Macron « suffisant », Le Pen insuffisante. (Par Jean-Paul Pelras)

Ce matin dans son éditorial, notre confrère de l’Indépendant en faisant référence à Macron titre « Crédible ». Le Monde et Libé en désignant le Pen affichent respectivement en Une « La stratégie du mensonge » et « Toujours pas crédible ». Quant à BFMTV, la chaine publiait son petit sondage bricolé dans la nuit « Macron convaincant à 59 % contre 39 % pour Le Pen ». La messe est dite. Et, encore une fois, que personne ne s’avise de contredire la pensée médiatique matinale sponsorisée par ce qu’il convient d’appeler désormais le nouveau « programme commun », sous peine d’être, in petto, classé dans le camp du mal. Et pourtant, comment ne pas voir chez le président sortant, arrogance, condescendance et suffisance, voire mépris quand il préfère s’adresser aux journalistes plutôt qu’à son interlocutrice, quand il use d’un ton professoral comme si son adversaire était venue prendre un cours de politique ou d’économie, quand il adopte une posture négligée, les coudes sur la table, penché en avant, la main soutenant le menton, l’air tantôt amusé, tantôt agacé.

Et comment ne pas regretter les occasions manquées de Le Pen qui n’a pas évoqué, ou tout juste abordé, l’affaire McKinsey, Alstom, les deux ans d’incohérences et de privations concernant la crise covid, le cafouillage des masques, des vaccins, des confinements, des chiffres alambiqués, du kilomètre que nous ne pouvions dépasser, des anciens qui sont partis dans la solitude sans que l’on sache qui du virus ou du chagrin est venu les chercher. Oui, que d’occasions manquées lors de ce débat où le sujet du pouvoir d’achat ne fut pas suffisamment abordé, à l’heure où malgré la « ristourne gouvernementale » les prix du carburant recommencent à flamber. Avec, notamment, la question d’une inflation historique dépassant 2800 milliards d’euros que Macron tenta de relativiser, tel Majax finalement, en évoquant la baisse du chômage. Eludée également, la question de la balance commerciale déficitaire à hauteur de 85 milliards d’euros, alors que l’Allemagne affiche un excédent avoisinant 200 milliards. Question posée par Le Pen et ignorée par le locataire de l’Élysée…

Seuls comptent le bilan et la critique du bilan

Rien ou pratiquement rien concernant l’agriculture et, de temps à autres, évoquée par la candidate du Rassemblement National, la question de la déprise rurale qui ne semblait toujours pas concerner le candidat à sa réélection. Lequel préféra soulever l’affaire des emprunts russes pour déstabiliser celle qui lui fit remarquer qu’aucune banque française n’avait voulu lui prêter. Elle aurait pu lui rétorquer que tout le monde n’avait pas eu la chance de travailler chez Rothschild. Là encore, occasion manquée…

Pas un mot sur les petites phrases du quinquennat Macron, quelques rappels sur les gilets jaunes. Et un bras de fer sur la dépense publique qui manquait de convictions avec des protagonistes restés à la surface des chiffres qui se contentèrent de camper sur leurs positions sans décortiquer, pour le Pen, la part des 600 milliards supplémentaires alors que Macron affectait, avec aplomb, la quasi-totalité du déficit à la crise sanitaire.

Parce que, que nous le voulions ou non, c’est Marine le Pen qui fut désignée démocratiquement pour s’opposer à Macron lors du second tour, nous espérions de sa part un peu plus de combativité sur les sujets de société qui ont marqué ces cinq dernières années.

Car, à bien y regarder, peu importe la couleur politique de l’opposant, seuls comptent pour les électeurs, à ce moment-là et car l’occasion ne se représentera pas d’ici 5 (ou 7) ans, le bilan et la critique du bilan.

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