Flambée du prix des matières premières : le piège se referme ! [par Thierry Masdéu]
Métaux, bois, plastiques, cartons, terres rares, etc. La pénurie de matières premières non alimentaires constatée ces dernières semaines risque de ralentir, voire de stopper temporairement plusieurs secteurs d’activité, y compris dans le secteur agricole.
Annoncée depuis déjà quelques mois, cette nouvelle crise, qui s’ajoute à celle de la Covid-19 dont elle est en partie issue, mais pas que, provoque une envolée des prix. L’impact sur le coût final de production n’est donc pas négligeable et bon nombre de dirigeants, piégés, ne savent plus sur quel pied danser pour répercuter ces hausses sur les prix de vente. D’autres conséquences sont toutes aussi déstabilisantes concernent les délais d’approvisionnements et le coût de l’acheminement. En particulier via la reprise du fret maritime, où la fluidité des activités portuaires, qui n’est pas encore stabilisée, génère une indisponibilité de containers. Ce qui, en quelques mois, a suscité une augmentation des tarifications de plus de 100 % suivant les cas. Ce déséquilibre résulte principalement de tensions à l’international entre l’offre et la demande, en particulier pour la Chine qui, en position de quasi-monopole sur certaines matières premières, arbitre et priorise le développement de son marché intérieur plutôt que celui des exportations.
Selon la Confédération des PME, les économies dépendantes expertisent avec l’appui du gouvernement la création d’une centrale d’achat regroupant des industriels français pour la commande de certains matériaux. L’espoir fondé dans cette démarche réside sur le fait que le poids d’une telle entité pourrait permettre d’améliorer la sécurité d’approvisionnement et d’avoir un prix garanti en cas de crise. Pour l’heure, de nombreuses répercutions se font sentir dans tous les secteurs d’activité comme celui de l’emballage (plastique, carton, polystyrène, bois, etc.) qui, après avoir boosté son chiffre d’affaires lors des confinements, grâce à l’explosion des livraisons à domicile et du e-commerce, accuse de plein fouet la pénurie des matières premières, même recyclées.
Hausse sur le carton, sur l’énergie…
Une situation volatile qui inquiète l’économie du conditionnement des produits alimentaires comme les conserveries ou les fruits et légumes qui redoutent pour la saison prochaine de nouvelles majorations ou ruptures de stock. “La hausse de prix la plus significative concerne le carton où nous avons déjà eu une augmentation de 20 %. Et au rythme qui se profile sur les coûts des matières premières, nous craignons d’autres hausses d’ici la fin de l’année !” témoigne, perplexe, Bruno Vila, président de la coopérative Rougeline. “En terme de disponibilité, vu que nous anticipons largement en amont les commandes, nous avons été livrés à temps. Toutefois si, pour le carton ondulé, l’approvisionnement ne semble pas pour le moment être affecté, la disponibilité est beaucoup plus tendue pour le carton compact”.
Même constat à la coopérative Ille Fruits où son directeur, François Bes, ne cache pas ses interrogations, soulignant que la nouvelle norme applicable en mai 2022, qui mettra fin à l’utilisation des emballages plastiques pour tous les conditionnements en dessous de 1,5 Kg, viendra aussi, avec la substitution par des barquettes carton, surenchérir les coûts de productions. Une accumulation de charges à laquelle la flambée des matières premières énergétiques n’est pas en reste. “Pour le gaz, si l’on fait une moyenne sur les quatre dernières années, on constate une augmentation de 250 % sur le prix de la molécule !” Dénonce avec amertume le président de Rougeline. “Et le coût énergie bois pour les chaudières biomasse est en augmentation de 30 % !” Des charges d’exploitation difficilement répercutables sur les prix de ventes qui font craindre une amputation sur les marges pour faire face aux marchés de gré à gré.