Dom Brial : 100 ans, un vignoble, un territoire [par Yann Kerveno]

La cave de Baixas a fêté avec faste son centenaire le 30 juin dernier au Château Les Pins. Président de Dom Brial, François Capdelayre regarde 100 ans en arrière et 100 ans devant nous.

Que reste-t-il de ce siècle écoulé ?
Une charpente et des jolis produits ! Il y a 100 ans, le vignoble sortait du phylloxera, on peut peut-être oser le parallèle aujourd’hui avec la sécheresse que nous vivons, c’est une autre crise… Ce que je veux retenir c’est aussi qu’au cours de ces 100 ans, rien n’a été linéaire, les surfaces comme les volumes ont fluctué, parfois grandement. Et c’est notre haut de bilan qui nous a donné la capacité à surmonter les passages difficiles comme en ce moment, même si cette année, qui succède à deux ou trois années compliquées, est particulièrement éprouvante. Mais on a les outils comptables pour surmonter ces épreuves et c’est la force de la coopération.

Le monde a beaucoup changé en un siècle pourtant…
Oui, socialement le monde agricole a évolué. La tendance est à l’individualisme, à l’isolement même parfois et nos coopératives sont une réponse à cette tendance, elle font et perpétuent le lien social sur le territoire. J’en veux pour preuve que Baixas, c’est le raccourci que tout le monde utilise pour désigner Dom Brial. Les vignerons sont très exigeants avec le conseil d’administration mais en même temps, ils sont redevables de la structure. Les coopératives portent toujours les valeurs de l’esprit collectif et notre crédo, avec André Serret, directeur de la cave, c’est : continuité, équité, responsabilité.

Le rôle que jouent les coopératives sur le marché du vin est-il le même qu’alors ?
Avant la première guerre mondiale, il y avait déjà eu une tentative sous forme de groupement commercial, mais cela n’avait pas fonctionné. Le projet de 1923 était, lui, basé sur la progression de la qualité des vins et la lutte contre le monopole du négoce. C’est toujours le cas aujourd’hui, le négoce est toujours là, il y a les GMS qui sont souvent critiquées mais c’est l’ensemble du monde économique qui est sans foi ni loi. La cave coopérative est l’outil idéal pour ne pas paupériser plus encore les populations dans les territoires.

N’y a-t-il pas toutefois un manque d’attirance du modèle coopératif quand on voit les jeunes vignerons s’installer le plus souvent en cave particulière ?
Non, il y a autant de caves particulières qui ouvrent que d’autres qui ferment. Nous, coopératives, avons des spécificités à faire valoir quand il s’agit d’installation, notamment en terme de trésorerie. La coopérative peut être un bon outil pour mettre le pied à l’étrier. Et il n’est pas incompatible avec la coopérative qu’un vigneron puisse vinifier lui même pour quelques bouteilles. Cela fait partie des choses que nous devons faire évoluer dans notre modèle coopératif tout comme nous devons nous adapter au marché qui demande plutôt aujourd’hui des petites cuvées…

Et Dom Brial dans 100 ans, en 2123 ?
Les vignerons d’alors pourront ouvrir la capsule temporelle que nous avons remplie avec des objets de la viticulture d’aujourd’hui. Mais j’espère qu’il y aura toujours l’esprit collectif ! Après, qu’en sera-t-il du département ? Peut-être y-aura-t-il plus de pistaches, cactus ou de figues ? En tout cas, nous mettons tout en œuvre pour que la génération suivante puisse continuer. Nous gérons le présent et nous essayons d’anticiper, on se projette à 5 ou 10 ans, on essaye de leur donner les outils pour qu’ils puissent continuer. Nous voulons léguer ce que nous avons reçu et ne pas le consommer !

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