Mission canaux : déjà plus de 10 ans de progrès

En intervenant en appui des ASA, la mission canaux a permis de réaliser 40 millions de mètres cubes d’économies d’eau en 10 ans.

La mission canaux, c’est un travail discret mais permanent depuis 2011. Pour aider les gestionnaires de canal d’irrigation, le département en compte plus de 180 pour 200 canaux, à moderniser leurs outils. Et comme dans tout bon bilan, il faut regarder en bas, les petites lignes. C’est Jean Bertrand, en charge du dossier eau à la Chambre d’agriculture, qui en donne lecture. “Au cours de la première décennie de son existence, la mission canaux a permis de mettre en œuvre 48 dossiers de modernisation qui ont permis d’économiser la bagatelle de 40 millions de mètres cubes d’eau” signale-t-il. 40 millions de mètres cubes, c’est plus de deux fois la contenance du lac de Villeneuve la Raho qui en contient 17. “Au total, ce sont 17 M € de travaux qui ont été réalisés, subventionnés à 80 %” précise-t-il ensuite.

Chrystel Costa, chargée de la mission canaux au quotidien, appuie les associations syndicales autorisées (ASA) à déterminer d’abord leurs besoins puis à monter les dossiers, parfois très complexes, qui vont permettre d’aller chercher les financements nécessaires à la réalisation des travaux. “Une fois que la mission est sollicitée, je me rends sur place pour une première visite et déterminer si le projet est éligible aux financements publics. Ensuite, j’y retourne pour effectuer ce qu’on appelle des jaugeages, c’est-à-dire évaluer avec le plus de précision possible par des mesures de débit l’ampleur des pertes des canaux. Et donc, en creux, des économies qu’il serait possible de réaliser” explique-t-elle.

Outil de dialogue

L’enjeu est majeur, puisque c’est ce taux de perte qui permet de déclencher l’accès, ou non, aux financements. Elle intervient ensuite en appui technique et administratif pour le montage des dossiers mais aussi parfois, quand il est besoin, directement sur les chantiers auprès des entreprises. “Je crois qu’avec le temps les gens identifient très bien la mission canaux aujourd’hui, ils nous sollicitent un peu au fil de l’eau, au gré des besoins.”
Outre les additions de son tableur Excel où il additionne les économies d’eau réalisées, ce que Jean Bertrand voit aussi de la mission canaux est moins tangible, un bénéfice plus diffus, psychologique même. Et un formidable outil de dialogue. “Les économies d’eau, c’est à peu près, sur cette thématique, le seul sujet qui soit un peu consensuel” relève-t-il. “En 2011, l’émergence de la mission canaux a été permise par le financement de la Région, du Département et de l’Agence de l’eau. Les choses ont évolué depuis et ne subsistent, pour la partie financière, que l’Agence de l’eau et la Chambre d’agriculture, mais le dialogue est permanent avec tous les acteurs et notamment avec les fédérations de canaux d’arrosage, les syndicats mixtes de gestion des eaux, la DDTM et le Parc Naturel Régional” se félicite-t-il.

14 dossiers cette année

La sécheresse a-t-elle eu un impact ? “Les gestionnaires semblent plus sensibilisés maintenant” estime Chrystel Costa, “nous avons peut-être un peu plus de sollicitations ces derniers mois”. Mais la sécheresse a peut-être aussi modifié la dynamique habituelle des canaux. “D’habitude, les canaux sont remis en eau une fois par an, là, cette année, il y a eu plusieurs remises en eau au gré des tours d’eau, cela a peut-être pu créer des infiltrations nouvelles…” De quoi donner tort à Jean Bertrand qui s’attendait, cette année, à un effet possiblement “dépressif”. Bref, un désengagement des gestionnaires.

Mais non, pour l’année en cours, ce sont 14 dossiers qui vont être déposés ! De quoi envisager une forte progression des investissements de modernisation pour la décennie en cours… “Gloria est venue mettre un peu la pagaille dans ces projets parce qu’il y a eu énormément de dégâts sur le réseau des canaux des Pyrénées-Orientales. Il a fallu que nous mobilisions 4 M € rien que pour cet événement et ses conséquences ! Cela devrait porter les investissements totaux aux alentours de 20 M € pour cette décennie” calcule-t-il. D’autant que les premiers investissements commencent à dater et qu’il faudra peut-être commencer à y revenir dans les années qui viennent.

17 M €

Au-delà de la constitution des dossiers pour le financement du cuvelage, en béton ou par la pose d’une géomembrane, d’autres travaux sont suivis par la mission canaux qui peuvent aller de la mise sous pression des réseaux à la pose de vannes automatiques pour simplifier la gestion de l’écoulement de l’eau et même jusqu’à la formalisation de la mise en place de tours d’eau. “Sur les 180 ASA du département, nous sommes le département de France qui compte le plus d’ASA et de canaux gravitaires, toutes n’ont pas les mêmes moyens que les gros canaux comme ceux de Perpignan ou de Corbère. Pour les petits canaux, la mission va gérer l’ensemble des dossiers à monter quand les « gros » canaux sont, à bien des égards, plus autonomes dans la gestion de leurs dossiers et projets. Mais nous avons aussi une forte mobilisation des acteurs autour des canaux, lors de la dernière décennie, je le disais, ce sont 17 M € d’euros qui ont été investis et, sur cette somme, 3,40 M € sont sortis de la poche des ASA et donc majoritairement de celle des agriculteurs…”

Pas suffisant

Indispensable, cette gestion des canaux et la réalisation d’économies ne peuvent pas être la solution miracle aux problèmes posés par le changement climatique. “Le meilleur exemple nous est donné cette année par la vallée de l’Agly. C’est un secteur qui a investi 2,50 M € sur 20 dossiers et est parvenu à économiser plus de 6 M m3 d’eau et on a bien vu cette année que c’est malheureusement loin d’être suffisant” ajoute-t-il. De quoi plaider, en plus des économies d’eau, à poursuivre pour le développement de tout le panel de solutions à disposition et la Chambre d’agriculture de citer pour exemple les adaptations variétales, l’optimisation des pratiques agricoles, la réutilisation des eaux usées, le maillage des réseaux d’irrigation et l’optimisation et le développement du stockage de l’eau.

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