Fabienne Bonet : « Tout est bien trop long »

La présidente de la Chambre d’agriculture des Pyrénées-Orientales se demande s’il y a une réelle volonté d’aider le département à sortir de l’ornière.

Qu’en est-il du plan « agriculture méditerranéenne » ?
Il était prévu au départ pour trois départements, les Pyrénées-Orientales, l’Hérault et le Gard et maintenant il va de PACA jusqu’à l’Aquitaine et porte sur 18 départements, alors que l’enveloppe est la même et qu’il n’y a pas de critères spécifiques pour les trois départements de départ. Et il ne concerne pas les problématiques hydrauliques qui ont un fonds dédié. Par ailleurs, ce « fonds hydraulique » n’est doté que de 20 ou 30 millions d’euros pour toute la France, qu’est-ce qu’on peut faire avec ça ? Les autres financements passent par les Agences de l’eau qui refusent de sortir de leur règle stricte économie/substitution. Mais c’est absurde de nous demander de faire des économies quand il n’y a pas d’eau ! De qui se moque-t-on ? Comment donner de la visibilité aux agriculteurs pour la gestion de leurs exploitations ?

Quand on suit ces dossiers, on a presque l’impression que tous les interlocuteurs concernés font preuve de peu d’empressement, pour ne pas dire de mauvaise volonté…
Nous suivons tous les dossiers en cours, les demandes aux impôts, à la MSA, les soutiens d’urgence à la viticulture et à l’élevage, le soutien aux ASA, la création d’un RSA « agricole » pour ceux qui ont tout perdu cette année… Mais tout est très très long. Comme si la notion d’urgence n’était pas perçue. Les politiques locaux nous soutiennent mais cela ne va pas plus vite. Alors c’est vrai qu’à présent, les agriculteurs se posent la question finalement, est-ce que notre territoire est aujourd’hui voué aux cactus et au photovoltaïque ? On a vu pourtant ces deux dernières années que nous arrivons à travailler quand nous avons un peu d’eau, on parvient à produire des pêches, des tomates, des concombres. Quand on regarde à côté de chez nous, en Espagne, les choses vont plus vite, ils ont tiré un tuyau pour amener l’eau de l’Ebre à Barcelone. Et chez nous, ce que l’on entend, c’est que ce n’est pas écologique. Nous en sommes à nous demander s’il ne faudrait pas travailler le dossier de l’eau du Rhône avec les Catalans, comme c’était prévu à l’origine, cela irait peut-être plus vite et on aurait peut-être plus de financements ? Le Rhône, ce sera dans dix ans au mieux, mais au moins qu’on nous dise rapidement si ça se fait ou pas ! Mais c’est comme si nous ne parvenions pas à nous faire entendre… Alors que les enjeux ne sont pas seulement agricoles, ils sont aussi sociaux, économiques, environnementaux et paysagers…

Et pour la vigne ? Le dispositif arrachage a ouvert cette semaine…
Cette vendange aura probablement été le coup de grâce en Roussillon. On ne sait pas ce que va donner le plan d’arrachage tel qu’il est conçu et proposé. Est-ce qu’il est suffisamment doté ? En privilégiant l’arrachage total, il ne va pas aider ceux qui ont besoin de se restructurer en arrachant une partie de vignoble. Cela aurait été aussi intéressant que la SAFER puisse faire du portage foncier pour mettre des vignes en réserve, parce qu’on va arracher des parcelles avec du potentiel. Et on ne sait pas ce qu’il va advenir des 250 millions de la deuxième tranche d’arrachage différée sollicitée auprès de l’Europe. Là encore, il aurait été intéressant qu’on puisse avoir un peu de visibilité en amont afin de pouvoir agir à l’échelle du département sur l’organisation du vignoble.

Propos recueillis par Yann Kerveno

Des pertes par millions

La Chambre d’agriculture a chiffré les pertes enregistrées par les différentes filières cette année dans le département des Pyrénées-Orientales. Elles s’établissent à 18,50 M€ en bord de champ et 37 M€ au stade expédition ; 0,50 M€ et 1 M€ pour le maraîchage ; 55,35 M€ et 106 M€ pour la viticulture 0,50 M€ et 1 M€ pour l’élevage… Les pertes de fonds sont estimées à 1 M€ pour l’arbo et 50 M€ pour la viticulture.

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