Lettre à Roselyne Bachelot [par Jean-Paul Pelras]

Madame,
pour rédiger ma petite correspondance hebdomadaire, j’avais, dans un premier temps, jeté mon dévolu sur Manuel Valls, ancien Premier ministre expatrié du côté des Ramblas où, de toute évidence, il n’a pas trouvé de quoi satisfaire son ego surdimensionné, puisqu’il revient en France comme chroniqueur sur RMC et BFMTV. Du coup, je suis allé musarder sur le site de ces deux médias où, parmi le petit personnel, je suis tombé sur Emmanuel Lechypre, “journaliste”, qui déclarait le 29 juin : “On vous vaccinera de force, moi je vous ferai emmener par deux policiers au centre de vaccination. Faut aller les chercher avec les dents et avec les menottes s’il le faut […] Les non-vaccinés, ce sont des dangers publics, donc j’ai une démarche très claire : je fais tout pour en faire des parias de la société !” De fil en aiguille, j’ai croisé la route du nommé Jean-Christophe Lagarde, député et président de l’UDI, comprenez “Union des démocrates et indépendants”, favorable à une vaccination obligatoire tous azimuts assortie de contrôles et de “punitions” à l’égard de ceux qui refuseraient d’obtempérer. Lagarde, ancien maire de Drancy qui citait Goebbels pour répondre au journal Le Point après la diffusion d’un article intitulé “Communautarisme, pactes avec des voyous ou des islamistes – Ces élus qui ont vendu leur âme”.
Trois individus qui, à bien y regarder, ne m’inspiraient rien de bon.

Et puis il y eut cette petite pique, Madame la ministre de la Culture, que vous avez adressée à Marion. La Môme ayant dénoncé le manque de considération du gouvernement à l’égard des artistes : “On s’est senti abandonné dans cette crise. On était regardé comme pas totalement utile…”
“Je ne peux pas du tout laisser dire cela. Ce n’est pas que c’est injuste, c’est faux. Aucun pays n’a fait autant que la France pour le monde de la culture…” lui avez vous rétorqué in petto, alors que l’actrice s’apprêtait à gravir les marches du Festival de Cannes équipée d’une robe Chanel et entourée de gens qui n’avaient, de toute évidence, pas eu à souffrir de ladite crise.
Et bien, Roselyne Bachelot, bien que vous ayant égratigné par le passé dans quelques correspondances, sur ce coup-là, je l’avoue, vous méritez un satisfecit. Quitte à passer pour un réactionnaire rétif au labeur de certains troubadours, je trouve le mouchoir de soie quelque peu inapproprié aux larmes d’une corporation qui pense que la promotion du rêve passe aussi par celle de la compassion.

Le faste de la cérémonie où, gitant probablement au-dessus des lois, certains festivaliers (dont vous faisiez partie…) se sont largement affranchis du port du masque et des gestes barrières, contraste en effet quelque peu avec cet “abandon” dont les artistes furent soi-disant victimes. D’autres secteurs d’activités, probablement moins “éclairés” et ne pouvant bénéficier du prisme des projecteurs pour se lamenter, ont été contraints de baisser pavillons et rideaux sans pouvoir, de surcroît, célébrer leurs faillites, une coupe à la main, devant le Majestic, en robe du soir et talons hauts.

Puisqu’il faut raison garder, votre réponse était donc, Madame la ministre, appropriée. Le ruissèlement de l’argent public étant nécessaire lorsqu’il arrive jusque dans l’escarcelle des déshérités, y compris lorsqu’il s’agit des professionnels du milieu culturel. Mais pas nécessairement lorsqu’il vient alimenter le compte en banque de celles et ceux qui vivent dans la démesure, quelque part aux limites de la dignité, à l’aune de leur prétendue notoriété.

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