MSA : une AG sur la lutte contre l’isolement des personnes âgées [par Thierry Masdéu]

Crise sanitaire oblige, l’assemblée générale 2021 de la MSA Grand Sud, qui a eu lieu le 28 mai dernier, s’est tenue en distanciel et en direct via internet. Grâce à une interconnexion vidéo depuis un plateau TV, source d’émission, les dirigeants, élus, adhérents, tout comme les intervenants externes ont pu suivre et mener à bien les sessions de cette AG 3.0.

Après avoir levé séance sur la partie statutaire de l’AG, la présidente de la MSA Grand Sud, Sophie Bonnery, accompagnée du directeur général Denis Ramet, ont laissé place au deuxième volet de l’ordre du jour, une table ronde sur la lutte contre l’isolement des personnes en perte d’autonomie en milieu rural. Animée par Franck Drouin, de l’agence “Diagonales” la thématique du débat s’est revêtue d’un niveau hautement qualitatif de par la pertinence et l’expérience des intervenants. Que ce soit de la part du sénateur des P.-O., Jean Sol, de la vice-présidente du Conseil départemental de l’Aude, Chloé Damillon, du directeur général de l’association Sauvy, Yves Barbe, ou du président de la caisse centrale MSA, Pascal Cormery, chacun dans ses domaines de prédilection a abondé sur l’importance de privilégier le bien-être et l’avenir de nos aînés retraités.

Et ce, notamment avec l’intervention remarquée et passionnée de Jérôme Guedj, dont nous détachons les principaux propos. Ancien député et président du Conseil départemental de l’Essonne, actuellement conseiller départemental sur le canton de Massy et inspecteur des affaires sociales, il est l’auteur d’un rapport* missionné en mars 2020 par Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé, remis en juillet de la même année. Au cours de son exposé, il a étayé le fruit de cette mission, dont le confinement et ses conséquences en a été le déclencheur. “Le confinement a eu le mérite de rendre incontournable une problématique que beaucoup d’élus et d’acteurs de terrain avaient dans leurs pratiques quotidiennes mais dont la question n’était pas suffisamment présente sur l’agenda des politiques globales. La solitude, l’isolement, étaient toujours une sorte de supplément d’âme, mais pas entendus comme un sujet de politique publique devant mobiliser tous les acteurs.”

Table ronde avec l’animateur Franck Drouin de l’agence Diagonales ; Jean Sol, sénateur
des P.-O. et Yves Barbe, directeur général de l’association Sauvy.

Deux millions de personnes âgées en isolement social

Malgré les quelques lanceurs d’alertes qui interpellent chaque année les pouvoirs publics, comme la fondation “Petits frères des pauvres”**, à laquelle il a fait allusion, il a également évoqué des chiffres troublants qui témoignent de ce déplorable fait sociétal. “On estime à deux millions le nombre de personnes âgées en situation d’isolement social ! C’est à dire que leurs relations avec les quatre principaux cercles de proximité, la famille, les amis, le voisinage et la vie associative sont faibles ! Un autre constat qui interpelle, ce chiffre de 300 000 personnes en mort sociale, sans aucun contact relationnel !” Si la crise sanitaire semble avoir remis l’humain au cœur des débats, structurer les politiques d’isolement en responsabilisant toutes les entités, comme les opérateurs de sécurité sociale, les conseils départementaux, les mairies, les CCAS (Centre communal d’action sociale), les CIAS (Centre intercommunal d’action sociale), etc. figurent dans les préconisations avancées.

Dans les principaux messages adressés, le premier fait état de la détection, avec la logique dite, du “aller vers” pour repérer les fragilités des personnes ou en situation de handicap qui ne sont pas encore identifiées. Démarches à la fois en milieux ruraux mais aussi, et c’est un paradoxe, en zones urbaines où des personnes sont également dans ces cas de détresse. Pour Jérôme Guedj c’est un enjeu capital dans la prévention de la perte d’autonomie, et interroge l’ensemble des acteurs politiques, sociaux et associatifs pour savoir comment mobiliser les actions et synergies dans ce sens. “La clé, c’est le partage et la remontée des informations, comme sur les bénéficiaires de l’APA dont la liste est détenue par les Départements ou bien encore celle en possession des mairies concernant le registre canicule. Aussi j’ai suggéré la création de coopérations locales de Veilles sur l’isolement social des âgés, “VIS”, afin que ces personnes soient rapidement identifiées et servies avec les solutions d’aides des organismes existants.”

Habitation et prévention

Autre point de concordance qui émane de cette table ronde, celui qui concerne pour les personnes isolées et non dépendantes, l’amélioration et l’aménagement de leur demeure. Ou bien, dans le cas de cette impossibilité, accentuer, intensifier, voire inventer des modes d’habitats conviviaux, regroupés, de petites tailles qui correspondent à la demande d’une population dont la situation physique ou psychique ne nécessite pas un placement systématique en EHPAD. Habitat inclusif, colocation avec une personne âgée, accueil familial, autant de solutions contre l’isolement qui demandent aussi, comme l’a souligné Jérôme Guedj, des financements urgents et adaptés pour accompagner les moyens de prévention sur la perte d’autonomie. “Au moment où l’on crée une cinquième branche à la Sécu, il faut tout de suite intégrer cette dimension de prévention, hors pour l’instant cela n’est pas le cas ! Il faut arrêter de se poser des questions et mettre de l’argent sur la prévention ! En France on dépense 25 milliards d’euros pour la prise en charge de la perte d’autonomie liée au grand âge, et on y met à peine 200 millions € pour sa prévention, moins de 1 % ! Ce n’est pas suffisant il faudrait un 4 %, 5 %, 10 %, voir plus ! Et ça c’est une dépense qui génèrerait de l’économie et qui de plus permettrait d’obtenir une qualité de vie pour un nombre croissant de nos concitoyens !”

Comme l’a rappelé le sénateur des P.-O. Jean Sol, la France compte aujourd’hui 2 millions de personnes âgées de 85 ans et ce chiffre devrait doubler lors des 15 prochaines années. Une première démographique, sans compter celui du nombre à venir de retraités. Face à une telle proportion de la massification du vieillissement, il va bien falloir anticiper, d’où l’importance des prochaines orientations de politiques publiques et / ou privés en matière de préventions sur la perte d’autonomie. 

* https://solidarites-sante.gouv.fr/ IMG/pdf/rapport_final_mission_jg_16.07.2020.pdf
** https://ifi.petitsfreresdespauvres.fr/

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