échoué, la révolution étant quelque fois moins animée par le dogme des idées que par l’astreinte des nécessités. Ces nécessités qui n’étaient manifestement pas les vôtres au Parlement européen où vous avez bénéficié de confortables indemnités pendant presque 20 ans. Et pourtant vous êtes toujours là, à l’heure des Matzneff et des Duhamel, à l’heure où vos écrits dans Le Grand bazard “Il m’était arrivé plusieurs fois que certains gosses ouvrent ma braguette et commencent à me chatouiller”, à l’heure où vos déclarations sur le plateau d’Apostrophes “Quand une petite fille, de 5 ans, commence à vous déshabiller c’est fantastique !”, sont régulièrement exhumées. À l’heure où beaucoup se demandent pourquoi ils risquent 135 euros pour n’être pas encore rentrés chez eux à six heures du soir, alors que d’autres peuvent “chatouiller” leurs enfants en toute impunité parce qu’ils se sustentent au Dîner du Siècle, passent à la télé, ou murmurent à l’oreille du pouvoir.

Une réflexion sur “Lettre à Daniel Cohn Bendit qui ne devrait plus passer à la télé ! [par Jean-Paul Pelras]

  • 1 mars 2021 à 12 h 24 min
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    Bravo Mr Pelras, voilà qui est dit avec élégance. Je n’ai jamais été compris l’audience accordée à ce tartuffe…

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