Les fruits de la honte !
Semaine pléthorique sur le front de l’info où nous ne savons plus où donner de la plume, entre l’incendie de Notre Dame la semaine dernière (voir nos chroniques en page 5), Jupiter qui profite de l’enfumage pour reporter son allocution sur le grand débat, puis qui revient en pharaon le mardi pour reconstruire, compatir et repartir sans rien dire, les médias qui nous annoncent en cœur une hausse du revenu des ménages de 850 euros, une nouvelle journée de solidarité préférée au retour de l’ISF, ou, entre autres joyeusetés, les eurodéputés qui se quittent sur “une ambiance de fin de colo”.
C’est d’ailleurs à ces braves parlementaires bruxellois que j’ai décidé de m’adresser aujourd’hui alors que se tient, à Perpignan et comme chaque année, le salon Medfel. Comprenez Salon international des fruits et légumes de la Méditerranée ou quelque chose dans le genre. Sans revenir sur la genèse de cette manifestation à laquelle je ne me rendrai pas cette année, car je dois ménager mes artères et mes crampes d’estomac, disons que le lieu permet à des importateurs espagnols, algériens, égyptiens, tunisiens ou marocains de venir faire leurs emplettes en usurpant nos marchés traditionnels. L’art de perdre à domicile en quelque sorte, avec la bénédiction de quelques officiels qui, au moment de couper le ruban, semblent tout à coup ignorer certains détails.
Détails d’importance puisque, lorsqu’ils iront serrer quelques louches sur le stand marocain en dégustant la traditionnelle brochette de tomates cerises bicolores, ils devront avoir une pensée pour ces salariés exploités, moyennant 5 euros par jour, au Sahara occidental par les sbires du royaume chérifien. Tout comme, en stationnant devant le pavillon italien, ils devront s’émouvoir du sort de ces Maliens qui perçoivent 30 euros pour 10 heures de travail en récoltant des tomates dont la vente sur le marché européen alimente les bénéfices des réseaux mafieux.
L’exploitation de l’homme par l’homme et petits arrangements géopolitiques
Et que dire de ces fraises ramassées en Andalousie pour 4 euros de l’heure dans un contexte où les charges sociales sont surtout acquittées les deux derniers jours de février… Liste non exhaustive de petits arrangements géopolitiques où l’exploitation de l’homme par l’homme ne vient pas couper l’appétit de celles et ceux qui bâtissent pourtant leurs testaments politiques sur l’entraide et la solidarité. Mais aussi sur cette notion d’environnement qui survient systématiquement dès qu’il s’agit de nous renseigner sur ce que nous devons manger, avec des normes franco-françaises draconiennes qui impactent inévitablement notre compétitivité.
Là encore, en arpentant les allées de ce temple de l’importation, nos chers représentants peuvent mesurer les distances parcourues par ces denrées venues du Moyen-Orient, alors que nous “avions” in situ le potentiel suffisant pour répondre à la demande. Alors que, au lieu de soutenir nos producteurs français, les politiques et les technocrates qui leur servent de portes-pipes ont préféré ouvrir les vannes suscitant ainsi les compétitions déloyales et mortifères que l’on sait. À quelques semaines des européennes si le répéter ne sert plus à rien, au moins pour le principe, pourquoi s’en priver !