Délit d’opinion !
Il s’agit de trois décrets publiés le 4 décembre dernier au Journal Officiel, dont les éventuelles retombées n’ont pas échappé au site Next INpact et, dans la foulée, à bon nombre de publications nationales. Tout simplement car ces décrets vont permettre à certains services de l’État de collecter davantage d’informations et de données personnelles. Il sera de toute évidence, pour certaines administrations, possible de ficher, entre autres comportements, pratiques ou orientations, les opinions politiques et les activités sur les réseaux sociaux.
S’il s’agit de débusquer les terroristes et les criminels de tous poils, aucun problème. Car, dans ce cas, ceux qui n’ont rien à se reprocher n’ont, de facto, rien à redouter de ces mesures. Ils ne devraient donc pas être répertoriés dans l’un de ces trois fichiers : “Prévention des atteintes à la sécurité publique” (PASP), “Gestion de l’information et prévention des atteintes à la sécurité publique” (GIPASP) et le fichier “Enquêtes administratives liées à la sécurité publique” (EASP).
Le plus inquiétant réside dans ce petit supplément d’âme qui ne dit pas son nom. Celui-ci vient repérer les opinions en apostille des activités politiques, syndicales ou religieuses. Ces opinions que nous exprimons évidemment dans nos éditoriaux, dans nos tribunes, sur les réseaux sociaux, sur nos messageries et partout où le net tisse sa toile avec ou sans notre consentement. Des méthodes qui ne vont pas sans rappeler celles du fichier Edvige, dont les ambitions, voilà une douzaine d’années, avaient été revues à la baisse grâce aux mobilisations citoyennes qui avaient permis de recentrer les contrôles uniquement sur les activités politiques des personnes et non sur leurs opinions.
Nous n’avions plus confiance, voilà que nous risquons d’avoir peur
Dans le cas présent où sera la jauge ? Jusqu’où le pouvoir va-t-il s’inviter dans notre quotidien, dans notre façon de penser ? À quel moment le délit d’objection ou de subversion sera-t-il caractérisé ? Qui, de l’autre côté du miroir, sera qualifié pour estimer la dangerosité que représente un individu susceptible de gamberger loin des calibrages autorisés ? Est-ce que ce modeste billet, uniquement parce qu’il ose interroger, sera classé au rayon des documents douteux ? Fera-t-il l’objet d’une mention ou d’une annotation sur le redoutable registre des actes séditieux ? Nous n’avions plus confiance, voilà que nous risquons d’avoir peur. Peur d’être contrôlés par un pouvoir qui se prive volontiers du législateur pour décider, qui n’hésite pas à réinstaurer le temps des couvre-feux et des laissez-passer, qui vante l’efficacité des vaccins sans qu’elle soit prouvée, qui distribue des centaines de milliards comme si nous n’allions jamais devoir les rembourser, qui promet le lundi ce qu’il détricote le mardi, qui jongle, à l’aune de ses incohérences, entre suffisance et déni. Autant de grenouillages, autant d’errances qui font que, bien entendu, nous n’avons aucune raison de nous inquiéter, de pressentir, de contester, de discuter ! Du moins, tant que notre démocratie n’aura pas chaviré.