Changement climatique : urgence à comprendre ce qui se trame [par Yann Kerveno]

Les dix dernières années ont été très complexes à gérer sur le plan climatique. Les prochaines ne le seront sans doute pas moins. Le domaine Lafage essaye de prendre les devants.

Au domaine Lafage, l’adaptation au changement climatique est devenue un objet en tant que tel depuis l’année dernière avec la mise en place d’un projet de recherche et développement dédié à cette question. “Notre viticulture méditerranéenne est particulièrement sensible au changement climatique alors, pour y parer, nous nous sommes entourés de partenaires, de Montpellier SupAgro à la Chambre d’agriculture en passant par la DDTM et d’autres experts” détaille Pierre Audouard, régisseur en charge du projet pour le domaine. “Mais avec une approche peut-être un peu différente puisque nous avons décidé de partir de nos vins, de nos profils aromatiques, pour déterminer la meilleure manière de préserver la vigne. En gros, nous ne réfléchissons pas à adapter le vignoble au changement climatique mais plutôt à voir comment nous pouvons nous en sortir en partant du marché et de la demande des consommateurs” précise-t-il. Comment assurer la pérennité des productions et de la réponse au marché en somme.

Écophysiologie

Pas question donc de mettre des ombrières sur toutes les vignes ! “Ce sont des installations qui peuvent fonctionner à petite échelle, on voit mal le département ainsi couvert” repousse-t-il. “Non, nous allons plancher sur des solutions réalisables à court et moyen terme”. Parmi les pistes ouvertes, Pierre Audouard cite les sols et tout ce qu’il est possible d’imaginer pour en augmenter la résilience, la régénération, les couverts végétaux, la matière organique. “Nous allons aussi beaucoup nous intéresser à l’écophysiologie de la plante, l’année 2021 nous a permis de réaliser toute une série de mesures pour commencer ce travail. C’est certes une année étrange pour en faire une année zéro mais c’est comme ça” sourit-il.

Il sera aussi question de la gestion de l’eau et de l’irrigation. “C’est clairement une problématique cruciale, il n’y en aura pas pour toutes les zones…” D’où l’intérêt d’avoir une connaissance fine des réactions de la plante à l’eau ou au stress hydrique. “En parallèle, nous allons nous pencher également sur les porte-greffes, même si c’est un peu bloqué en France sur ce sujet, et regarder ce qui se fait à l’étranger, voir ceux qui présentent des résistances à la sécheresse ou à la chaleur…”

Feuillage

Autre voie de résilience souvent invoquée pour se prémunir des effets délétères de la chaleur et de la sécheresse, le feuillage et sa gestion. “C’est une question complexe, ces dernières années nous ont bien appris qu’il fallait conserver du feuillage pour mettre les grappes à l’abri du soleil, mais cela va aussi au-delà du seul feuillage, nous allons aussi nous pencher sur la taille. On sait par exemple qu’avec la taille en gobelet, le raisin est plus à l’abri, le problème c’est que c’est difficilement mécanisable… Alors nous réfléchissons, entre autres, à un « gobelet palissé… » et au-delà, à la structure de la plante, la densité des parcelles…” Une attention particulière sera également apportée à la biodiversité dans les parcelles. C’est aujourd’hui que se dessinent les vignobles qui pourront s’adapter au changement climatique.

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