Aujourd’hui ils interdisent les pancartes. Demain interdiront-ils les journaux ? (Par Jean-Paul Pelras)

« Tout va bien dans le meilleur des mondes (ou 1984, je ne sais plus) », ou encore « Je veux partir en retraite avant l’effondrement climatique ». Voilà ce que disaient les pancartes accrochées au balcon d’un couple donnant sur le foirail de Pau où Emmanuel Macron venait, vendredi, inaugurer le nouveau centre culturel. Un message qui n’avait rien d’injurieux, qui ne menaçait pas la sécurité du chef de l’Etat, qui n’avait rien de complotiste, de réactionnaire, de fasciste, de poujadiste … ou de toutes autres tendances de plus en plus facilement utilisées ces temps-ci dès qu’il s’agit de designer ceux qui, même pacifiquement, osent contester, douter, s’exprimer…

Et pourtant, comme le relatent nos confrères de la République des Pyrénées, les CRS équipés d’un badge se sont introduits dans l’immeuble, ont menacé de défoncer la porte de l’appartement avec un bélier et ont confisqué le dit écriteau avant de relever l’identité des propriétaires et d’attendre sur place que le Président de la République entre sur le foirail. L’avocat du couple a, dans la foulée, dénoncé « une atteinte à la liberté d’expression garantie par l’article 10 de la Convention Européenne des droits de l’homme »  

La liberté d’expression, une formule souvent galvaudée depuis quelques temps, de cette période où l’on nous empêchait de déambuler au-delà d’un kilomètre à ce 49-3 que le pouvoir ne tardera pas à dégainer pour réduire à néant les velléités de l’Assemblée, en passant par tout ce que la presse largement subventionnée préfère ne pas montrer. Cette presse, ces éditorialistes tenants de quelques messages soigneusement calibrés, qui devraient se méfier car les mots interdits sur les pancartes aujourd’hui pourraient l’être demain dans nos journaux. Car, si dire « Je veux partir en retraite avant l’effondrement climatique » constitue un délit, qu’en sera-t-il de notre démocratie le jour où les gardes du cardinal viendront visiter nos rédactions pour lire, vérifier et corriger ce que nous avons écrit ?

Jean-Paul Pelras

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