Inflation : le grand déni ! [par Jean-Paul Pelras]

Bien sûr, il y a les chiffres officiels, les prix à la consommation qui ont augmenté de 2,2 % en moins d’un an, une inflation en hausse de 1,9 % sur la même période et, nous dit-on avec triomphalisme, une croissance à 6 points, sachant qu’elle avait dégringolé de 8 en 2020. Donc retour à la case départ, ou presque. Ou comment nous entortiller avec des chiffres qui scintillent sur les décombres d’une crise colmatée par la planche à billets et par les dettes historiques que les générations futures viennent de contracter.

Car nous en sommes là, dans ce pays où les lanternes brillent moins que les vessies, où le politicien tient davantage du petit magicien que du grand tacticien. Résultat des courses, nous nous contentons, résignés, de hausser les omoplates dès que le présentateur du journal de 20 h ou celui du quotidien local sponsorisé, nous balancent une rafale de prévisions censées concerner notre pouvoir d’achat, le contenu de notre panier, notre facture de gaz ou d’électricité.
Un peu comme si l’augmentation était devenue une fatalité, un pis-aller avec lequel nous allons devoir composer. Un peu comme s’il fallait accepter l’inflation en apportant notre contribution aux retombées économiques d’une pandémie planétaire.
Nous voilà punis par le porte-monnaie qui va devoir endosser la hausse du prix des matières premières. Punis car, transition écologique oblige, l’augmentation du prix du droit d’émission de CO2 et celle du gaz a, par ricochet, fait flamber celui de l’électricité. Punis car nous sommes éternellement condamnés à verser notre dime à “l’environnement”. Punis car les taxes n’en finissent plus de flamber sur les carburants. Punis car nous sommes de plus en plus dépendants des importations dans un contexte où le déficit commercial français atteint cette année 67,89 milliards d’euros, alors que nos voisins allemands affichent un excèdent de 215,6 milliards. Punis et embobinés par un déni de décroissance et de circonstance. Celui qui oblige le pouvoir à minimiser la situation à 8 mois des élections. Punis mais conscients car c’est nous qui payons, car c’est nous qui nous rendons à la boîte aux lettres avec de plus en plus d’appréhension, car c’est nous qui constatons d’un mois sur l’autre les majorations sur l’alimentation, les vêtements, l’énergie, les transports, les impôts… Les choses de la vie.

Une société “vache à lait”

Le président de la République va-t-il s’exprimer sur cette question, sachant que le Premier ministre a déjà évoqué l’élargissement du chèque énergie visant à soutenir les 5,5 millions de ménages qui en étaient bénéficiaires ? Un coup de pouce à 100 euros pour certains. Et pour les autres ? Pour tous les autres, rien. Encore une fois, rien ! Un effet d’annonce qui tient du bricolage et ne répond pas aux attentes d’une société “vache à lait”. Celle qui contribue à la solidarité nationale sans jamais être considérée.

Depuis la fin des Trente glorieuses, les gouvernements successifs ont cru que la corde était solide, que la capacité d’indignation pouvait être jugulée avec une grande distribution capable de contenir l’inflation par le jeu du moins disant. Ce moins disant qui arrive forcément de l’autre bout du monde et précipite notre perte de compétitivité. Car, et c’est sur ce point qu’Emmanuel Macron devrait peut-être s’exprimer, notre capacité à résister aux aléas économiques dépendra de celle à maintenir et à développer notre agriculture, notre industrie, notre artisanat, nos commerces, tout ce qui génère une induction, tout ce qui produit et ne dépend pas systématiquement des subsides de la Nation.

Et voilà que s’invite à nouveau l’éternelle question : faut-il soutenir l’entreprise pour créer de l’emploi, du pouvoir d’achat, de la plus-value ? Ou bien la ponctionner pour redistribuer l’impôt qui permettra d’acheter au prix fort ce que bientôt nous n’aurons plus !

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