Économies d’eau : la réponse des professionnels du tourisme [par Thierry Masdéu]

Avec un potentiel d’hébergement de 662 798 lits, le département des Pyrénées-Orientales occupe la 7e place des départements touristiques de France, et la 2e, ramenée à son ratio de population des 482 368 habitants, recensés en 2020.

À l’entame de ce mois d’août, pic de la fréquentation touristique qui frôlerait les 11 millions de nuitées touristiques marchandes et non marchandes, nous avons consulté les représentants départementaux de l’hôtellerie traditionnelle et de plein air. Bien que leur capacité d’accueil ne soit que de 11 705 lits pour les hôtels et de 111 328 lits pour les campings, leur potentiel d’hébergement avoisinerait les 35 % des nuitées aoûtiennes. Un marqueur important qui permet de dresser, avec ces professionnels du tourisme, un premier bilan de début de saison estivale et en particulier sur les mesures déployées pour la préservation des ressources en eau.

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Des corps de métiers qui ont, comme l’agriculture, défendu leurs activités économiques en présentant fin avril au “Comité ressource en eau” un plan de résilience pour passer l’été. Une feuille de route avec des directives pour pallier aux restrictions qu’imposent les niveaux “Crise” et “Alerte renforcée” de l’arrêté préfectoral du 13 juin dernier. “Si on n’a pas le tourisme, on crève, le préfet l’a bien compris et on a su se mettre en crise assez tôt pour éviter la crise très grave plus tard !” évoque, avec un brin de soulagement, Brice Sannac, président de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie des P.-O., saluant au passage les efforts entrepris par les agriculteurs.

“Dans notre secteur d’activité, on a pu réaliser une économie d’eau en réduisant la consommation de près de 30 % !” souligne-t-il, énumérant la continuité de toute une série de mesures de vigilance qui ont été renforcées dès les prémices de la crise sécheresse. Un quota d’économie et d’actions qui s’apparentent à celles obtenues dans l’hôtellerie de plein air avec recherche des fuites, arrêt de l’arrosage et du nettoyage à l’eau potable, baisse de la pression dans les canalisations d’eau, réduction des durées de temporisation des douches et lavabos ou encore avec une sensibilisation permanente de la clientèle aux gestes éco-responsables.

3 %…

Une panoplie de mesures qui concerne également la gestion de l’eau des piscines et de leur entretien. Une gestion qui suscite quelques débats passionnés auxquels Paul Bessoles, président de la Fédération départementale de l’hôtellerie de plein air, qui représente 95 % des campings des P.-O., coupe court en énumérant des données de consommation. “Sur l’ensemble de nos adhérents, notre profession utilise 1,7 millions de m3 tout confondu, avec un ratio de 1,2 millions m3 d’eau potable et 500 000 m3 d’eau de forages. Soit un peu moins de 3 % sur les 81 millions de m3 qui sont prélevés dans les nappes de la plaine du Roussillon ! Et sur l’ensemble des campings qui en sont équipés, l’eau des piscines représente à-peu-près 10 % de la consommation et les 90 % restants sont destinés au confort de la clientèle” présente, placide, ce responsable de la profession, directeur du camping cinq étoiles “Le Dauphin” à Argelès-sur-Mer. “Ce qui est aussi remarquable, et dans un laps de temps très court, c’est que ce sont les premiers équipements de citernes souples de récupération d’eau de la filtration des piscines qui ont déjà été mis en service chez 23 de nos adhérents !”

Ces nouvelles acquisitions, présentes également dans les établissements de l’hôtellerie traditionnelle, permettent, après décantation des eaux de piscines ou de SPA, d’être réutilisées pour l’irrigation d’espaces verts, de vergers (anecdotique et suivant la proximité de l’exploitation), et principalement pour les usages réservés aux sapeurs-pompiers. “On l’utilise également pour arroser nos plantes, nettoyer nos terrasses. Et nous avons signé une convention avec Edmond Jorda, président de l’Association des maires des Pyrénées-Orientales pour sa réutilisation concernant le nettoyage des rues. Et cela fonctionne !” complète dans son analyse Brice Sannac, directeur de l’hôtel 4 étoiles “Les Elmes” à Banyuls-sur-Mer. 

Hôtel Les Elmes - Banyuls-sur-Mer
Hôtel Les Elmes – Banyuls-sur-Mer

Des investissements qu’il qualifie, comme son homologue de l’hôtellerie de plein air, de solidaires mais nécessaires, malgré le faible rendement de récupération de cette eau. Quantifiée à 100 000 m3 pour l’ensemble des campings, cette démarche de préservation de la ressource en eau remet au centre du débat, la réflexion sur les critères possibles de son utilisation, en l’état de potable, grise, noire, voire industrielle. 


Mémo prélèvement annuel en m3, en eaux brutes et potables

• Selon les chiffres communiqués en 2022 par la DDTM 66/SER, à partir d’une étude réalisée il y a une dizaine d’années, l’activité agricole représenterait, toutes ressources confondues, 434 millions de m3 par an, dont 33 millions seraient issus des nappes, 275 millions de la Têt, 55 millions du Sègre, 49 millions du Tech, 21 millions de l’Agly et 1 million de l’Aude. 
• D’après les mêmes données du communiqué, les prélèvements d’adduction en eau potable représenteraient plus de 70,5 millions de m3 par an, dont 41 millions serraient issus des nappes, 12 millions de la Têt, 4 millions du Sègre, 9 millions du Tech, 3,5 millions de l’Agly et 1 million de l’Aude. 
• Suivant une étude plus récente, communiquée par la DDTM 66/SER, la consommation moyenne journalière en eau par habitant serait estimée à 95 litres jour avec, pour les communes de la plaine, une moyenne comprise entre 80 à 90 litres au quotidien, jusqu’à une moyenne journalière de 160 à 170 litres consommés par habitant pour les communes du littoral.
• Des données qui, pour 2023, seraient en décroissance selon les opérateurs Veolia et la Saur qui ont enregistré notamment sur les communes du littoral une baisse de la consommation en eau.

 

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