Carton rouge, Monsieur le président ! [par Dorothée Boyer Paillard]
Du haut de sa tour dorée, le président a souhaité, à une partie des Français, pour ses vœux : “j’ai très envie de les emmerder”.
Carton rouge, Monsieur le président. Vous qui avez pu bénéficier de leçons singulières dès 15 ans, âge dépassé du stade anal des bébés, avec une professeure particulière de français, ou une professeure de français particulière, vous êtes décevant.
Selon le CNRTL, “emmerder” au sens propre se définit comme : “couvrir, souiller d’excréments”. Peut-être fallait-il le comprendre au sens figuré pour “importuner, déranger ou contrarier fortement”. Mais pourquoi vous donner tant de peine à tenir les non vax pour des êtres insignifiants si vous leur donnez autant d’importance ? Le zéro pointé vous menace Monsieur Macron, surtout par vos études en lettres. Non, vous ne redorez pas la fonction présidentielle.
Il eut été opportun de fleurir votre vocabulaire, avec, que sais-je, par exemple, les verbes “ennuyer”, “embêter”, “barber”. Vous seriez passé à un stade supérieur avec le verbe “turlupiner”, que nous aurions compris comme “agacer” ou “tourmenter” à défaut du sens premier de “se moquer de”, voire même dans une vieille acception “faire des plaisanteries de mauvais goûts” et par analogie “faire des pitreries”. Vous auriez pu nous éduquer avec un terme tel que “tartir”, verbe intransitif qui ne signifie rien d’autre que “déféquer”, ou sous le sens “faire tartir”, “l’ennuyer”. Trouver en le synonyme d’“emmerder” le verbe “enculer” (dont Vian disait que, pour les mouches, on pouvait l’employer avec ou sans consentement), aurait été de très mauvais goût, je vous le concède, puisque vous n’auriez pas pu pratiquer de “coït anal”, ni “posséder charnellement” 6 millions de Français, cela aurait frisé l’indécence et ne serait pas politiquement correct de surcroît.
Alors que vous auriez pu atteindre le “sublime”
“Emmouscailler” eut été déjà plus distingué, nous l’aurions compris comme bien évidemment “ennuyer” ou encore “embêter”, mais par “emmouscaillement” vous auriez atteint le sublime : “les événements cascadaient (…) depuis lundi, jour où avaient débuté tous ces emmouscaillements” (A. Simonin, Touchez pas au grisbi, 1953). Avec “embrener” vous éleviez le débat car outre les “salir d’excréments”, si vous y aviez adjoint “dans quelque affaire”, alors vous faisiez une belle leçon de morale en soulignant que ces Français “s’engageait mal à propos dans une vilaine affaire”. Il est vrai que c’est un terme que vous ne pouviez employer puisque “Ah ! Les lieux de théâtre ! Ces lieux cent fois plus sales, plus embrenés que les chiottes des quais” (Goncourt, Journal, 1889, p. 933).
“Emmieller” eut été plus doux, tout dépend de la dégustation du miel. Qu’allez-vous imaginer, je n’emmielle nullement Monsieur Macron de reproche, laissons l’emmiellure assouplir les sabots des chevaux en cas d’enflure. “Conchier” eut été amusant mais “incaguer”, “couvrir d’excréments” les non vax, les “traiter avec mépris” eut été à votre hauteur. Reconnaissez seulement qu’avec votre niveau de français vous auriez pu souhaiter aux Français de les “esmerder” de cette “merdaille”, ou cette “merderie”, ce “merdier” voire cette “merdeuseté” créée par le “merdereau”, afin de les “libérer de la saleté” de cette “troupe de gens méprisables, canaille, racaille” ou cette “chose de peu de valeur”, ce “lieu rempli d’excréments”, voire cet “état de ce qui est merdeux” créée par l’“excrément” si ce n’est au sens figuré le “blanc-bec, jeune homme insupportable”.