L’Etat choisit ses journaux : Le calibrage des pensées vient de commencer ! (Par Jean-Paul Pelras)

La semaine dernière, dans le nord Aveyron aux portes de l’Aubrac, entraide oblige, neuf agriculteurs mettent leur savoir faire et leur matériel en commun pour procéder à l’ensilage. Le soir venu, ils se retrouvent à la ferme pour partager la soupe. C’est alors que les gardes du cardinal de service toquent à la porte et verbalisent nos paysans pour regroupement interdit. Le lendemain, en Haut-Conflent dans les Pyrénées-Orientales, une maraîchère qui livrait des légumes dans une commune voisine prend une prune de 135 euros car elle n’avait pas la bonne attestation… Lundi matin, nous apprenons que “La France n’imposera pas de quarantaine aux personnes en provenance de l’Union européenne, de la zone Schengen ou du Royaume-Uni. Au même moment, il se murmure que le confinement franco- français pourrait durer bien au-delà du 11 mai. Sachant que, de toutes façons, au moins jusqu’au 2 juin nous ne pourrons pas dépasser la limite concentrique des 100 kilomètres…

Est ce que nous pouvons écrire là dessus ? Est ce que nous pouvons, nous journalistes et éditorialistes, nous poser ce genre de question ? Nous demander si les 9 paysans aveyronnais méritaient cette sanction, si la maraîchère du Conflent devait contester sa contravention, si les suzerains qui pilotent la France du coté de Lutèce, en confinant le pays et en ouvrant les frontières, savent raison garder ou ont perdu la raison ?

Si je pose ces questions c’est tout simplement car l’État est, de toute évidence, en train de choisir ses journalistes. Un site baptisé « Desinfox coronavirus » vient en effet d’être mis en ligne sur la plateforme gouvernementale. Il dit entre autre : « Des journalistes spécialisés démêlent le vrai du faux chaque jour. Cet espace dédié vous donne accès aux articles de médias français luttant, dans le cadre de la crise sanitaire, contre la désinformation. » Ensuite c’est facile, il n’y a plus qu’à cliquer sur l’un des 18 liens conduisant, in petto, à l’article plébiscité par Matignon. Vous avez le choix entre Le Monde, 20 minutes, factuel AFP, France Info et Libération.

Le poids du couvercle

Mais qui sont ces gens qui peuvent se permettre de dire où est le vrai, où est le faux ? Alors que, depuis des semaines, ils ne savent même plus où ils ont la main droite et où ils ont la main gauche. Alors que, pour gérer la crise actuelle, ils pilotent au doigt mouillé en laissant les scientifiques décider à leur place dans une cacophonie qui distille tour à tour la peur et la colère. Quelle est la prochaine étape dans cette surenchère aux atermoiements, aux dérives sécuritaires, quand après avoir contraint l’expression de la liberté, ils vont peut être museler la liberté d’expression ?

En moins de deux mois nous avons vu ce que l’homme pouvait accepter, nous savons que le pouvoir peut juguler sans problème sa capacité d’indignation. Et, malgré tout, nous avons essayé de démêler ce qui relevait de la coercition et de la prévention. Mais à partir de maintenant, les journalistes doivent, sans délai et dans l’unité, s’intéresser au poids du couvercle. Ils doivent le faire courageusement, sans redouter un procès pour insubordination ou Dieu sait quelle invention susceptible de les faire taire. Car suggérer une liste de lecture avec des « purs » qui seraient référencés et des « impurs » qui seraient ignorés, ne va pas sans évoquer quelques méthodes où, pour gouverner, il fallait, avant toute chose, calibrer les pensées.

Jean-Paul Pelras

Une réflexion sur “L’Etat choisit ses journaux : Le calibrage des pensées vient de commencer ! (Par Jean-Paul Pelras)

  • 14 mai 2020 à 1 h 22 min
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    Il était une fois des gens qui voulaient des mesures…
    Mais comme le disait Le Sieur Sarkozy, l’état n’est plus providence..
    Il voulait dire par là que le gouvernement ne donnerai plus
    les ordres à l’administration de créer une situation de providence
    et d’abondance pour le privé via le service public et l’entreprise publique…
    Donc, le service public n’est plus providence…
    Vraiment ? Alors, s’il n’est plus providence, que peut-il être ?
    Maintenant on sait…
    J’ai envie de crier : arrêtez de demander des mesures !

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