Arnaud de Villeneuve : la prison à côté de la cave ? [par Yann Kerveno]

Le projet de nouvelle prison pourrait voir le jour à Rivesaltes à proximité des installations de la cave coopérative.

“Tout s’est fait très discrètement, nous n’avons été mis au courant que lors d’une réunion à la Chambre d’agriculture
au mois d’octobre” annonce Brice Cassagnes, président de la cave coopérative. “Nous avons alors contacté l’administration qui s’occupe du patrimoine immobilier de la cave qui nous a clairement laissé entendre que c’était décidé, plié, que rien ne changerait au projet…” Le projet ? C’est donc la construction de la nouvelle prison de Perpignan sur une parcelle mitoyenne, des installations de la cave, sur une emprise, hors voirie, de 18 hectares dont 14 pour les bâtiments. À l’endroit même où Ikea avait envisagé de s’implanter avant de renoncer, le tout sur une zone de 70 hectares promise depuis longtemps à un hypothétique développement économique. Pour Brice Cassagnes, c’est un projet qui va venir, d’une part, bouleverser l’organisation de la cave et, d’autre part, ne sera pas forcément des plus confortables pour les occupants de la prison. “Il y a plusieurs problèmes qui se posent si le projet reste en l’état. Le premier, c’est que l’emprise de la future prison coupe tous les accès à la cave par les traverses. Cela implique que nous devrons revoir toutes nos circulations, en particulier celles liées aux tracteurs et aux vendanges.”

Une industrie

Sans compter que l’accès à la cave serait aussi emprunté par les véhicules venant à la nouvelle prison, “soit entre 400 et 450 véhicules par jour” précise-t-il. Autre problème qu’il pointe du doigt, celui de la fréquentation des abords… “On le sait, avec l’expérience de Perpignan Sud, la présence d’un établissement pénitentiaire attire pas mal de monde dans les abords. Or, nous avons une partie de nos installations qui sont à l’extérieur, en plein air… Il va falloir aussi que nous sécurisions fortement notre site…” Placée à l’Ouest des installations de la cave, entre la cave et l’autoroute, la prison serait de plus à toute proximité de ces installations extérieures, cuvier, groupe de froid, station d’épuration et surpresseurs, qui sont générateurs de bruits importants, “une cave, c’est une industrie” souligne-t-il. Sans même parler des odeurs de la station.

Ficelé ou non ?

Mais au delà de ces objections, les vignerons de Rivesaltes ne comprennent pas pourquoi le projet est placé juste à côté de leurs installations alors que la seule zone de réserve foncière à proximité s’étale sur 70 hectares au total… Sans parler du préjudice potentiel d’image… “Nous produisons 3,2 millions de cols par an, dont plus de la moitié est vendue dans le département.” Pour lui, la solution idéale serait de déplacer le projet de nouvelle prison de l’autre côté de l’autoroute, là ou 35 hectares de réserves foncières constituées par la Région sont aussi disponibles. Déplacement qui aurait aussi pour vertu d’épargner les quelques vignes du secteur qui n’ont pas encore été arrachées. En attendant, difficile d’y voir vraiment clair. “D’un côté, l’administration nous explique que le projet est ficelé et qu’il n’y aura pas d’aménagements, de l’autre, le préfet nous explique que ce n’est pas encore complètement abouti… Qui croire ?”

Et les lézards, ils ont disparu ?

On se souvient que le distributeur suédois Ikea envisageait de s’implanter, voici quelques années, sur ce même secteur du Mas de la Garrigue. Retardé pendant de longs mois, le projet avait buté en particulier sur la présence, dans la zone considérée, du lézard Ocellé. Ce lézard, le plus grand d’Europe, fait partie des sept espèces de reptiles menacées d’extinction. Ikea avait finalement renoncé à s’implanter à Perpignan. Mais on peut s’interroger alors. Si le distributeur n’a pu s’implanter à cause du lézard, la prison le peut-elle ? “Je crois que la gestion de ce type de dossier est différente” avance Brice Cassagne “quand il y a une déclaration d’utilité publique, les choses peuvent se passer différemment…” Mais un autre écueil a surgi en la personne d’un couple d’oiseaux, des œdicnèmes criards, découverts sur le futur site de la prison. Moins en danger que le lézard, l’œdicnème criard est classé en “préoccupation mineure” sur l’échelle des statuts de conservation de l’IUCN…

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