Steaks végétaux : le “nouveau fermier” sera un laborantin milliardaire (Par Jean-Paul Pelras)

Xavier Niel, principal actionnaire d’Iliad (Free), 253e fortune mondiale, Jacques Antoine Granjon, fondateur de Veepee (ex-Vente privée), Marc Simoncini, fondateur du site de rencontre en ligne Meetic. Trois hommes d’affaires qui ont soutenu en juillet dernier le référendum d’initiative partagé lancé par le journaliste Hugo Clément. Un RIP concernant la cause animale qui doit obtenir le soutien de 185 parlementaires et recueillir à minima 4 700 000 signatures citoyennes pour qu’une consultation publique puisse être déclenchée. Environ 140 parlementaires et 700 000 citoyens auraient, à ce jour, paraphé le document.
Xavier Niel, donc, qui vient de lancer une start-up baptisée, non sans une certaine provocation à l’égard de l’élevage conventionnel : “Les Nouveaux Fermiers”. Le site internet dédié à cette entreprise précise : “Nous réinventons la viande à partir d’ingrédients végétaux naturels et locaux pour mieux nourrir la planète”. Quant au catalogue, il nous indique comment se procurer ladite victuaille (steaks, aiguillettes, nuggets…) en ligne, au restaurant ou en magasins.

Vers un grand écart syndical
Précisons également qu’il n’y a pas que du côté de la “tech” que l’on se presse au portillon pour produire de la viande végétale. Le groupe agro-industriel français Avril et le hollandais Royal DMS lancent un projet d’extraction de protéines de colza destiné au marché alimentaire mondial sur le site de Saipol, à Dieppe à partir de 2022. “La société Olatein Avril (25 %) et DSM (75 %), va y fabriquer une poudre de colza, riche en protéines pour des clients réalisant des laits et « steaks » végétaux, barres protéinées, nuggets ou ingrédients alimentaires.” (Ouest France 20-07-2020). DSM étant leader dans le secteur des ingrédients alimentaires. Et Avril, présidé jusqu’à son décès par Xavier Belin, ancien président de la FNSEA, étant spécialisé dans les agrocarburants, la transformation végétale et les huiles (Lesieur, Puget…). Éleveurs d’un côté, céréaliers et producteurs d’oléoprotéagineux de l’autre, peut-être un nouveau grand écart en perspective pour les gérants de la maison mère syndicale établie rue de la Baume…
Ceci étant dit, essayons de deviner ce que va devenir l’élevage français. Et n’y allons pas par quatre chemins : il va disparaître ! Pourquoi ? Tout simplement car Niel et ses acolytes n’étant pas des philanthropes, ils ont vu le filon que représentait, à l’échelle planétaire, cette nouvelle façon de consommer. En témoigne l’augmentation des ventes de viande végétale aux États Unis estimée à + 270 % pendant la durée du confinement, alors que bon nombre d’abattoirs étaient fermés. Rajoutons à cela le véganisme et les mouvements végétariens qui monopolisent les tendances culinaires avec, en toile de fond, les actions menées par les antispécistes dans les élevages ou chez les professionnels de la filière viande. Le tout dans un contexte où l’élevage est systématiquement montré du doigt, notamment par certains médias, dès qu’il s’agit d’évoquer l’impact de l’agriculture sur l’environnement. Plus inquiétant encore, l’évolution des techniques usitées en laboratoires visant à produire des aliments non issus de l’agriculture. Récemment un rapport du groupe de réflexion RethinkX prophétise la mise sur le marché d’ici 2035 de protéines produites en laboratoire, commercialisées à des prix 10 fois moins élevés que les protéines animales. Le think-thank prévoit, outre Atlantique, une chute de 50 % de la production des industries bovine et laitière d’ici 2030. De la viande de culture en quelque sorte dont la fabrication pourrait même être confiée à des imprimantes 3 D. Certains adeptes de ce “Food as Software” parlent de concepts moléculaires conçus comme des programmes informatiques duplicables à volonté.

Le nouveau monde ne sera pas agricole
Partout dans le monde les géants de l’agroalimentaire sont dans la course aux protéines de synthèse et aux steaks végétaux. Ils savent, à ce titre, qu’ils peuvent compter sur les lobbies écologistes pour les soutenir dans un contexte où ces derniers dénoncent l’accaparement des terres par l’élevage. Sur le site des Nouveaux Fermiers, le message est on ne peut plus clair : “Nos produits représentent 11 fois moins de CO2 et jusqu’à 10 fois moins d’eau que la viande animale. Le poulet produit 7 kg de CO2 et nos aiguillettes végétales représentent moins de 0,5 kg de CO2. La viande de bœuf produit 35,8 kg de CO2 et nos steaks végétaux représentent moins de 3,4 kg de CO2. En réduisant de 50 % la consommation de viande animale, c’est 4,45 millions de kilomètres carrés de terres agricoles qui pourraient être utilisés pour l’agriculture maraîchère, soit la taille de l’Inde et de la Mongolie ! Selon la FAO, la superficie actuelle des terres agricoles sur Terre est de 15 millions de kilomètres carrés et le bétail en occupe près de 80 %, mais produit moins de 20 % de l’approvisionnement mondial en calories…”
Le nouveau monde ne sera pas agricole. Dans un futur proche, le paysan sera remplacé par le laborantin. Il deviendra ce subalterne à qui l’on confiera l’entretien de quelques espaces dédiés aux loisirs, entre deux polypiers urbains où l’humain vivra pour consommer et consommera pour vivre. Le concept n’est pas nouveau. Sauf que, pour nous piéger, il utilisera nos consciences en nous faisant culpabiliser à coup de spots publicitaires orientés, de reportages télévisés moralisateurs et d’interventions politiciennes verdoyantes qui conduisent systématiquement à cette évidence : si tu n’es pas écolo, tu es un salaud.
Notons ce passage, également relevé sur le site des Nouveaux Fermiers, qui mériterait “peut-être” toute l’attention des syndicats agricoles : “Une lourde empreinte écologique de l’élevage, responsable de 14,5 % des émissions de gaz à effet de serre et de 63 % de la déforestation en Amazonie. Les émissions de gaz à effet de serre issus de l’élevage représentent plus que la consommation de carburant des transports…”

“Tu te rends compte, pépé mangeait des animaux !”
Un site sur lequel les éleveurs devraient se rendre pour vérifier dans l’onglet “Nos idées” les effets que certains propos peuvent avoir sur les esprits influençables. Avec, notamment, un chapitre “édifiant” consacré au “Rôle de la consommation excessive de viande et de l’élevage intensif dans les grandes épidémies de ces vingt dernières années.” Des affirmations qui balayent large, de la vache folle à la Covid-19 en passant par l’Ebola et le Sras…
Le genre de message que les jeunes générations, avec une virulence qui dépasse parfois l’entendement, sont en train d’intégrer, de défendre et de promouvoir, en accusant leurs ainés d’avoir saccagé la planète tout en empoisonnant leurs prochains. Ces jeunes générations qui avanceront probablement masquées avec une puce électronique implantée sous la peau ou près du cerveau et qui diront à leurs enfants : “Tu te rends compte, pépé mangeait des animaux !” Ces jeunes générations qui se seront “enfin” définitivement débarrassées du bruit des sonnailles, de l’odeur du lisier, de la poussière des tracteurs et du pas encombrant des troupeaux. Ces jeunes générations manipulées par les gourous d’un monde impitoyable qui leur font miroiter des lendemains meilleurs à l’aune d’un avenir plus que jamais calibré par la finance, conditionné par la vertu et ourlé par la peur. Quand les écologistes d’aujourd’hui et les “nouveaux fermiers” milliardaires qui les utilisent pour en tirer profit ignorent tout ou presque de cette vieille branche sur laquelle ils sont assis.

Une réflexion sur “Steaks végétaux : le “nouveau fermier” sera un laborantin milliardaire (Par Jean-Paul Pelras)

  • 1 octobre 2020 à 11 h 28 min
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    Les émissions de gaz à effet de serre issus de l’élevage représentent plus que la consommation de carburant des transports…”
    Propagande pour simplet qui en dit long : Les escrolos comptabilisent tout ce qui touche à l ‘élevage (les pets, la production d’aliments, les bâtiments, etc etc;) Mais le plus étonnant c’est qu’ils comptabilisent aussi le transport des animaux. Cette production de GES par le transport des animaux est donc comptabilisée 2 fois : une fois pour l’élevage et une autre fois pour le transport.
    Maintenant imaginez vous que les escrolos compte aussi dans les gaz a effet de serre du transport tout ce qui est relatif au transport comme il le font pour l’élevage : extraction du pétrole, des minerais, fabrication des véhicules, bateaux, avions…, des routes, des ponts des rails, bref de tout ce qui touche au transport!

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