L’Agly, terre de pistache ? [par Yann Kerveno]
L’année 2023 sera une année charnière pour la pistache dans la vallée de l’Agly avec les toutes premières plantations…
Parmi les voies de diversification et d’adaptation de cultures aux changements du climat, le pistachier tient une des cordes. C’est en tout cas le pari fait par le Pays de la vallée de l’Agly qui travaille sur cette opportunité depuis de nombreux mois. “En cherchant des pistes de diversification, on s’est rendu compte qu’il y avait des pistachiers un peu partout à l’état sauvage sur notre territoire. Ce qui est en plus particulièrement intéressant pour nous, c’est que le pistachier térébinthe qui peuple nos garrigues et est adapté à la sécheresse” explique Myriam Levalois-Blazer, en charge du développement agricole du pays.
Ce pistachier térébinthe si bien ancré dans notre territoire pourrait servir de porte-greffe résistant au manque d’eau à des variétés qui vont porter des fruits plus comestibles, en particulier le pistachier vera… Reste qu’en culture sèche, les récoltes attendues incitent à la modestie. “En Californie ou en Espagne, les récoltes atteignent deux à trois tonnes de pistaches à l’hectare. Ici, nous tablons plutôt sur une à une tonne et demie.” Avec toutefois ce secret espoir de voir la nature généreuse dans le temps. “Le pistachier est comme l’olivier, plus il vieillit, plus il produit” ajoute-t-elle.
Sept ans
Pour préciser le potentiel esquissé à la suite d’un voyage d’étude en Espagne, pays qui s’est jeté sur cette production, le projet va maintenant entrer dans une phase d’expérimentation avec des plantations de vergers. “Nous allons planter des vergers « expérimentaux » pour continuer d’apprendre. Certains seront irrigués, d’autres en sec, nous avons beaucoup de connaissances à acquérir. L’idée c’est de ne pas envoyer les producteurs au casse-pipe avec cette espèce.” D’autant qu’il faut être sacrément patient. Il faut en effet sept ans avant que le pistachier entre en production, un peu comme l’amandier…
Mais l’intérêt est là, chez les agriculteurs ou les propriétaires fonciers, qui dépasse largement la seule vallée de l’Agly pour s’étendre à l’ensemble du département. “Dans les personnes intéressées qui ont rejoint la démarche, on trouve des vignerons, des producteurs de plantes médicinales ou à parfums, des apiculteurs, des éleveurs de volailles qui veulent faire de l’agroforesterie…” Si ce n’est pour demain, un jour, la casserie récemment ouverte du côté de Limoux aura peut-être à travailler des pistaches issues des Pyrénées-Orientales. En attendant, le Sud-Est de la France a un peu d’avance. Lancées en 2017, les plantations de petits vergers chez une centaine d’agriculteurs ont porté les surfaces exploitées à près de 200 hectares en 2023.