République en goguette

Kiddy Smile, Chloé, Cezaire, Pedro Winter, Kavinsky, Busy P ? Ah bon, vous ne connaissez pas ? Il s’agit pourtant de ces discs jockeys, stars de la French Touch qui arboraient lunettes noires et maillots résilles lors de la fête de la musique le 21 juin dernier. Jusqu’ici rien d’exceptionnel. Sauf que ces beaux blacks dépoitraillés, un tantinet excentriques, corsetés dans une tenue dont les mailles ne vont pas sans évoquer celles de quelques filets à provision, posent, complices, aux côtés de Monsieur le Président (puisque c’est ainsi qu’il faut l’appeler) et de Dame Brigitte dans les salons de l’Elysée. De quoi en finir définitivement avec l’image du Grand Charles et celle de Tante Yvonne symbolisant la rectitude du devoir, les conventions, la grandeur de la France et, paradoxalement, l’héritage des hobereaux. Voici donc, une fois pour toutes, bannie grâce à ce cliché posté sur Instagram par Pierre Olivier Costa, directeur de cabinet des Macron, cette vision un peu décatie de la fonction présidentielle où les ors du Palais ne pouvaient accueillir que dignitaires en redingotes et courtisanes de haut rang attifées chez Dior, Cardin, Saint Laurent et autres apparentés. Qu’on se le dise, le renouveau est aussi en marche au 55 rue du Faubourg Saint Honoré avec, pour recevoir les “vogueurs” du moment, un service de table à 500 000 balles. Sans oublier ce jet présidentiel que le premier d’entre nous n’hésita pas à utiliser pour effectuer seulement 100 bornes en Vendée, alors que nous allons, dès le premier juillet, devoir limiter à 80 kilomètres par heure la vitesse de nos citoyennes cylindrées.

Le standing des nobliaux
Et puis il y a la piscine. Celle de Brégançon bien entendu qui devrait, tout en lui faisant faire des économies, couter 34 000 euros au contribuable. Le but étant, selon une communication du palais présidentiel, de “préserver l’intimité de la baignade des enfants”. Laquelle n’était, de toute évidence, plus garantie au large de cette plage privée habituellement réservée aux souverains et autres invités de la République en goguette. Voilà ce que nous ont appris les médias et les réseaux sociaux en cette fin juin où nos dirigeants comptent, de surcroit, sur onze joueurs de baballe pétés de tune et sur l’arrivée des beaux jours pour hypnotiser ceux qui iront faire trempette dans des eaux moins sacrées. Quelque part, à deux pas de ce camping où, afin que soit préservés l’ordre sociétal et le standing des nobliaux, toiles de tentes et bungalows sont savamment alignés entre le terrain de pétanque et le box aux commodités. Histoire, de pouvoir concentrer un maximum d’individus au même endroit pour prélever en un temps record, cette dîme indexée sur le prix de l’essence, sur la couleur du ciel, sur la température de l’eau, sur la fraicheur du demi-panaché et sur la qualité de la crème à bronzer. Allez, passez un bel été.

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