Des questions mais encore peu de réponses tangibles
Marc Fesneau et Agnès Pannier-Runacher, dont c’était la « première » sortie officielle dans son nouveau rôle de ministre déléguée, ont passé quelques heures dans les Pyrénées-Orientales, le 15 février. Les sujets ne manquaient pas.
« On a l’impression qu’il y a la volonté de faire avancer les choses, si le ministre s’est déplacé jusqu’ici c’est parce qu’il y a une raison » reconnaissait Guy Ferrer, vigneron concerné par le projet de retenue collinaire des Aspres porté par la Communauté de communes. Même si le doute n’est jamais loin : « après 15 ans de petits blocages en petits blocages, d’enquêtes, de problèmes administratifs, de normes… Je n’y croirai que lorsque je verrai l’eau couler ! » Après le détour par les Aspres, les deux ministres étaient attendus au congrès de la Fédération nationale des producteurs de fruits à Perpignan. Pour un exercice peu courant : un dialogue avec la salle. Toutes les questions n’avaient pas été communiquées à l’avance au cabinet du ministre.
Pendant plus d’une heure et quart, Marc Fesneau et Agnès Pannier-Runacher furent invités à répondre à des sujets très terre à terre et forts divers. Depuis les assurances, l’indemnisation de solidarité nationale et les défauts de la moyenne olympique sur laquelle le ministère planche sur un rallongement à 8 ou 10 années pour mieux tenir compte des aléas jusqu’à l’épidémiosurveillance en passant par l’extension réclamée du dispositif TO-DE à l’ensemble des salariés agricoles. Avec là, une différence d’appréciation majeure sur le coût d’une telle mesure soulignée par le ministre, 186 M€ selon la production, 1 milliard selon les services de l’État et le risque que l’exonération soit perçue comme une aide déguisée…
De l’eau de l’eau
Il fut aussi question du plan pollinisateur, de Drosophila suzukii et de l’inefficacité des moyens de lutte alternatifs testés pour se passer des insecticides, plus globalement de la question phyto, de la « synchronisation » entre l’Anses française et l’Efsa européenne, mais aussi de la reconnaissance mutuelle des produits de biocontrôle entre pays européens, la loi Ager sur les plastiques d’emballages et une demande d’abrogation du décret d’application, rejetée par le ministre contre la promesse d’une mesure pour « sécuriser juridiquement les entreprises ». Jusqu’à la loi sur l’eau, dont Marc Fesneau a admis qu’à l’heure de sa rédaction, elle date de 1993, le changement climatique n’était pas une préoccupation et qu’il fallait peut-être « soulever le capot » pour effectuer quelques réglages.
À l’issue de cette longue conversation, Marc Fesneau a d’ailleurs pris la décision de zapper le discours officiel pourtant préparé, pour se rendre en réunion et aborder plus précisément avec les représentants locaux les sujets de l’actualité de l’agriculture des Pyrénées-Orientales : l’eau et la gestion de la ressource, le couperet des « de minimis » dans des exploitations éreintées par les aléas, l’indice Airbus sur lequel le gouvernement ne semble pas vouloir bouger d’un iota, le fonds viti, l’aide à l’arrachage, l’extension d’Aqua Domitia pour amener l’eau du Rhône jusque dans les Pyrénées-Orientales… « Dossier à propos duquel il s’est montré plutôt favorable mais qui ressort de la compétence de la région » précise Bruno Vila, président de la FDSEA locale. Il reste bien du pain sur la planche.
Yann Kerveno