L’agriculture française, bouc émissaire des ONG [par Jean-Paul Pelras]

C’est un rapport d’une centaine de pages corédigé par Action contre la faim, Oxfam France (dirigé par l’ancienne ministre Cécile Duflot) et Terre solidaire. Pour illustrer le propos, un clip et des images choc qui, de toute évidence, s’adressent principalement aux jeunes générations. Des images “choisies” où l’on voit des pulvérisateurs, des animaux maltraités ou élevés en batterie et un texte qui défile : “Tu trouves ça angoissant. Bah ça c’est l’agro-industrie. Le modèle principal des pays du Nord clairement favorisé par les politiques. Pourtant il a un impact énorme sur l’environnement et sur nous tous. C’est quoi l’agro-industrie ? Ben ce sont de grandes exploitations qui utilisent massivement des pesticides pour produire de manière intensive des aliments standardisés et ultra transformés…”

Et le rapport de préciser dans son introduction : “Depuis 10 ans, la France montre un intérêt croissant pour le modèle agroécologique et l’intègre dans les lois régissant son action et ses financements dans l’agriculture à l’international. En parallèle et en contradiction avec ses engagements, la France fait la promotion à l’international d’un modèle agro-industriel à fortes externalités sociales économiques et environnementales négatives…” Et le document de dresser un procès à charge contre la politique française en termes de soutiens financiers engagés entre 2009 et 2018 à destination des pays éligibles à l’APD (Aide publique au développement). Avec, selon ces associations, seulement 13 % ayant réellement bénéficié à la transition écologique.

La France, encore une fois la France…

La France, encore une fois la France et son agriculture responsable de tous les maux, insuffisamment impliquée dans les causes humanitaires et systématiquement désignée par des ONG idéalistes qui n’ont peut-être pas pris la mesure de leurs contradictions. Comme l’illustre l’exemple du Sri Lanka, où l’interdiction des produits chimiques et des pesticides pour encourager le développement de l’agriculture biologique provoque une chute de 15 à 30 % des productions. Ce qui pourrait rapidement susciter une famine historique dans ce pays déjà impacté par la crise économique. Autre exemple, les menaces qui pèsent sur la production de colza et, par ricochet, sur celle de miel. Avec des apiculteurs qui, après avoir réclamé l’arrêt des néonicotinoïdes réclament le soutien de cette production…

Que dire (ou redire) également du programme européen Farm to fork. Lequel prône une réduction de l’usage des pesticides et des engrais, une progression des surfaces bio et 10 % de la SAU réservée à la “haute diversité”. Un scenario qui, selon plusieurs études américaines et européennes, entrainerait une baisse de production de 12 % et une hausse exponentielle des prix alimentaires mondiaux. Faut-il prôner la décroissance, déconstruire les modèles existants, revenir à des pratiques moyenâgeuses et folkloriques pour satisfaire les lubies et les lobbies des environnementalistes ? Est-ce que leurs préconisations paradoxales permettront de nourrir le milliard d’êtres humains victimes de la famine et plus largement les 3 milliards de terriens qui n’ont pas accès à une nourriture de qualité ?

Rien n’est moins sûr à l’heure où les équilibres géopolitiques dépendent plus que jamais des échanges commerciaux, à l’heure où, perte de compétitivité oblige, la dépendance alimentaire menace également les pays occidentaux. Ou comment vouloir assécher le lac parce qu’il “ose” être rempli d’eau.

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