Difficile campagne pour l’abricot et tensions sur la pêche [par yann Kerveno]

Autant la campagne 2022 s’était déroulée sereinement pour les fruits d’été, autant celle de 2023 a une tout autre couleur.

L’été 2023 ne sera pas moins angoissant que le printemps de la même année et les problèmes de ressource en eau. “La crise que nous vivons n’est pas le fruit du hasard” explique Raphaël Martinez de l’AOP pêche nectarines abricots. “L’an passé, les planètes étaient parfaitement alignées pour que tout se passe bien. Cette année, c’est le contraire. Il y a, bien sûr, la baisse du pouvoir d’achat qui pèse sur la consommation, les mauvais résultats de la distribution qui amplifie la sévérité de la guerre des prix à laquelle se livrent les enseignes, une production plutôt importante dans toutes les régions, une concurrence espagnole qui n’a peut-être jamais été aussi virulente…” N’en jetez plus.

Pourtant, Rphaël Martinez met de la nuance dans ce constat, facile à dresser en plus d’être bien connu. Pour l’abricot, il y a effectivement une responsabilité importante des importations dans le chaos du marché, depuis début juillet, les prix sont souvent sous le cout de production du producteur, mais il n’y a pas que cela.

Qualité défaillante

“La saison s’est plutôt bien déroulée jusqu’au 20 juin et l’arrivée des volumes conséquents sur le marché. Mais nous sommes partis sur des bases de prix semblables à celles de l’année dernière, c’était ambitieux d’autant que la qualité n’a pas été au rendez-vous, beaucoup trop de fruits sont cueillis trop loin de la maturité et les consommateurs ont été déçus.” Ensuite, l’AOP ne fédère que 70 % de la production, et la GMS, qui consomme 70 % des flux, s’est fait déborder par les indépendants et les grossistes… Avec, à la clé, une tension forte sur les prix qui a motivé, jeudi 13 juillet, la demande d’un rendez-vous en urgence auprès de l’Union des grossistes en fruits et légumes (UNGCFL) au motif que le secteur se rend coupable d’importations massives de produits venus d’Espagne à des prix fous. “C’est compliqué pour un distributeur de payer 2,20 ou 2,40 euros quand il a à côté une offre à 1,50 pour la même origine” explique Raphaël Martinez.

Un accord de principe a été trouvé entre la production et huit distributeurs français pour la mise en place d’un engagement moral qui garanti “l’achat et la vente des produits français à un prix attractif.” De quoi espérer garder la tête hors de l’eau, c’est-à-dire un prix de vente supérieur au coût de production, alors qu’il reste un gros tiers de la production annuelle à commercialiser.

Pêches et nectas

S’il est moins dégradé, le marché de la pêche et de la nectarine est tout aussi tendu avec une forte pression espagnole… Et des prix, là aussi, fous : “c’est 1 euro le kilo rendu magasin pour les pêches espagnoles, vendues trois euros et des produits français au même prix.” La bascule a pris plus de temps que d’habitude, pas loin du double… “Oui, on nous annonce que la bascule a été faite, c’est le cas quand on visite les magasins dans le Sud de la France, mais je ne suis pas sûr que ce soit une réalité partout au nord d’une ligne Bordeaux-Lyon” faisait toutefois remarquer Bruno Sangerma (Saveurs des Clos à Ille). L’objectif maintenant sera, un peu comme pour l’abricot, de faire front et de maintenir le prix de vente au-dessus du coût de revient pour le reste de la saison alors que les Espagnols et les Italiens pèsent lourdement sur les marchés.


Creux de la vague

Pour le concombre, c’est le creux de production entre les cultures de printemps et celles de l’été qui arrivent sur le marché à partir du 20 juillet. Si le début de saison fut très bon en termes de volumes et de rémunération jusqu’à la mi-avril, la suite, jusqu’à mi-juin, fut plus complexe avec une demande peu dynamique. En fin de première partie de production, fin juin début juillet, la situation s’est améliorée mais pourrait de nouveau se dégrader au début du mois d’août. Question rendement et qualité. “Les producteurs sont plutôt satisfaits, on a craint le pire, en particulier pour les questions d’irrigation, mais au final il n’y a pas de catastrophe” précisait Bruno Sangerma.

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