Agriculture et photovoltaïque au sol [par Agathe Triaire]

Fin 2021, la Chambre d’agriculture, statuait une nouvelle doctrine sur le photovoltaïque. Devant le constat d’un développement anarchique du photovoltaïque, les élus ont affirmé leur volonté d’encadrer le sujet plutôt que s’y opposer systématiquement.

L’idée a été de structurer des grilles de lecture de façon à faire ressortir les projets pouvant être positifs et d’aller plus loin que la réglementation pour exiger le financement de contreparties.

La volonté initiale

Depuis plus d’une dizaine d’années, le département des Pyrénées-Orientales est sollicité pour accueillir des installations photovoltaïques. Les objectifs politiques sur les énergies renouvelables et les tarifs de rachat subventionnés induisent une pression accrue sur les acteurs locaux, ces derniers devant orchestrer l’aménagement du territoire.
Actuellement, une nouvelle typologie de projet se développe : les projets “agrivoltaïques”. Ces derniers ont pour objectif de coupler une production d’électricité secondaire à une production agricole principale en lui apportant des bénéfices (protection intempéries, écrêtage des températures, etc.). Profitant d’un flou sur la définition du terme et sur le cadrage, la majorité des projets sur sols agricoles sont aujourd’hui autoproclamés “agrivoltaïques” car ils suscitent davantage d’intérêt et d’acceptation localement.

La classification des projets

De par l’analyse qu’elle en fait, la Chambre d’agriculture a choisi de considérer “agrivoltaïques” les dispositifs correspondant à la définition ci-dessus et visant une agriculture locale représentatif du secteur. Certaines cultures exigent des installations moins complexes et coûteuses, comme du pâturage, et les opérateurs photovoltaïques se dirigent alors préférentiellement vers celles-ci en dépit des cultures représentatives du département.
La Chambre d’agriculture réalise une classification des projets en deux catégories, ceux qui priorisent la culture et ceux pour lesquels l’agriculture sous les panneaux n’est qu’un “alibi”. Pour ces derniers, les installations sont de simples centrales au sol, souvent immobiles et posées à une hauteur faible.

Les grilles de lecture

Selon cette distinction, deux grilles de lecture et d’analyse des dossiers ont été établies. Pour toutes les demandes, il a été vu comme indispensable que les collectivités locales soutiennent ces projets.
Pour les projets agrivoltaïques, un solide volet agricole doit être présenté et argumenté. La technologie, l’association technologie-culture, la taille, l’exploitation agricole portant le projet, sont notamment des éléments primordiaux. Ces projets sont avant tout agricoles, ils doivent répondre à un besoin précis.
Pour les projets de centrales au sol, des critères précis ont été retenus pour étudier la localisation géographique du projet et ses caractéristiques intrinsèques. L’idée est d’examiner la pertinence d’un tel projet sur l’espace agricole en question selon, notamment, sa valeur productive, son contexte actuel et passé, etc.
Une fois le dossier jugé acceptable après l’examen de ces critères, le projet ne peut être soutenu par la Chambre d’agriculture qu’après engagement ferme de compenser financièrement, pour l’agriculture du territoire, le potentiel agricole perdu. L’objectif est que le projet ait des impacts positifs sur le territoire. L’opérateur doit mener un travail avec les acteurs locaux de sorte à financer des actions de développement agricole bénéficiant aux agriculteurs et, in fine, engendrer des retombées économiques sur le territoire. Tout projet qui n’inclura pas cette dimension agricole territoriale ne pourra être soutenu.

La compensation non réglementaire, les prémices du changement ?

Si actuellement la réglementation en vigueur ne prévoit pas qu’un projet photovoltaïque soit systématiquement soumis à des compensations agricoles collectives, la Chambre d’agriculture souhaite instaurer un dédommagement financier dit “volontaire” de la part de l’opérateur. L’idée est que tout espace agricole impacté soit pris en compte dans l’estimation d’une enveloppe de compensations et ce quelle que soit leur occupation actuelle (cultivée ou non). Les friches agricoles ne constituent pas moins un potentiel agricole, d’où la volonté forte d’exiger une compensation supplémentaire pour ces espaces.

Si la Chambre d’agriculture a pris une position novatrice et audacieuse, elle est convaincue qu’un développement maîtrisé des énergies renouvelables n’est pas incompatible avec la préservation des espaces agricoles. Pour ce faire, elle encourage tous les partenaires à travailler ensemble dans l’attente d’un cadre réglementaire plus exhaustif sur le sujet. Divers travaux de l’Agence de la transition écologique (ADEME), des ministères, sont en cours et devraient permettre de fixer des lignes directrices cette année.

Plus d’informations sur le site internet de la Chambre d’agriculture.

Agathe Triaire
Service Territoires – Eau – Environnement
Chambre d’agriculture des P.-O.

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